tartinette Posté(e) 25 septembre 2010 Posté(e) 25 septembre 2010 Il ne faut pas perdre de vue que l'interdiction des devoirs a été mise en place afin d'éviter de creuser les inégalités. Certains élèves n'ont pas les conditions pour les faire correctement (pas de lieu, des parents illettrés, etc). Beaucoup d'enseignants n'en ont pas forcément conscience car ils réagissent souvent par rapport à leur propre expérience d'élève (pas que pour les devoirs d'ailleurs). Et comme peu d'entre eux proviennent de milieux réellement défavorisés, ils ont souvent une idée fausse de certaines réalités sociales. Pour l'anecdote, j'enseigne en cm2 depuis de longues années et en arrivant dans l'école où je suis actuellement, lorsque j'ai dit que je ne donnais pas de devoirs, certains parents ont poussé des cris d'orfraie. J'ai justifié mon choix et on m'a dit: "Oui mais les inégalités existent de toute façon!" J'ai répondu que ce n'était pas à l'école de les accentuer. L'argument qui consiste à dire que cela les prépare au collège ne tient pas pour moi. Je pense que le développement de l'autonomie les y prépare beaucoup mieux. Je suis issue d'un milieu très défavorisé : je dormais et travaillais donc dans la grande cuisine du studio de 36 M2 parisien où nous vivions à 6 avec mes grands-parents , mes parents et mon frère ... Eh, oui, pas facile la vie d'immigrés dans les années 70. J'ai tout de suite compris (et mes parents aussi) que l'école serait un des seuls moyens de me sortir de cette pauvreté. Après dîner, les 5 autres se serraient dans la salle à manger pour que je puisse faire mes devoirs : je n'avais ni dictionnaire, ni livre, ni rien. Juste le sens de l'effort et l'amour du travail bien fait. Mes parents me faisaient réciter mes leçons auxquelles ils ne comprenaient pas grand-chose mais au moins ils avaient l'impression de participer, ils s'intéressaient à moi...Et cela me donnait le sentiment d'être comme les autres, comme mes copines qui habitaient les immeubles haussmanniens de 120 M2 du bd voltaire .... L'école primaire de mon enfance pouvait être un ascenseur social (les études supérieures moins ...., j'ai dû choisir des études rémunérées ...) : les devoirs d'application ne sont pas discriminants. Ils le sont beaucoup plus au collège quand il s'agit de faire des recherches et des exposés et qu'on a ni livre, (ni internet bien sûr à l'époque) , ni parents pour vous emmener à la bibliothèque (dans les petites classes 6e 5E ...), ni papa pour faire les photocopies au bureau (mon père était ouvrier , ma mère au foyer) ...J'ai eu beaucoup plus de mal après pour faire mes exposés sur ....la vie des grenouilles. Mes élèves devaient apprendre la leçon du jour, la mettre en mémoire longue, apprendre une poésie expliquée , relue plusieurs fois, où des pistes de mémorisation avaient été données (on crée des images mentales ....)., relire une trace écrite en sciences ou en anglais avec le même objectif. Maintenant, ils n'auront plus rien. Les parents, '(éjà prévenus par mes soins sur le site de la classe ) de certains élèves (les "favorisés" ) me l'ont dit : ils chercheront dans le carnet de leçons de maths et de Français, dans les autres cahiers ce qu'il faut revoir ....Ce sont les autres, ceux qui ne sauront pas quoi revoir et sur quoi s'entraîner qui vont en pâtir ...Pour moi, elle est là la discrimination : ne pas donner de leçons et de devoirs très réduits (2 opérations simples au CM1 CM2 une fois par semaine...ça prend 3 minutes mais ça permet de ne pas "perdre" la main sur la technique ). N'oublions que de mon temps on avait 27 H de cours par semaine. On en a plus que 24 ....et tellement plus de choses au programme (les TICE, l'histoire des ARTS, plus de sorties, d'interventions sur la santé et autres, les élections au Conseil Municipal , les tournois de sport et autres "imposés" par la Mairie, les nombreux spectacles "offerts" ...très bien tout cela mais pas avec 24H , des classes hétérogènes , des effectifs chargés et des enfants qui n'ont plus aucun sens de l'effort ...) Ce n'est pas la peur de la hiérarchie qui me fait renoncer (aucun objectif "carrière" pour moi à mon âge). C'est le dégoût : la lâcheté du parent (lettre anonyme, menaces ), l'impression que mon travail et mon investissement n'ont pas été pas reconnus (j'alimentais mon site de classe tous les jours en jeux ludiques et éducatifs, en textes , en liens intéressants, en énigmes, en proverbes ...), l'impression de me battre contre des moulins à vent. L'école d'aujourd'hui est structurellement inégalitaire. Dont acte. Je jette l'éponge.
