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Cahier de nuit


Thierry73

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Merci pour toutes ces reflexions..

Tous les jours, en France, des enfants sont spirituellement « poignardés » par des professeurs qui n’ont aucune conscience du mal qu’ils font, qui sont incapables de comprendre, de ressentir, de partager, d’avoir la moindre compassion, d’éprouver le moindre amour.

Qui se pose la question de ce que vivent les enfants ?

Comme je comprends ce passage... Et pas seulement avec les professeurs...

K., CM1 travaille comme un fou depuis 1an et demi qu'il est dans ma classe, il commence à croire en lui, comprend qu'il est capable de réussir beaucoup de choses, il a fait d'immenses progrès, et je ne cesse de le lui dire, ainsi qu'à sa maman qui a besoin de l'entendre.

Et là, elle vient me voir totalement paniquée parce que l'orthophoniste a fait passé un bilan dans lequel elle a évalué que le niveau de K. était "très faible" en lecture et compréhension...

Pardon? A-t-elle vu les progrès qu'il a fait? D'où il part? Est-ce qu'un "examen" frontal, hyper stressant pour cet élève facilement impressionnable vaut quelque chose par rapport à tout ce qu'il sait effectivement faire?

Et la confiance en lui perdue, la maman qui se pose alors mille questions alors qu'elle a bien constaté elle même qu'il est beaucoup plus serein et fier de ses résultats..

Et oui, moi aussi je les aime mes élèves...

Bonjour Mava. Un vaste problème que cette distanciation entre la classe et les prises en charge extérieures. J'ai cette année, un élève dyslexique, dysphasique, dysorthographique. Troubles attentionnels très forts, très profonds...Si je tenais compte des bilans, je pourrais penser qu'il n'y a pas grand-chose à faire. Dans la classe, chaque semaine, les enfants présentent un "Incroyable talent". ce qu'ils veulent : chant, danse, dessin, poésie, théatre, gym, musique, maquette, tout ce qui a été fait ou préparé par eux-mêmes. Individuellement ou en groupe. Ce petit gars s'est mis à dessiner, dessiner, dessiner. Ce qu'il n'avait jamais fait encore. Un coup de crayon phénoménal. Il a créé un personnage qui est devenu la mascotte de la classe, il fait des dessins pour tout le monde.

Il est transformé. Ses problèmes n'ont pas disparu, mais la façon dont il les vit a changé. C'est cela qu'il faut préserver ou ramener. Ne pas rester dans un cadre purement cognitif, scolaire, ne pas rester dans le jugement des spécialistes, dans les neurosciences (qui m'inquiètent fortement...)

La part existentielle. C'est elle qui peut soutenir.

Voilà toute la problématique de notre système. Le dessin ne sauvera pas la scolarité de N mais elle le préservera de l'humiliation, de la détresse, du sentiment d'être différent, exclus, largué, toujours le boulet qu'on traîne...Il faut essayer d'imaginer ce que vivent ces enfants-là...ceux qui ont une étiquette collée sur le front. Et ce que vivent les parents de ces enfants que le système lui-même détériore. Le cas de cette maman qui panique alors qu'elle était heureuse de sentir son enfant motivé, heureux, épanoui...

Oui, nous sommes nombreux à les aimer nos élèves mais comme il est difficile parfois de les protéger...Merci à vous.

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En tant que maman d'une enfant "différente", j'apprécie tes propos et ne peut qu'être d'accord avec toi. Ma sensibilité de maman et le travail effectué auprès de ma fille pour qu'elle s'en sorte (elle est autiste de haut niveau) ont eu d'énormes répercussions sur ma façon de percevoir le milieu scolaire et d'enseigner. Et force est de constater que je dois me battre pour résister car ma façon d'être avec mes élèves et mes approches pédagogiques n'ont pas "séduits" ma nouvelle inspectrice (venue pour "redresser" notre circonscription et notre "minable" école de ZEP aux résultats "catastrophiques")....

Combien de temps vais-je tenir le coup ? Tenaillée entre les "beaux discours" et la réalité de terrain qui m’apparaît chaque jour comme un vaste carnage où l'on ne respecte pas les enfants ?

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En tant que maman d'une enfant "différente", j'apprécie tes propos et ne peut qu'être d'accord avec toi. Ma sensibilité de maman et le travail effectué auprès de ma fille pour qu'elle s'en sorte (elle est autiste de haut niveau) ont eu d'énormes répercussions sur ma façon de percevoir le milieu scolaire et d'enseigner. Et force est de constater que je dois me battre pour résister car ma façon d'être avec mes élèves et mes approches pédagogiques n'ont pas "séduits" ma nouvelle inspectrice (venue pour "redresser" notre circonscription et notre "minable" école de ZEP aux résultats "catastrophiques")....

