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Dossier proposé par Pascale Perroteau

LA PEDAGOGIE DIFFERENCIEE

1. Pourquoi la pédagogie différenciée ?

Selon Gérard de VECCHI, les élèves arrivent en classe porteurs d'inégalités. Ne pas les prendre en compte serait les renforcer.

D'après Alain BENTOLILA, un élève possède un lexique mental d'environ 1000 mots à l'entrée en CP. Certains en ont plus que 1000 et d'autres en ont 300.

Quelle que soit la méthode de lecture, l'enfant a besoin d'interroger son lexique mental pour donner du sens aux mots.

Dès l'entrée en CP, on se rend compte de différentes vitesses d'acquisition, de difficultés de compréhension, de différentes vitesses d'exécution des tâches écrites. Si on ne prend pas les différences en compte, beaucoup d'enfants en pâtiront. On ne peut pas niveler, ni par le haut, ni par le bas, ni par le milieu. On n'a pas le droit de délaisser un enfant qui a ''décroché''. Si c'est le cas, cet enfant cessera de progresser, se dégoûtera de l'école. Un redoublement ne lui sera pas plus profitable s'il n'a pas d'acquisitions de son premier CP. Il ira GROSSIR LE RANG DES 12,7% D'ILLETTRES ou adultes ayant des difficultés en lecture.

Si un enfant passe en CE1 sans avoir terminé l'apprentissage de la lecture, ou sans avoir des compétences suffisantes en mathématiques pour suivre un CE1, ce qui est fréquent dans la mesure où le redoublement du CP est exceptionnel depuis la mise en place des cycles, l'enfant perdra son temps et se découragera. S'il est gentil, il rêvassera. S'il l'est moins, il s'agitera et perturbera la classe. S'il est fragile, il déprimera. Il peut devenir un adolescent révolté voire un délinquant.

Exemple : Un enfant a fait deux CP, en est à son deuxième CE1 et ne sait toujours pas lire. Lors de son premier CP, il a vite ''décroché''.

S'il est ''parqué'' dans le fond de la classe, sans aucune activité de lecture à son niveau, si rien n'est mis en place pour lui, il ira grossir le rang des illettrés.

Un enseignant ne peut pas se déculpabiliser en se retranchant derrière l'existence de problèmes psychologiques. Les problèmes psychologiques chez un enfant peuvent perturber, ralentir l'apprentissage de la lecture, mais certainement pas l'empêcher totalement d'apprendre à lire et de ce fait justifier le désintérêt du maître..

Exemple : Une petite fille a eu une tumeur au cerveau. Elle est à priori guérie, mais très fatigable, en retard et très perturbée psychologiquement.

Parfois, elle n'écrit même pas la date, car pas sollicitée. Elle fait acte de présence.

Si un travail adapté à ses besoins n'est pas mis en place, elle ne progressera pas et se découragera. Elle ira, elle aussi, grossir le rang des illettrés.

2. Qu'est ce que la pédagogie différenciée ?

Il ne peut donc y avoir une méthode unique, mais une variété de réponses au moins égale à la variété des attentes, sinon le système est inadapté à de nombreux élèves.

La pédagogie différenciée est la mise en œuvre d'un ensemble diversifié de moyens et de procédures d'enseignement et d'apprentissage afin de permettre à des apprenants d'âges, d'aptitudes, de comportements, de savoir-faire hétérogènes, mais regroupés dans une même division, d'atteindre par des voies différentes, à des rythmes différents, des objectifs communs. Il est néanmoins nécessaire de ne pas faire travailler chaque élève uniquement avec des méthodes qui lui conviennent, car il doit aussi s'approprier d'autres méthodes (ex : visuel et auditif). La pédagogie différenciée est indissociable d'une pédagogie de l'autonomie et d'une approche des méthodes d'apprentissage. Son application est devenue une obligation. Elle est inhérente à la mise en place des cycles.