Invité mufab Posté(e) 25 septembre 2010 Posté(e) 25 septembre 2010 Quant à les préparer au rythme du collège, c'est prendre le problème à l'envers. Ce serait plutôt au collège de se remettre en question et de ne pas assommer les élèves de travail à la maison. Qu'en pense la hiérarchie ? Nos inspecteurs sont-ils tous contre toute forme de devoirs? J'espère que le débat n'est pas clos, car l'argument "devoirs = inégalitaires" ne tient pas.
pseudoval Posté(e) 25 septembre 2010 Posté(e) 25 septembre 2010 on entend quand même des choses aberrantes. je m'imagine très mal ne pas donner des devoirs à mes cm . ils seraient perdus au collège. ils ont des devoirs (leçons, opérations, poésie, chant, recherche parfois) du lundi pour la semaine suivante et tous les jours ! qu'il n'y ait pas un parent qui viennent ronchonner. je saurai le recevoir. quand je vois la quantité demandée au collège, je suis bien étonnée de voir que des inspecteurs peuvent prôner le "ne fais rien à la maison" ! déjà que certains élèves se permettent de dire "j'ai pas envie de faire... j'aime pas !", on va faire de ces enfants des fainéants à force de leur dire d'en faire le moins possible, et puis certains parents devraient peut-être plus s'occuper de leurs enfants.... mais bon, je dis rien.:glare:s J'approuve à 100% ! Ben moi je désapprouve à 80 % ... En anticipant les contraintes du collège,tu ne fais,à mon avis, que déplacer le problème .... Le vrai débat se situe peut-être en terme d' efficacité ou non des devoir ? Cas n°1 :élève en difficulté,sans aide possible à la maison ,n'a pas compris la notion :quel intérêt de passer une heure le soir à répondre au hasard juste pour avoir quelque chose à montrer le lendemain ? cas n°2 élève en difficulté avec aide à la maison ... reprendre la notion en comité restreint le soir l'aidera peut-être ...s'il est encore réceptif après une journée passée à écouter sans comprendre,et que l'aide ne tourne pas à l'affrontement familial,transformant les soirées en mini-drames. Cas n°3 élève lambda ,,sans souci particulier ..une petite remise en mémoire peut lui être utile pour la mémorisation à long terme ou pour gagner en vitesse .. Cas n°4 élève "brillant" (je n'ai pas dit eip ...) les devoirs "basiques" n'offrent guère d'intérêt,même s'ils nele pénalisent pas non plus ... Je chipote,mais ce que j'essaie de dire,c'est que si on veut creuser jusqu'au bout cet argument d'efficacité,alors il faudrait que les devoirs donnés soient différents selon les élèves et leurs besoins ... Il ne faut pas perdre de vue que l'interdiction des devoirs a été mise en place afin d'éviter de creuser les inégalités. Certains élèves n'ont pas les conditions pour les faire correctement (pas de lieu, des parents illettrés, etc). Beaucoup d'enseignants n'en ont pas forcément conscience car ils réagissent souvent par rapport à leur propre expérience d'élève (pas que pour les devoirs d'ailleurs). Et comme peu d'entre eux proviennent de milieux réellement défavorisés, ils ont souvent une idée fausse de certaines réalités sociales. Pour l'anecdote, j'enseigne en cm2 depuis de longues années et en arrivant dans l'école où je suis actuellement, lorsque j'ai dit que je ne donnais pas de devoirs, certains parents ont poussé des cris d'orfraie. J'ai justifié mon choix et on m'a dit: "Oui mais les inégalités existent de toute façon!" J'ai répondu que ce n'était pas à l'école de les accentuer. L'argument qui consiste à dire que cela les prépare au collège ne tient pas pour moi. Je pense que le développement de l'autonomie les y prépare beaucoup mieux. Je suis issue d'un milieu très défavorisé : je dormais et travaillais donc dans la grande