Combien de temps vais-je tenir le coup ? Tenaillée entre les "beaux discours" et la réalité de terrain qui m’apparaît chaque jour comme un vaste carnage où l'on ne respecte pas les enfants ?

En tant que maman d'une enfant "différente", j'apprécie tes propos et ne peut qu'être d'accord avec toi. Ma sensibilité de maman et le travail effectué auprès de ma fille pour qu'elle s'en sorte (elle est autiste de haut niveau) ont eu d'énormes répercussions sur ma façon de percevoir le milieu scolaire et d'enseigner. Et force est de constater que je dois me battre pour résister car ma façon d'être avec mes élèves et mes approches pédagogiques n'ont pas "séduits" ma nouvelle inspectrice (venue pour "redresser" notre circonscription et notre "minable" école de ZEP aux résultats "catastrophiques")....

Combien de temps vais-je tenir le coup ? Tenaillée entre les "beaux discours" et la réalité de terrain qui m’apparaît chaque jour comme un vaste carnage où l'on ne respecte pas les enfants ?

Ah, les "enfants différents"...Quelle absurdité ce terme, quel étiquetage destructeur...Des effets dévastateurs parfois et qui se transmettent d'enseignants à "en-saignant"... Comme si ces enfants étaient vidés de leur existence, année après année. Cette lutte constante et acharnée des parents pour parvenir à préserver chez l'enfant une image positive de lui-même. Qui a créé ce trouble existentiel ? Pas l'enfant lui-même mais le cadre dans lequel il ne parvient pas à exister sereinement. Si on enlève ce cadre, les difficultés disparaissent avec lui. Oui, mais, nous, on ne peut pas enlver le cadre parce qu'il y a des supérieurs qui veillent à l'ordre et à la continuité des dogmes.

L'an passé, j'avais 30 élèves de CM2 et parmi eux, un garçon autiste asperger, un enfant diagnostiqué Haut Potentiel, une enfant mutique qui se mutilait les bras, un enfant encoprésique, une enfant malentendante apareillée (une éduc trois heures par semaine), onze redoublants sur divers classes, treize enfants vivant avec des parents séparés dont trois couples en guerre totale et deux couples qui se sont séparés pendant l'année. Pas d'AVS, plus de maître G, une maîtresse E débordée avec un secteur gigantesque et une psycho scolaire avec un secteur Concarneau-Strasbourg...

Alors, je fais quoi ? Je reste dans le cadre et j'envoie ces enfants à la boucherie l'année suivante ou j'essaie d'instaurer une relation différente. Non pas que je pourrais tout régler, je ne tourne pas aux champignons hallucinogènes, mais juste pour essayer de leur montrer qu'il est possible qu'ils trouvent en eux un espace de paix, de bien-être, de réconfort, et peut-être même un Talent qui leur permettrait d'exister différemment...

Ce qu'on nous impose de vivre est parfois au-delà des possibilités qui nous ont été données, au-delà de nos forces intérieures. Je sais que je vieillis de plus en plus vite, je le sens...

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« TU APPRENDRAS DANS LA DOULEUR… »