3. Quelles sont les finalités de la pédagogie différenciée ?

  • Lutter contre l'échec scolaire – Mettre en place une stratégie de réussite.
  • Faire prendre conscience à l'enfant de ses capacités.
  • Développer le désir d'apprendre.
  • Sortir d'une situation d'échec installée.
  • Améliorer les rapports entre le maître et l'élève.
  • Enrichir les interactions sociales.
  • Apprendre l'autonomie.

4. Conditions requises.

  1. Gestion souple de l'emploi du temps.
  2. (Si possible) Travail d'équipe avec RASED, collègues des classes de même niveau ou de niveau voisin, collègue de l'année précédente pour avoir toutes les informations sur l'enfant.

5. Par quoi commencer ?

  • Evaluation – Il est important de faire ''l'état des lieux'' lors de la prise en main d'une classe. Quels sont les enfants en difficultés ? En quelles matières ? (Un élève peut avoir des difficultés en lecture et pas en mathématiques). Comment fonctionnent et dysfonctionnent ces enfants en difficulté ? Quel est leur passé scolaire (difficultés et redoublement éventuel) ? Y a-t-il des prises en charges extérieures (en orthophonie, en psychologie, en psychomotricité, en ergothérapie…) ? Y a-t-il des problèmes de santé ? Le français est-il la langue maternelle de l'enfant ? Y a-t-il un problème social ou familial ?
  • Remédiation

6. Quels dispositifs mettre en place ?

  • Aide individualisée. C'est le plus facile. L'enfant n'est pas déconnecté du groupe classe. Il est simplement aidé par l'enseignant lors du passage à l'écrit. Certains enfants ont besoin d'être rassurés, ou de se faire réexpliquer la consigne. Parfois, l'enfant pourra faire la première partie avec l'aide de l'enseignant, sera ainsi ''démarré'' et pourra continuer seul.

 

Exemple
:
passer en priorité voir si les enfants en difficulté ont démarré, sinon, relire la consigne avec eux et faire le premier exercice ensemble.

 

Astuce de gestion : mettre les enfants en difficulté vers l'avant, afin qu'ils soient plus accessibles. Les regrouper par deux ou trois, si possible (ne pas mettre des enfants turbulents côte à côte), ce qui permet de réexpliquer à trois enfants d'un coup.

 

 

Danger : Ne pas oublier les autres.

 

 

 

 

 

 

  • Un même objectif avec différents niveaux de difficulté.

 

Exemple : en lecture, il peut y avoir sur un sujet donné, un texte pour la majorité des élèves, puis un texte allégé, sur le même sujet pour les enfants en difficulté.

 

 

A partir d'un même texte découvert et expliqué collectivement, il peut y avoir plusieurs niveaux de difficulté pour les exercices de lecture.

 

 

 

 

  • Un même objectif avec différents processus d'apprentissage.

 

Exemple : production d'écrit en cycle 2.

 

Après lecture d'un conte par les élèves ou par l'enseignant, les élèves doivent remettre en ordre différentes parties du résumé.

 

 

Pour les élèves en difficulté, on pourra d'abord leur faire mettre en ordre les images se rapportant à ces différentes parties. Ensuite ils pourront plus facilement associer les parties de texte s'y rapportant.

 

 

 

 

 

 

  • Des objectifs différents avec des contenus différents.

 

Lorsqu'un enfant n'est pas apte à suivre l'enseignement donné au groupe classe, il lui faut un travail individualisé. S'il y a plusieurs enfants dans le même cas, l'enseignant peut créer un groupe de besoin. Si les besoins de l'enfant ne sont pas pris en compte, il cessera de progresser et se dégoûtera de l'école. Un redoublement ne lui sera pas plus profitable s'il n'a pas d'acquisitions.

 

 

Exemples : Lucas avait peu d'acquisitions en lecture au début de son CE1 et très peu en mathématiques. Il a été ''décroché du groupe classe''
pour la lecture
et a progressé en travail individualisé niveau CP. Il a commencé le programme de CE1 au troisième trimestre et surtout, a repris confiance en lui après un CP en échec.

 

 

 

 

 

Différents modes de pensée.
Certains pédagogues pensent qu'il ne faut pas décrocher un enfant du groupe classe, sinon il se sentira différent et rabaissé.