cuisine du studio de 36 M2 parisien où nous vivions à 6 avec mes grands-parents , mes parents et mon frère ... Eh, oui, pas facile la vie d'immigrés dans les années 70. J'ai tout de suite compris (et mes parents aussi) que l'école serait un des seuls moyens de me sortir de cette pauvreté. Après dîner, les 5 autres se serraient dans la salle à manger pour que je puisse faire mes devoirs : je n'avais ni dictionnaire, ni livre, ni rien. Juste le sens de l'effort et l'amour du travail bien fait. Mes parents me faisaient réciter mes leçons auxquelles ils ne comprenaient pas grand-chose mais au moins ils avaient l'impression de participer, ils s'intéressaient à moi...Et cela me donnait le sentiment d'être comme les autres, comme mes copines qui habitaient les immeubles haussmanniens de 120 M2 du bd voltaire .... L'école primaire de mon enfance pouvait être un ascenseur social (les études supérieures moins ...., j'ai dû choisir des études rémunérées ...) : les devoirs d'application ne sont pas discriminants. Ils le sont beaucoup plus au collège quand il s'agit de faire des recherches et des exposés et qu'on a ni livre, (ni internet bien sûr à l'époque) , ni parents pour vous emmener à la bibliothèque (dans les petites classes 6e 5E ...), ni papa pour faire les photocopies au bureau (mon père était ouvrier , ma mère au foyer) ...J'ai eu beaucoup plus de mal après pour faire mes exposés sur ....la vie des grenouilles. Mes élèves devaient apprendre la leçon du jour, la mettre en mémoire longue, apprendre une poésie expliquée , relue plusieurs fois, où des pistes de mémorisation avaient été données (on crée des images mentales ....)., relire une trace écrite en sciences ou en anglais avec le même objectif. Maintenant, ils n'auront plus rien. Les parents, '(éjà prévenus par mes soins sur le site de la classe ) de certains élèves (les "favorisés" ) me l'ont dit : ils chercheront dans le carnet de leçons de maths et de Français, dans les autres cahiers ce qu'il faut revoir ....Ce sont les autres, ceux qui ne sauront pas quoi revoir et sur quoi s'entraîner qui vont en pâtir ...Pour moi, elle est là la discrimination : ne pas donner de leçons et de devoirs très réduits (2 opérations simples au CM1 CM2 une fois par semaine...ça prend 3 minutes mais ça permet de ne pas "perdre" la main sur la technique ). N'oublions que de mon temps on avait 27 H de cours par semaine. On en a plus que 24 ....et tellement plus de choses au programme (les TICE, l'histoire des ARTS, plus de sorties, d'interventions sur la santé et autres, les élections au Conseil Municipal , les tournois de sport et autres "imposés" par la Mairie, les nombreux spectacles "offerts" ...très bien tout cela mais pas avec 24H , des classes hétérogènes , des effectifs chargés et des enfants qui n'ont plus aucun sens de l'effort ...) Ce n'est pas la peur de la hiérarchie qui me fait renoncer (aucun objectif "caritère" pour moi à mon âge). C'est le dégoût : la lâcheté du parent (lettre anonyme, menaces ), l'impression que mon travail et mon investissement n'ont pas été pas reconnus (j'alimentais mon site de classe tous les jours en jeux ludiques et éducatifs, en textes , en liens intéressants, en énigmes, en proverbes ...), l'impression de me battre contre des moulins à vent. L'école d'aujourd'hui est structurellement inégalitaire. Dont acte. Je jette l'éponge. Bien que je fasse partie de celles qui sont plutôt "opposées" aux devoirs excessifs ,je trouve que ,si tu es convaincue du bien-fondé de ce que tu fais,il est dommage de jeter l'éponge pour un parent ,et d'en faire porter les conséquences à tous les élèves ...même si je comprends bien ta sensation de ras-le-bol .