Il est indéniable que l’effacement partiel du rôle du père dans le registre de l’autorité a un effet néfaste sur les enfants. Il ne s’agit pas pour autant d’un phénomène général et comme toute généralité, imaginer que ce phénomène concerne l’ensemble de la population est une exagération plus néfaste que les effets qu’elle veut combattre. Il n’est pas plus vrai à mes yeux que les enseignants se soient engagés dans un fonctionnement « maternant » C’est même plutôt l’inverse. Ils cherchent à pallier cet effacement partiel de l’autorité. Mais ils n’ont aucune légitimité au regard des familles dont la structure est déficiente. Il leur est donc impossible de trouver une quelconque crédibilité s’ils s’en tiennent à un rapport de forces. C’est perdu d’avance. Je n’ai pas obéi à mes professeurs parce qu’ils remplaçaient mon père étant donné que mon père, même s’il était peu présent, déléguait à mes professeurs le droit d’être exigeant. Si ce père n’applique pas lui-même cette exigence, les professeurs ne pourront jamais le remplacer s’ils n’œuvrent pas quotidiennement à l’élévation existentielle de l’enfant et se contentent d’œuvrer à l’application stricte et bornée des apprentissages et des connaissances. C’est là que se trouve la part essentielle du travail. Prendre en considération l’enfant avant de juger le niveau de l’élève. Si on délaisse ce regard empathique, on entre dans le conflictuel. Si l’enseignant n’est qu’un technicien, il n’aura jamais aucune crédibilité dans l’éducation et son enseignement lui-même sera inévitablement déficient.
Je suis assez sidéré de voir que cette attitude respectueuse puisse être considérée comme favorisant l’élaboration d’un « enfant-roi ». Il n’y a dans ma classe aucun « enfant-roi » et je ne suis pas non plus un « maître-roi ». Il y a un équilibre relationnel qui se nourrit d’un respect mutuel. Nous sommes les « sujets » de la connaissance. Aucun détournement de la règle n’est admis, aucune contestation de l’autorité, aucun refus de l’exigence, aucun déni de la performance. Il ne s’agit pas pour autant d’autoritarisme étant donné que les enfants savent que la justice est le pilier. Le fondement de cette justice est construite sur un principe très simple : « Tu n’es pas ce que tu fais. » Cette distinction essentielle, vitale, entre la difficulté épisodique de l’enfant dans son travail et ce qu’il est lui-même, en tant qu’être humain. Son niveau scolaire peut être évalué mais il n’aura aucune incidence sur le respect que je lui porte. Je continuerai à faire appel à ce souci constant de l’exigence, à le renvoyer à une observation de ses propres fonctionnements. Je suis celui qui a pour rôle de maintenir la qualité du miroir. Qu’il puisse avoir une vision claire de ses dysfonctionnements, tout autant que de ses performances. De la même façon qu’il n’aura à subir aucune parole blessante : « Tu es vraiment nul », il ne pourra se glorifier de paroles pompeuses : « Tu es vraiment excellent. »
« C’est un travail insuffisant » ou « c’est un très bon travail » sont des paroles qui ne concernent que l’élève. L’humain, quant à lui, sera systématiquement renvoyé à l’analyse minutieuse des phénomènes internes qui ont conduit à cette appréciation.
Il est donc primordial de garder à l’esprit que la technique ne fait pas l’humain. Mais que l’humain s’observant peut améliorer l’acquisition des techniques.
C’est là que je me place, ni « maternant », ni « autoritaire ». Juste celui qui favorise l’observation interne. Il ne s’agit pas pour autant « d’un cocon fusionnel » qui les protégerait de toute difficulté, de toute frustration, de toute remise en question, avec une acceptation bienveillante des faiblesses, de l’abandon, du désintérêt, de la démotivation. Mais comment pourrait-on motiver des enfants à travailler s’il ne leur est jamais permis d’établir cette observation macroscopique de ce qu’ils vivent ? L’enseignant a pour rôle de les élever, non pas seulement dans des acquisitions cognitives mais bien davantage, et de façon prioritaire, dans cette quête de Soi. Il ne s’agit donc pas de nier ou de cacher les faiblesses mais de les combattre dans une lucidité permanente au regard des mouvements de pensées, de la gestion des émotions, des dérèglements ponctuels de l’intellect.
« Pourquoi est-ce que tu t’es trompé dans cet exercice alors que tu en connais tous les tenants ? »

Ni autoritarisme, ni cocon fusionnel mais cet effet miroir qui se doit d’être constant. L’enseignant essuie la buée sur le miroir de la conscience.
« Regarde à l’intérieur de toi et tu comprendras ce qui t’entoure. »

Toute technique qui est perçue comme une finalité aura besoin d’autoritarisme. Toute technique qui devient le ferment d’une connaissance de soi à travers une connaissance universelle devient une motivation suprême.

Pourquoi est-ce que les enfants aiment les séances de sport ? Parce qu’ils apprennent une technique à travers le « jeu » (et le « je ») et que ce jeu les conduit à une meilleure connaissance et usage de leur potentiel. Il ne reste qu’à appliquer ce principe à l’ensemble des apprentissages. Ah, j’entends déjà les contestataires s’écrier qu’à l’école, on ne joue pas, on travaille ! Ce qui revient à dire qu’il faut habituer les enfants à leur future vie d’adulte…
« Mon enfant, tu ne travailleras pas pour le bonheur de travailler et de mieux te connaître mais juste pour gagner ta vie. Et tu seras aussi déprimé et aigri que moi. C’est la vie ; tu dois apprendre à être frustré. »

Merci pour ce cadeau…

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RÉFORMES

Il ne s’agit pas à mes yeux de constituer de nouvelles réformes. Trente ans que je vois passer des Ministres et leurs « nouvelles méthodes »... Qu’ils aillent donc lire Krishnamurti et on pourra commencer à parler de choses sérieuses. René Barbier, chercheur contemporain, aurait beaucoup de choses à leur apprendre également. Pour la simple raison qu’il n’y a jamais eu une seule réflexion réelle. Et que les enseignants ont été appelés à rester des techniciens.