 

 

Moi, je pense le contraire. Il est difficile de vivre un échec scolaire. Les copains savent très bien que l'enfant n'arrive pas comme les autres et son intégration dans le groupe en pâtit. Il a une mauvaise image de lui même qui peut aller jusqu'à la dépression nerveuse et des idées suicidaires.

 

 

Lorsque l'enfant progresse à SA vitesse, il est en situation de réussite. Ses copains savent bien qu'il a un travail différent, mais ils entendent l'enseignant le féliciter. L'enfant est conforté dans le fait qu'il SAIT FAIRE. Il reprend confiance en lui.

 

 

 

 

 

Tout dépend comment l'enseignant présente le travail individualisé au groupe classe. S'il valorise l'enfant, tout ira bien. Avec un peu d'humour, tout passe. Je prends l'exemple du lièvre et de la tortue. La tortue est la plus lente, mais c'est elle qui a gagné la course.

 

 

L'enfant n'est ''décroché'' du groupe classe que pour l'apprentissage de la lecture et participe avec les autres à toutes les activités de découverte du monde.

 

 

 

 

  • Des structures différentes. Répartition en groupes de niveau.

 

J'ai vu dans une classe de CM2, un enseignant, devenu maintenant conseiller pédagogique, faire trois groupes de niveau dans sa classe, pour, disait-il, ''se simplifier la vie'' … ! Chaque élève fonctionnait à son niveau et tout tournait bien.

 

 

 

 

Une expérience de pédagogie différenciée menée en lecture en CE2

Avec ma collègue de CE2, nous avions mis en place une situation de remédiation à la suite d'une évaluation diagnostique en lecture mettant en évidence une hétérogénéité difficile à gérer seules. Nous avons décidé de mettre en place un décloisonnement sur les deux classes avec quatre groupes de besoins plus un enfant en travail individualisé, répartis de la façon suivante :

1. Le groupe adaptation comprenant les non-lecteurs, était pris en charge par la maîtresse d'adaptation deux fois par semaine (RASED) et par moi-même deux fois par semaine pour installer le code et le sens de la lecture.

2. Le groupe remédiation n'ayant pas terminé les apprentissages de la lecture, était pris deux fois par semaine par moi-même pour travailler selon des besoins précis et plus ponctuels.

3. Le groupe de bons lecteurs était pris deux fois par semaine par ma collègue. Il réinvestissait ses connaissances niveau CE2. Il travaillait davantage sur les outils amenant à la compréhension. (ponctuation, ton, orthographe, vocabulaire…)

4. Le groupe des lecteurs rapides était pris deux fois par semaine par ma collègue. Il réinvestissait comme le groupe 3 mais approfondissait et faisait des recherches.

5. Maxence. Après Noël, j'avais dû mettre en place un travail individualisé pour un enfant du groupe adaptation. Grâce à cette pédagogie niveau CP, il a démarré après plus de trois ans d'échec scolaire total, a repris confiance en lui et pouvait espérer être lecteur en fin d'année. Maxence bénéficiait à l'extérieur de l'école d'un suivi par une orthophoniste spécialisée dans les problèmes liés à la dysphasie et par un pédopsychiatre, dans le cadre scolaire d'une pédagogie différenciée individualisée, d'un suivi RASED et d'un travail en équipe. Je me mettais régulièrement en relation avec son orthophoniste.

Des évaluations régulières permettaient les changements de groupe. Ces groupes de besoin n'ont pas été statiques. Ils ont varié en fonction des progrès et des besoins.

Une expérience de pédagogie différenciée menée en lecture en CP.

Profil de la classe : 23 élèves

19 élèves sans difficultés majeures

1 enfant russe non-francophone scolarisé le 15 novembre.

1 enfant en grande difficulté.

2 enfants sachant quasiment lire à Noël.

Fiche de lecture : 3 supports de difficultés différentes

Fiche d'exercices de lecture : 4 supports de difficultés différentes

Différentes étapes de la différenciation en 7 points.

1. Entrée dans le sens par lecture d'images pour tous. Même l'élève non francophone scolarisé depuis 5 semaines a pu participer.