lilibigoudi Posté(e) 25 septembre 2010 Posté(e) 25 septembre 2010 Il ne faut pas perdre de vue que l'interdiction des devoirs a été mise en place afin d'éviter de creuser les inégalités. Certains élèves n'ont pas les conditions pour les faire correctement (pas de lieu, des parents illettrés, etc). Beaucoup d'enseignants n'en ont pas forcément conscience car ils réagissent souvent par rapport à leur propre expérience d'élève (pas que pour les devoirs d'ailleurs). Et comme peu d'entre eux proviennent de milieux réellement défavorisés, ils ont souvent une idée fausse de certaines réalités sociales. Bon moi j'en ai assez que l'on nous resserve régulièrement cet argument plein de faux bon sentiments... Alors que c'est tout le contraire : si on habitue pas les enfants (même ceux qui ne bénéficient pas des conditions idéales) à travailler chez eux -de façon raisonnable j'entends- (ou par le biais d'une association d'aide aux devoirs, ça existe encore un peu !), c'est comme ça qu'on reproduit les inégalités ! On les condamne à se perdre au collège, quand ils auront 1 h de transport et des devoirs dans toutes les matières à se taper le soir. Au lieu de râbacher "pas de devoirs", peut-être faudrait-il mettre en place des heures d'aide rémunérée, comme ça s'est fait parfois. Mais là ça coûte des sous... Encore une intervention que j'approuve, je me sentais un peu comme une vilaine sorcière sur un autre post, les arguments devenaient infondés et agressifs je n'ai donc pas donné suite. Je pense tout comme toi qu'il faut habituer les élèves à poursuivre le travail commencé en classe pour permettre d'assimiler les connaissances à la maison par le biais de l'apprentissage de leçons, de lectures et de devoirs écrits (ouh la vilaine!! ). Cet apprentissage les rend de plus en plus autonomes et efficaces dans leur manière d'appréhender le travail scolaire. Je m'en rends compte tous les ans au fil des mois, aussi bien chez les bons élèves que chez les élèves en difficulté. Dans mon école, les enseignants encadrent les études surveillées, ça permet aux élèves de faire les devoirs avec l'accompagnement des adultes qu'ils connaissent.
gihem Posté(e) 25 septembre 2010 Posté(e) 25 septembre 2010 Quant à les préparer au rythme du collège, c'est prendre le problème à l'envers. Ce serait plutôt au collège de se remettre en question et de ne pas assommer les élèves de travail à la maison. Qu'en pense la hiérarchie ? Nos inspecteurs sont-ils tous contre toute forme de devoirs? J'espère que le débat n'est pas clos, car l'argument "devoirs = inégalitaires" ne tient pas. Effectivement, les devoirs ne provoquent pas les inégalités mais ils peuvent les accentuer.
Invité mufab Posté(e) 25 septembre 2010 Posté(e) 25 septembre 2010 Cas n°1 :élève en difficulté,sans aide possible à la maison ,n'a pas compris la notion :quel intérêt de passer une heure le soir à répondre au hasard juste pour avoir quelque chose à montrer le lendemain ? à mettre à l'épreuve ses stratégies. L'apprentissage procède par essais et erreurs. On peut alors peut-être l'aider à être plus efficace, et surtout à mieux comprendre ce qui se fait en classe... cas n°2 élève en difficulté avec aide à la maison ... reprendre la notion en comité restreint le soir l'aidera peut-être ...s'il est encore réceptif après une journée passée à écouter sans comprendre,et que l'aide ne tourne pas à l'affrontement familial,transformant les soirées en mini-drames. Là on renvoie les difficultés aux parents . Dans ce cas : structures d'aides institutionnelles à mettre en place. Facile à dire mais faut savoir ce que l'on veut. Cas n°3 élève lambda, sans souci particulier ..une petite remise en mémoire peut lui être utile pour la mémorisation à long terme ou pour gagner en vitesse ..Cas n°4 élève "brillant" (je n'ai pas dit eip ...) les devoirs "basiques" n'offrent guère d'intérêt,même s'ils ne le pénalisent pas non plus ... Là c'est un entraînement à la mémorisation. Plus on pratique, plus ça s'améliore (donc pas de souci quand il y aura pus tard des tartines). De là dire que c'est inutile... alors il faudrait que les devoirs donnés soient différents selon les élèves et leurs besoins ... Là, à force d'individualiser, ça devient réellement inégalitaire. Effectivement, on peut adapter les exigences de quantité en fonction des difficultés reconnues, au cas par cas, en accord avec la famille... Mais avec des précautions, car on réduit du même coup les chances d'éprouver sa mémoire... Bon voilà pour moi. Après c'est sûr que ça se discute et chacun a son avis sur la question en fonction de ses expériences perso d'élèves ou de parents. Mais attention de ne pas généraliser à partir de ses propres expériences de galères parentales (j'ai ça aussi à la maison, franchement y'a des WE où ça me gonfle de me bagarrer pour les devoirs), mais en tant qu'enseignant, je ne peux pas contrôler ce qui se passe chez mes élèves, et je suis certaine qu'il y a aussi plein de choses positives apportées par les "devoirs".