Il ne s’agit pas de se demander quelles sont les conséquences de la démotivation de certains sur les autres mais des raisons de cette démotivation. Dans les épidémies, les médecins ont pour rôle de soigner les malades et de protéger autant que possible les biens-portants. Les chercheurs, pour leur part, travaillent à comprendre l’apparition de l’épidémie. Je n’attends pas que des chercheurs m’apportent une réponse. Je vis constamment avec une population dont la diversité est considérable. Si je n’étais pas capable d’être chercheur et par conséquent observateur, je ne mériterais pas l’honneur de porter cette mission d’enseigner. Je n’attends donc rien des réformes parce que les réformateurs n’ont aucune empathie pour l’humain. Ils travaillent au conditionnement des citoyens et des contingents de futurs frustrés.

Comment pourrait-il en être autrement pour ces enfants alourdis de données techniques quand ces données ne sont pas destinées à les porter vers un meilleur d’eux-mêmes ? Formatés, conditionnés, humiliés, comparés, hiérarchisés, poussés à la compétition. « Le professeur a toujours raison, même quand il a tort. »

Comment les enfants pourraient-ils être motivés par ce « Maître-roi » ?

C’est justement là que « l’individualisation » du travail prend toute son importance. Si les enseignants s’obstinent à ignorer les différences éducatives, sociales, historiques, culturelles et à travailler comme s’ils avaient affaire à un contingent d’individus identiques ou susceptibles de se conformer à une pratique unilatérale, ils n’ont pas le droit de se plaindre. Ils ont choisi la voie frontale de celui qui a raison même quand il a tort. Qu’ils en assument les conséquences.
D’autre part, telle qu’elle est conçue, l’école n’a pas vocation « d’élever » les individus mais d’user de leurs compétences pour maintenir la croissance et y participer, soit comme consommateur, soit comme concepteur. Ce sont juste des instruments. Et tant que la part existentielle des individus sera bafouée, il n’en sera pas autrement.

C’est aux enseignants de montrer que les techniques ne représentent pas à elles seules la citadelle mais uniquement des pierres assemblées. L’individu est la citadelle et les techniques ne représenteront jamais l’objectif. Si on en vient à honorer les pierres, on reste les yeux collés à l’édifice et on n’en voit plus la dimension réelle.

Si on considère que la citadelle représente le groupe humain et que chaque pierre est un individu, que des pierres soient ébréchées ou partiellement disjointes n’affaiblit l’ensemble que si le groupe humain est amené à focaliser son attention sur ces éléments. Mais il est connu depuis bien longtemps qu’on ne combat les faiblesses qu’en leur opposant la plénitude des forces acquises et non la concentration des pensées sur les effets néfastes de ces faiblesses. À vouloir lutter contre des éléments disparates, on leur donne vie, on les gave d’importance jusqu’à en perdre de vue l’adhésion des pierres. Il est inutile de poser des questions si on n’identifie pas la raison première de la question elle-même.

Alors, il faudrait donc renforcer encore davantage le formatage, l’atelier de poteries pour les esprits, nier avec une force décuplée, cette diversité ?...

Puisqu’on a échoué à aimer les différences et à contribuer à enrichir le groupe humain en développant les potentiels, réduisons intégralement ces différences. Accusons les formateurs qui prônent l’individualisation et la reconnaissance des existences de contribuer à une société d’enfants rois, punissons les de cet outrage puisqu’ils mettent en péril la cohésion sociale !...

Il y a une question essentielle qui revient constamment dans ma classe : « Qui est responsable ? » Il s’agit de remonter à la source du problème. Les enfants apprennent ce cheminement dans chaque situation et ne subissent dès lors aucune frustration. La frustration, pour elle-même, une soumission totale, sans aucune parole signifiante, une frustration autoritaire, n’est nullement éducative. Ce qui l’est, c’est d’identifier la cause des émotions qui surviennent. Ou alors, c’est à l’armée qu’il faut s’adresser. Un enfant qui n’a pas fait son travail de maison en subira les conséquences si ce rejet de l’exigence n’est pas clairement justifié. Il ne participera pas à une activité qui le motive d’emblée tant que ce travail initial n’aura pas été effectué. Les émotions générées par cette frustration seront soupesées dans le creuset de sa responsabilité. Considérer que de renvoyer l’enfant à une observation lucide de ses actes, de ses pensées, de ses fonctionnements contribuent à l’élever à un statut d’enfant-roi témoigne à mon sens d’une peur d’adulte qui ne veut pas perdre sa prédominance sur de jeunes esprits. Et là, c’est à l’enseignant d’apprendre à s’observer. Mais combien acceptent-ils ainsi d’inverser les rôles ?

Vendredi, en classe, je circulais dans les allées, les enfants font un exposé personnel, un sujet libre. Ils ont chacun un grand carton posé sur la table. Je demande à l’enfant : « Alors, sur quoi fais-tu ton exposé ? »
L’enfant lève les yeux, une incompréhension totale dans ses yeux. Un instant suspendu, comme une réponse qui n’ose se dire.