2. Mise en autonomie pour les deux élèves en avance : Lecture et exercices plus compliqués.

3. Mise en activité autonome de l'élève non francophone sur feuille.

4. Découverte du texte au tableau avec le groupe classe et l'élève en difficulté.

5. Exercices de lecture pour le groupe classe.

Exercices de lecture allégés et adaptés pour l'élève en difficulté.

6. Lecture individuelle pour l'élève non-francophone.

Exercices de lecture nécessitant l'aide de l'enseignante.

7. Lecture au tableau par groupe de besoins.

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La
pédagogie différenciée
est positive pour tous types d'enfants et
indispensable
pour gérer les différences.

 

 

 

 

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Aides et pratiques :

· L'affichage, permet à l'enfant de se remémorer ce qu'il a appris. Il peut s'y référer quand il veut. Le maître doit l'y inciter.

· La correction individualisée au fur et à mesure.

Exemples : l'enseignant passe dans les rangs, d'abord pour s'assurer que tous les enfants ont ''démarré'', en allant voir en priorité les enfants en difficulté. Puis il passe et inscrit un petit trait oblique lorsque la réponse est bonne, ou l'opération, ou la phrase , ou le problème…Il souligne ce qui est faux afin que l'enfant corrige. En cas de non compréhension, il peut réexpliquer. (Si de nombreux enfants n'ont pas compris, le maître doit demander de poser les crayons, puis réexpliquer au groupe classe)

Autre possibilité : si l'exercice n'a pas de grosse difficulté, les élèves peuvent apporter leur travail à l'enseignant qui soulignera les erreurs. Chacun pourra alors corriger.

· La manipulation pour les enfants qui ont des difficultés en mathématiques. Pour certains l'abstraction sera tardive. La réussite passe d'abord par la manipulation.

· Les mimes.

Exemple : mimer le verbe d'action –

Le chien saute après la balle. Faire mimer ''saute'' qui exprime l'action.

· Le dialogue peut permettre de comprendre et faire comprendre l'erreur. C'est aussi une présence affective du maître. Expliquer à l'élève qu'on l'aide, pourquoi on fait les choses. Se projeter dans l'activité en se mettant à la place de l'élève.

· Mettre en place des situations dynamisantes. Donner du sens aux apprentissages. Lutter contre l'enseignement de grand-maman avec trois rangs de table, rien au mur et des séries d'exercices sans sens.

Exemple : mettre en place une pédagogie de projet.

BIBLIOGRAPHIE :

Halina PRZESMYCKY – La pédagogie différenciée NATHAN

Philippe MEIRIEU – Des méthodes actives à la pédagogie différenciée ESF éditeur

 

COMMENT GERER LES DIFFERENCES DE RYTHME DE TRAVAIL

 

QUELLES ACTIVITES PEUT-ON PREVOIR ?

La première solution est de prévoir une quantité de travail échelonnée.

Exemple : lors d'une séance de problèmes, si vous prévoyez cinq problèmes de difficulté croissante, vous pouvez n'exiger que trois problèmes pour les plus lents.

Vous pouvez prévoir des activités plus ludiques mais éducatives en fin de travail.

Exemples :

1. Relier des nombres jusqu'aux nombres récemment appris. Puis colorier.

2. Coloriage magique

3. Mots croisés

4. Exercices de lecture plus ludiques : mots ou phrases à illustrer, mots ou phrases à relier au dessin correspondant.

5. Fiche de lecture silencieuse avec questions

6. Travail par contrat pour ceux qui ont besoin de plus.

C'est aussi le moment de l'aide individualisée.

Exemples :

1. Un enfant qui forme mal ses lettres fera de l'écriture (modèles préparés à l'avance)

2. Un enfant qui a du mal à additionner pourra manipuler puis faire des opérations.

3. Un enfant plus rapide pourra aller plus loin dans les apprentissages.

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C'est un leurre de vouloir faire aller tout le monde à la même vitesse. A CHACUN SELON SES BESOINS ET SA VITESSE D'APPRENTISSAGE. C'est bien l'objectif de la mise en place des cycles.

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Modifié par André Jorge


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