gihem Posté(e) 25 septembre 2010 Posté(e) 25 septembre 2010 Il ne faut pas perdre de vue que l'interdiction des devoirs a été mise en place afin d'éviter de creuser les inégalités. Certains élèves n'ont pas les conditions pour les faire correctement (pas de lieu, des parents illettrés, etc). Beaucoup d'enseignants n'en ont pas forcément conscience car ils réagissent souvent par rapport à leur propre expérience d'élève (pas que pour les devoirs d'ailleurs). Et comme peu d'entre eux proviennent de milieux réellement défavorisés, ils ont souvent une idée fausse de certaines réalités sociales. Pour l'anecdote, j'enseigne en cm2 depuis de longues années et en arrivant dans l'école où je suis actuellement, lorsque j'ai dit que je ne donnais pas de devoirs, certains parents ont poussé des cris d'orfraie. J'ai justifié mon choix et on m'a dit: "Oui mais les inégalités existent de toute façon!" J'ai répondu que ce n'était pas à l'école de les accentuer. L'argument qui consiste à dire que cela les prépare au collège ne tient pas pour moi. Je pense que le développement de l'autonomie les y prépare beaucoup mieux. Je suis issue d'un milieu très défavorisé : je dormais et travaillais donc dans la grande cuisine du studio de 36 M2 parisien où nous vivions à 6 avec mes grands-parents , mes parents et mon frère ... Eh, oui, pas facile la vie d'immigrés dans les années 70. J'ai tout de suite compris (et mes parents aussi) que l'école serait un des seuls moyens de me sortir de cette pauvreté. Après dîner, les 5 autres se serraient dans la salle à manger pour que je puisse faire mes devoirs : je n'avais ni dictionnaire, ni livre, ni rien. Juste le sens de l'effort et l'amour du travail bien fait. Mes parents me faisaient réciter mes leçons auxquelles ils ne comprenaient pas grand-chose mais au moins ils avaient l'impression de participer, ils s'intéressaient à moi...Et cela me donnait le sentiment d'être comme les autres, comme mes copines qui habitaient les immeubles haussmanniens de 120 M2 du bd voltaire .... L'école primaire de mon enfance pouvait être un ascenseur social (les études supérieures moins ...., j'ai dû choisir des études rémunérées ...) : les devoirs d'application ne sont pas discriminants. Ils le sont beaucoup plus au collège quand il s'agit de faire des recherches et des exposés et qu'on a ni livre, (ni internet bien sûr à l'époque) , ni parents pour vous emmener à la bibliothèque (dans les petites classes 6e 5E ...), ni papa pour faire les photocopies au bureau (mon père était ouvrier , ma mère au foyer) ...J'ai eu beaucoup plus de mal après pour faire mes exposés sur ....la vie des grenouilles. Mes élèves devaient apprendre la leçon du jour, la mettre en mémoire longue, apprendre une poésie expliquée , relue plusieurs fois, où des pistes de mémorisation avaient été données (on crée des images mentales ....)., relire une trace écrite en sciences ou en anglais avec le même objectif. Maintenant, ils n'auront plus rien. Les parents, '(éjà prévenus par mes soins sur le site de la classe ) de certains élèves (les "favorisés" ) me l'ont dit : ils chercheront dans le carnet de leçons de maths et de Français, dans les autres cahiers ce qu'il faut revoir ....Ce sont les autres, ceux qui ne sauront pas quoi revoir et sur quoi s'entraîner qui vont en pâtir ...Pour moi, elle est là la discrimination : ne pas donner de leçons et de devoirs très réduits (2 opérations simples au CM1 CM2 une fois par semaine...