« Ben, je le fais sur mon carton… »

Et oui, ma question était absurde et j’ai éclaté de rire, j’ai remercié cet enfant de m’avoir montré mon erreur. Il a répondu avec sa logique d’enfant mais avec également une incompréhension totale quant à l’absurdité de ma question.

« Comment le maître peut-il me poser une question aussi bête ? »
Le maître a toujours raison même quand il a tort. Et bien, non, dix mille fois non. J’avais tort et je me suis excusé de l’avoir troublé. J’ai reformulé ma question.
Apprendre dans un rapport respectueux et sans aucune peur.

L’enseignant est lui-même l’élève de ces élèves. Il se doit d’établir en lui une observation constante de ses propres fonctionnements et que l’exigence qu’il réclame de ses élèves, il se l’impose également. Tout le reste, les réformes politiques, les interférences sociales, éducatives, historiques, les pressions hiérarchiques, ce sont des phénomènes environnementaux. Ils créent des influences mais il appartient aux enseignants de ne pas les laisser recouvrir la citadelle.

L’éducation ne se limite pas à l’apprentissage des règles mais à leur compréhension fine. Et c’est lorsqu’elles sont comprises et validées que l’individu se libère de la frustration. Le frustré finit immanquablement par bafouer l’autorité parce que l’incompréhension des émotions générées par la frustration lui devient insupportable.

La prise en considération de la dimension existentielle contribue à une éducation réussie.

Une éducation réussie contribue à l’instruction.

En France, on travaille à l’envers. D’abord, on s’acharne à maltraiter les individus et ensuite on se plaint de leur rébellion. Lorsque j’entendrai parler de réforme philosophique, j’écouterai attentivement. Pas avant.

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TOUT LE MAL EST LÀ.

Le savoir et la compréhension sont deux choses tout à fait différentes. Seule, la compréhension peut mener à l'être. Le savoir est au service de l'avoir. Il n'est qu'une présence passagère, comme une matière putrescible. L'enseignement n'apprend aux enfants qu'à emmagasiner s'il ne prône que l'avoir. C'est une course à la surenchère. "Moi, je possède plus que toi." Société de consommation qui somme les cons de lui obéir.

Un nouveau savoir chasse l'ancien, comme l'ipod 324 chassera le modèle 323.

Le savoir aura permis d'établir une hiérarchie dans la capacité des individus à absorber les données comme un ivrogne se remplit. L'ivresse est douce, elle annihile les douleurs...

La compréhension.

Elle s'installe lorsque les individus qui s'attellent au savoir entreprennent simultanément une observation interne des phénomènes générés par la difficulté liée au travail d'acquisition : toutes les émotions, le doute, la peur, le stress, l'estime de soi, la prétention, la volonté, l'opiniâtreté, le découragement, les intentions avouées, les intentions cachées, tout ce qui relève de l'existentiel et non du cognitif. Le bonheur n'est pas dans l'obtention d'une note ou d'un diplôme mais dans la compréhension de soi, dans cette connaissance dont on ne parle pas aux enfants.

Et c'est la cause essentielle du désastre.

Quand on a gavé pendant des années des individus qui se cherchent, jusqu'à leur donner le sentiment que ces connaissances sont une raison supplémentaire à leur perdition, il est vain de vouloir les maintenir dans un système qui les égare.

Tant qu'on ne prendra pas en considération la dimension existentielle de l'enseignement, on œuvrera à la construction d'une société où cohabiteront des individus éteints, consuméristes, matérialistes, immatures et quelques individus révoltés, jusqu'à la folie, jusqu'au meurtre, jusqu'au suicide...

21) PHILOSENFANTS.

Je suis toujours aussi ébahi par l'intérêt extraordinaire des enfants pour des questions à visées philosophiques. Je pourrais passer des journées entières à parler avec eux, de tout ce qui les touche et qu'ils ne parviennent pas à exprimer parce qu'ils ne sont pas assez sollicités, parce qu'ils ne sont pas assez amenés à observer ce qui se passe en eux, parce que le monde adulte ne considère pas assez que leur interrogations silencieuses méritent d'être écoutées, partagées, assouvies, parce que l'aspect cognitif de l'école se doit d'être mis en avant, qu'ils doivent réussir leurs "études"...

Mais c'est la Vie en soi qu'il faut étudier !

Et amener par mimétisme des enfants à penser que les questions existentielles sont des pertes de temps qui disparaîtront avec l'âge adulte est une condamnation de l'individu.

On a parlé du "désir mimétique" aujourd'hui. Une heure à analyser les comportements associés à la dérive des individus qui se perdent dans des "conflits" d'ego et des activités insignifiantes.