ça prend 3 minutes mais ça permet de ne pas "perdre" la main sur la technique ). N'oublions que de mon temps on avait 27 H de cours par semaine. On en a plus que 24 ....et tellement plus de choses au programme (les TICE, l'histoire des ARTS, plus de sorties, d'interventions sur la santé et autres, les élections au Conseil Municipal , les tournois de sport et autres "imposés" par la Mairie, les nombreux spectacles "offerts" ...très bien tout cela mais pas avec 24H , des classes hétérogènes , des effectifs chargés et des enfants qui n'ont plus aucun sens de l'effort ...) Ce n'est pas la peur de la hiérarchie qui me fait renoncer (aucun objectif "carrière" pour moi à mon âge). C'est le dégoût : la lâcheté du parent (lettre anonyme, menaces ), l'impression que mon travail et mon investissement n'ont pas été pas reconnus (j'alimentais mon site de classe tous les jours en jeux ludiques et éducatifs, en textes , en liens intéressants, en énigmes, en proverbes ...), l'impression de me battre contre des moulins à vent. L'école d'aujourd'hui est structurellement inégalitaire. Dont acte. Je jette l'éponge. Ton cas est intéressant mais, même si les conditions matérielles n'étaient pas mirobolantes, tes parents étaient attentifs à ton travail scolaire et contribuaient au développement de ton autonomie. Certains élèves n'ont pas les conditions matérielles et en plus n'ont pas de milieu familial structurant. C'est surtout pour ceux-là que je trouve que les devoirs accentuent les inégalités.
Invité mufab Posté(e) 25 septembre 2010 Posté(e) 25 septembre 2010 je me sentais un peu comme une vilaine sorcière sur un autre post Création du club des affreuses sorcières "rétrogrades-et-creuseuses-d'inégalités-mais-qui-s'interrogent-quand-même" ! + une
pseudoval Posté(e) 25 septembre 2010 Posté(e) 25 septembre 2010 Là, à force d'individualiser, ça devient réellement inégalitaire. Effectivement, on peut adapter les exigences de quantité en fonction des difficultés reconnues, au cas par cas, en accord avec la famille... Mais avec des précautions, car on réduit du même coup les chances d'éprouver sa mémoire... Bon voilà pour moi. Après c'est sûr que ça se discute et chacun a son avis sur la question en fonction de ses expériences perso d'élèves ou de parents. Mais attention de ne pas généraliser à partir de ses propres expériences de galères parentales (j'ai ça aussi à la maison, franchement y'a des WE où ça me gonfle de me bagarrer pour les devoirs), mais en tant qu'enseignant, je ne peux pas contrôler ce qui se passe chez mes élèves, et je suis certaine qu'il y a aussi plein de choses positives apportées par les "devoirs". Je ne parlais pas en terme de quantités ..plutôt dans l'idée :celui-ci doit apprendre à mémoriser,celui-là travailler sa vitesse ,un autre la compréhension (encore que je ne vois pas par quel "miracle" un enfant laissé seul devant sa copie comprendra soudain la notion qu' il n'a pas compris en classe,sachant que les bases n'ont pas forcément été comprises non plus
romy Posté(e) 25 septembre 2010 Posté(e) 25 septembre 2010 Il ne faut pas perdre de vue que l'interdiction des devoirs a été mise en place afin d'éviter de creuser les inégalités. Certains élèves n'ont pas les conditions pour les faire correctement (pas de lieu, des parents illettrés, etc). Beaucoup d'enseignants n'en ont pas forcément conscience car ils réagissent souvent par rapport à leur propre expérience d'élève (pas que pour les devoirs d'ailleurs). Et comme peu d'entre eux proviennent de milieux réellement défavorisés, ils ont souvent une idée fausse de certaines réalités sociales. Pour l'anecdote, j'enseigne en cm2 depuis de longues années et en arrivant dans l'école où je suis actuellement, lorsque j'ai dit que je ne donnais pas de devoirs, certains parents ont poussé des cris d'orfraie. J'ai justifié mon choix et on m'a dit: "Oui mais les inégalités existent de