"Les gens ne devraient pas tant penser à ce qu'ils doivent faire mais bien davantage à ce qu'ils doivent être". Maître Eckhart.

Une élève a lu ce texte affiché au mur de la classe et a demandé ce que ça signifiait. Elle avait elle-même la réponse d'ailleurs. Il a juste suffi que je la mette sur la voie et qu'elle sente qu'elle pouvait exprimer ce qu'elle portait.

"Si tu n'es pas toi-même, qui pourrait l'être à ta place ?" Henry David Thoreau.

Toujours le même chemin de lucidité, toujours ces textes qui tapissent les murs de la classe et qui sont bien plus importants que les tables de multiplication ou les règles d'orthographe.

C'est parce qu'ils peuvent échanger, interroger, partager, raconter, explorer les émotions associées à toutes ces questions vitales qu'ils sont disponibles ensuite pour apprendre ce qu'ils doivent acquérir pour continuer à progresser "scolairement".

Toujours cette impression qu'en concentrant le travail à son aspect cognitif, en bridant l'aspect existentiel, nous formons des jarres en ignorant la qualité des nourritures qu'elles transportent. Le contenant et le contenu...Est-ce que le fait de "juger" de la qualité scolaire d'un enfant, je suis capable de "juger" de la qualité humaine de l'enfant ? Absolument pas.

Je rencontre tous les ans des enfants qui sont "performants" scolairement et qui sont perdus dans leur connaissance d'eux-mêmes, qui ne sont pas capables d'établir durablement cette observation de leur fonctionnement et qui sont juste "soumis" ou formatés à des réponses liées à des apprentissages techniques. Mais dès que j'aborde avec eux des discussions d'ordre existentiel, il n'y a plus personne. Comme un gouffre immense qui s’ouvre en eux et que les savoirs livresques ne peuvent combler. Ils ne savent pas ce qu'ils font, ils ne savent pas ce qu'ils vivent, ils sont vécus...D'autres sont en conflit permanent avec d'autres enfants ou d'autres adultes, n'ont aucune limite, aucune conscience morale, tout leur est permis, ils n'ont aucun regard sur leur attitude et se laissent aller à toutes leurs impulsions.

"Vérifie toujours à chaque instant, que tes pensées, tes choix, tes décisions et tes actes sont à l'image de la personne que tu es et de celle que tu veux être. "

Toujours les amener à établir cette vigilance envers ce qu'ils font afin que ça corresponde à ce qu'ils veulent être. Bien souvent, ces enfants-là se placent en "victimes", essaient de justifier leurs actes, renvoient la faute sur les autres et sont incapables d'observer ce qu'ils ont déclenché. Ils n'en voient que les effets. Qu'on ne vienne pas me dire que ce travail d'exploration de l'individu est du temps perdu. C'est long à mettre en place et j'ai parfois l'impression d'un travail inutile...Je me force à oublier l'intention et j'accepte l'idée des errances.

Je sais bien aussi que le collège ne proposera pas ce genre de "développement personnel" parce que le système ne le permet pas, que l'organisation est beaucoup trop rigide et que les professeurs vivent eux aussi une pression beaucoup trop importante pour qu'ils s'autorisent ce genre de travail.

J'entends parfois d'anciens parents d'élèves me dire que la transition avec le collège est vraiment très difficile pour leur enfant, que la pression scolaire est énorme et que tout le reste est rejeté. La prise en considération de l'individu est quasi inexistante. Les rébellions se multiplient, les échecs s'installent. Quand je reçois dans ma classe d'anciens élèves, je suis effaré de ce qu'ils racontent...L'impression qu'ils montent au "front", qu'ils y sont en danger.

Je ne comprends pas ce déni de l'existence...Comment peut-on envisager participer à la construction du contenant si le contenu ne devient qu'un poison qu'il faut ingérer de force. Le contenant sera immanquablement "souillé", avili, dégradé étant donné qu'il est intoxiqué par le gavage immonde qu'il subit. Quand je regarde la population obèse américaine, j'ai une image de ce contenant perverti par le contenu ingéré. Malbouffe, malculture, malexistence.

Que l'école participe à cette extinction des élans existentiels des enfants me désole au plus haut point.

Le ministre actuel veut instaurer une "morale laïque". Bien, mais de quoi s'agit-il ? Une nouvelle matière, avec un programme, des évaluations, toujours le fonctionnement compétitif, comparatif ? Mais dans ce cas-là, on travaille à l'envers. On réduit l'humain encore une fois, on ne le porte pas, on l'encadre, on ne l'élève pas, on le formate. Cette "morale", je la nomme philosophie existentielle et elle est constante dans ma classe, elle n'appartient pas à un horaire, à un cadre précis, elle est à la source de tout ce qui se passe en classe. Je ne l'évalue pas par une norme chiffrée et qui serait inévitablement subjective mais juste par le bonheur que les enfants éprouvent à être là, à se sentir grandir, à s'observer, à œuvrer à ce bonheur de la vérité en eux.