toute façon!" J'ai répondu que ce n'était pas à l'école de les accentuer. L'argument qui consiste à dire que cela les prépare au collège ne tient pas pour moi. Je pense que le développement de l'autonomie les y prépare beaucoup mieux. Il ne faut pas perdre de vue que l'interdiction des devoirs a été mise en place afin d'éviter de creuser les inégalités. Certains élèves n'ont pas les conditions pour les faire correctement (pas de lieu, des parents illettrés, etc). Beaucoup d'enseignants n'en ont pas forcément conscience car ils réagissent souvent par rapport à leur propre expérience d'élève (pas que pour les devoirs d'ailleurs). Et comme peu d'entre eux proviennent de milieux réellement défavorisés, ils ont souvent une idée fausse de certaines réalités sociales. Pour l'anecdote, j'enseigne en cm2 depuis de longues années et en arrivant dans l'école où je suis actuellement, lorsque j'ai dit que je ne donnais pas de devoirs, certains parents ont poussé des cris d'orfraie. J'ai justifié mon choix et on m'a dit: "Oui mais les inégalités existent de toute façon!" J'ai répondu que ce n'était pas à l'école de les accentuer. L'argument qui consiste à dire que cela les prépare au collège ne tient pas pour moi. Je pense que le développement de l'autonomie les y prépare beaucoup mieux. Je suis issue d'un milieu très défavorisé : je dormais et travaillais donc dans la grande cuisine du studio de 36 M2 parisien où nous vivions à 6 avec mes grands-parents , mes parents et mon frère ... Eh, oui, pas facile la vie d'immigrés dans les années 70. J'ai tout de suite compris (et mes parents aussi) que l'école serait un des seuls moyens de me sortir de cette pauvreté. Après dîner, les 5 autres se serraient dans la salle à manger pour que je puisse faire mes devoirs : je n'avais ni dictionnaire, ni livre, ni rien. Juste le sens de l'effort et l'amour du travail bien fait. Mes parents me faisaient réciter mes leçons auxquelles ils ne comprenaient pas grand-chose mais au moins ils avaient l'impression de participer, ils s'intéressaient à moi...Et cela me donnait le sentiment d'être comme les autres, comme mes copines qui habitaient les immeubles haussmanniens de 120 M2 du bd voltaire .... L'école primaire de mon enfance pouvait être un ascenseur social (les études supérieures moins ...., j'ai dû choisir des études rémunérées ...) : les devoirs d'application ne sont pas discriminants. Ils le sont beaucoup plus au collège quand il s'agit de faire des recherches et des exposés et qu'on a ni livre, (ni internet bien sûr à l'époque) , ni parents pour vous emmener à la bibliothèque (dans les petites classes 6e 5E ...), ni papa pour faire les photocopies au bureau (mon père était ouvrier , ma mère au foyer) ...J'ai eu beaucoup plus de mal après pour faire mes exposés sur ....la vie des grenouilles. Mes élèves devaient apprendre la leçon du jour, la mettre en mémoire longue, apprendre une poésie expliquée , relue plusieurs fois, où des pistes de mémorisation avaient été données (on crée des images mentales ....)., relire une trace écrite en sciences ou en anglais avec le même objectif. Maintenant, ils n'auront plus rien. Les parents, '(éjà prévenus par mes soins sur le site de la classe ) de certains élèves (les "favorisés" ) me l'ont dit : ils chercheront dans le carnet de leçons de maths et de Français, dans les autres cahiers ce qu'il faut revoir ....Ce sont les autres, ceux qui ne sauront pas quoi revoir et sur quoi s'entraîner qui vont en pâtir ...Pour moi, elle est là la discrimination : ne pas donner de leçons et de devoirs très réduits (2 opérations simples au CM1 CM2 une fois par semaine...