Nous devons contribuer à ce que l’enfance soit une œuvre d’art.

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je mène depuis 2 ans des ateliers philosophiques: cela mobilise énormément les enfants, et mes élèves les plus difficiles sont intarissables ....

Des petits projets très bien ficelés et abordables étaient proposés dans la revue Pomme d'Api.

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je mène depuis 2 ans des ateliers philosophiques: cela mobilise énormément les enfants, et mes élèves les plus difficiles sont intarissables ....

Des petits projets très bien ficelés et abordables étaient proposés dans la revue Pomme d'Api.

Les textes de Michel Piquemal sont vraiment très riches, je trouve. Sur un plan personnel, ils proposent déjà des réflexions passionnantes et les enfants sont très réceptifs à toutes ces petites histoires. On les amène en plus à prendre conscience que la littérature est une porte d'entrée à la réflexion, que les livres sont à la source de la pensée existentielle. Et c'est un cadeau magnifique à leur faire :)

Le Bien et le Mal

Je sais bien que ces deux données sont très subjectives au regard des tourments des hommes. Un assassin ne voit pas le mal dans le bien qu’il se fait en répondant à ses impulsions. Un industriel ne voit pas le mal dans le bien qu’il se fait en vendant des armes. Un politicien ne voit pas le mal dans le bien qu’il se fait à manipuler les masses. Un financier ne voit pas le mal dans le bien qu’il se fait à spéculer jusqu’au dérèglement complet du système.

Tout ça relève de la conscience de chacun et elle est extrêmement fluctuante, versatile et sombre…

Ce qui m’importe, c’est l’idée de vouloir lutter contre ces phénomènes, contre ces entités égotiques, contre ces êtres néfastes. Que puis-je y gagner ? Est-ce que j’ai un réel pouvoir d’opposition ? Je peux toujours les dénoncer mais est-ce que ça aura un effet réel ? Je peux envisager que la prise de conscience s’étendra mais je n’en ai aucune certitude.

Alors ?

Comment agir ? Puisque je tiens tout de même à rester ancré dans le monde social et à « faire ma part ». Comment ne pas me perdre dans le chaos, ne pas le subir au point d'en souffrir, étant donné que cette souffrance ne réglera rien.

Car, puisque je lutte contre des douleurs propagées, en quoi la douleur que ce combat génère servira-t-elle la cause qui me tient à cœur ?

Finalement, j'ai tenté d'imaginer la scène. Un puits immense engloutissant les colères, un autre puits, tout aussi immense, accueillant les actes justes, bons et aimants.

Si je succombe à mes colères, je viens alimenter le puits des colères. Rien de positif n'en ressortira étant donné que mes luttes viendront nourrir ce contre quoi je lutte. Non pas les actes qui me révoltent mais les émotions affiliées. Le mal ne se nourrit pas d'amour mais de colère, de rancœur, de violences.

Dès lors, je me dois de m'extraire du phénomène généré.

Il ne s'agit pas de se voiler les yeux, de taire sa conscience, de vivre comme les trois singes qui s'illusionnent pour s'interdire de réagir mais de trouver les moyens positifs de lutter sans tomber dans l'abîme des noirceurs.

Il n'y a qu'une solution.

Œuvrer au juste, au bon, à l'amour, agir avec lucidité au regard des troubles intérieurs. Rester en marge, non pas dans une fuite sans fin mais dans un espace qui me convient et où je peux agir dans cet amour de la vie.

Puisque je ne peux quasiment rien contre les effets destructeurs de certains hommes, il ne me reste qu'à établir l'existence qui viendra nourrir le puits de l'amour.

Sans même me demander si cela sera suivi d'un quelconque effet, si cela pourra servir d'exemple, sans chercher à savoir si cela suffira à réduire les désastres environnants.

Je n'y peux rien. Rien du tout.

Ou alors,il faudrait que je m'interroge sans cesse sur les effets durables des enseignements prodigués dans ma classe. Est-ce que les enfants y ont trouvé une ligne directrice ? La question serait absurde. Ça ne me regarde pas. Et je n'y peux rien. Mais je peux par contre continuer à montrer comment moi-même je m'enseigne, comment je cherche à progresser, encore et encore.

Cet attachement à ma propre existence n'a rien d'égoïste. Il n'est que question d'alimenter le puits d'amour qui me bouleverse. Et de refuser de donner mon énergie au puits de colères qui me blesse.

Il ne me servirait à rien de lutter contre le Mal en usant de ses méthodes.

Je vais tenter de faire ma part en diffusant autant que possible les parfums bienveillants qui éclairent le puits d'amour.

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Bonjour !

Je cite un extrait d'une note ministérielle que vous avez commenté il y a quelque temps:

Nous connaissons l'engagement des conseillers d'orientation-psychologues et l'action des centres d'information et d'orientation (CIO) dans cette mission, comme leur contribution à la lutte contre le décrochage scolaire.

Anecdote personnelle: Enfin, anecdote, si ça n'était pas, à mes yeux et pour mon beau fils, si grave, cela n'en serait qu'une...

Mon beau fils arrive du Sénégal cet été pour s'installer avec mon mari et moi, en France. Il était en cinquième là bas. Il a redoublé deux fois (CE2 et 5me). Ses aptitudes de lecteur sont très faibles. Bref, il a un niveau scolaire très proche du CM2. Avec la barrière d'un apprentissage de la langue française très approximatif en plus (d'où le niveau de lecture faible, évidemment!).

Rencontre avec le conseiller du CIO cet été. J'aimerais qu'il soit en 4ème voir même en 5ème, histoire qu'il ne soit pas mis en difficulté d'un point de vue scolaire, vu tout ce qui va lui être demandé comme effort d'adaptation en dehors et dans le cadre de l'école.

Problème: Il a 16 ans. Bien que d'apparence fluette et juvénile. Ah non Madame, ça n'est pas possible qu'il suive une classe dans laquelle il POURRA réellement suivre. Il est trop vieux, je ne suis même pas sûre qu'un collège voudra bien de lui car il a dépassé l'âge de scolarisation obligatoire ....

Je précise que je ne suis pas POUR les redoublement. Je suis POUR le fait que mon beau fils se sente suffisamment à l'aise pour fournir les efforts et la concentration nécessaire à ses apprentissages. Je suis POUR le fait de ne pas le mettre en situation d'échec et de lui donner du temps. Je suis POUR enfin, écouter son avis, de lui qui s'étonne que l'on fasse tout un fromage de cette différence d'âge. Qui ne comprend pas qu'on lui refuse cela et qui a peur d'être mis en 4ème, avec un programme complètement différent du Sénégal, sans avoir jamais fait de Géographie ou d'histoire comme on le fait en France, en commençant une seconde langue (en fait, une 4ème langue pour lui qui parle Wolof, français difficilement et anglais d'une manière qui aurait inspiré Gd Elmaleh), avec de grosses difficultés en maths......

Ah mais non Madame, je ne parle pas de le mettre en 4ème, ça n'est pas possible (comment ça? il était pourtant en 5ème l'année dernière!).... Il est trop âgé pour la 4ème, il y a des problèmes de différence de maturité sexuelle et peut être que s'il est trop intéressé par la chose il pourrait agresser une fille trop jeune... Heuh.... Vous avez parlé de cela avec lui... ? Honnêtement, moi j'ai plutot l'impression qu'à part le ballon....(pour le moment du mois, je sais bien que ça doit le titiller aussi, normal! Mais de là à agresser qqn.... !!!!! ??????)

Ah bon, donc il va aller où ?

Et bien en 3ème ! Si encore un collège veut bien de lui....

Mais non, nous ne voulons pas qu'il soit en 3ème, ça va être trop difficile, il va se ramasser.... Quel recours je peux avoir?

Il n'y a pas de recours possible, Madame, c'est moi qui conseille la Dasen qui valide ensuite.

Donc... ?

Donc, il ira en 3ème.

Résultat, il galère depuis le début de l'année. Il y a des cours où il ne comprend absolument pas ce qui se passe (Sciences physique, anglais, maths). Il s'accroche pourtant, il bosse près de 3 heures par jour en devoirs, apprentissages et réexplications de cours avec moi quand je peux ou sinon seul. Il cherche sur internet à trouver des documentaires, des films etc pour comprendre autrement.

Certains professeurs, auxquels j'ai expliqué la situation en réunion de rentrée (on avait rencontré le prof principal: prof de maths au tout début de l'année et on pensait que le message avait été transmis, mais PAS DU TOUT), ont adapté, si ce n'est leur enseignement du moins leur mode d'évaluation de manière à ce que ça ne soit pas complètement écrasant.

Mais cette absolu ignorance de l'individu, de son histoire, cette obligation d'évoluer scolairement en fonction d'une fourchette d'âge, sont de très gros facteur d'échec. En tout cas ça l'est immanquablement pour mon beau-fils!

Voilà. C'était mon coup de gueule, car cela me fait souffrir de le voir souffrir ainsi!

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