ça prend 3 minutes mais ça permet de ne pas "perdre" la main sur la technique ). N'oublions que de mon temps on avait 27 H de cours par semaine. On en a plus que 24 ....et tellement plus de choses au programme (les TICE, l'histoire des ARTS, plus de sorties, d'interventions sur la santé et autres, les élections au Conseil Municipal , les tournois de sport et autres "imposés" par la Mairie, les nombreux spectacles "offerts" ...très bien tout cela mais pas avec 24H , des classes hétérogènes , des effectifs chargés et des enfants qui n'ont plus aucun sens de l'effort ...) Ce n'est pas la peur de la hiérarchie qui me fait renoncer (aucun objectif "carrière" pour moi à mon âge). C'est le dégoût : la lâcheté du parent (lettre anonyme, menaces ), l'impression que mon travail et mon investissement n'ont pas été pas reconnus (j'alimentais mon site de classe tous les jours en jeux ludiques et éducatifs, en textes , en liens intéressants, en énigmes, en proverbes ...), l'impression de me battre contre des moulins à vent. L'école d'aujourd'hui est structurellement inégalitaire. Dont acte. Je jette l'éponge. franchement, j'ai vécu tout type d'élève et je viens moi-même d'une famille modeste. je me suis toujours débrouillée toute seule à l'école et mon statut je ne le dois qu'à mon travail. Je considère les devoirs à la maison comme faisables par l'enfant tout seul sans besoin d'aide extérieur. ce que je donne, on le travaille en classe, les parents sont inutiles normalement le soir. pour les enfants en difficulté ou ceux dont je sais que les parents ne suivent pas, je me débrouille avec eux en classe pour que tout passe. je ne me calque pas sur le collège, mes élèves sortent autonomes, indépendants de ma classe, je pense avoir un fonctionnement qui aide les élèves à se débrouiller au collège avec ou sans aide d'adultes sans pénaliser qui que ce soit. Certes, il y a toujours des élèves qui feront plus mais ce que je demande, tous le peuvent. chacun commence là où il en est et finit là où il le peut. c'est mon but dans l'enseignement pour n'importe lequel de mes élèves. quand j'étais en zep, j'avais des gamins dont tous les profs se fichaient, catalogués bons à rien et mis en clis. j'ai des gamins qui à force de leur donner un peu de rigueur et de travail - goût de l'effort - sont passés dans l'année d'un niveau de ce1 à un niveau de cm2 ! tout ça parce que les années d'avant, on les trimballait comme étant idiots, sans aide à la maison et sans leur donner les billes pour se débrouiller ! eh bien je suis très contente de savoir qu'aujourd'hui ils ont bien réussi la segpa car autonomes et avec la gniak. je ne suis pas pro devoir à tout pris mais je ne suis pas non plus pour ne rien approfondir. mes élèves savent aussi, tout comme les parents, que s'ils ont un problème avec un devoir quel qu'il soit, l'enfant règle ça en classe avec moi.
Pablo Posté(e) 26 septembre 2010 Posté(e) 26 septembre 2010 Il ne faut pas perdre de vue que l'interdiction des devoirs a été mise en place afin d'éviter de creuser les inégalités. Certains élèves n'ont pas les conditions pour les faire correctement (pas de lieu, des parents illettrés, etc). Beaucoup d'enseignants n'en ont pas forcément conscience car ils réagissent souvent par rapport à leur propre expérience d'élève (pas que pour les devoirs d'ailleurs). Et comme peu d'entre eux proviennent de milieux réellement défavorisés, ils ont souvent une idée fausse de certaines réalités sociales. Pour l'anecdote, j'enseigne en cm2 depuis de longues années et en arrivant dans l'école où je suis actuellement, lorsque j'ai dit que je ne donnais pas de devoirs, certains parents ont poussé des cris d'orfraie. J'ai justifié mon choix et on m'a dit: "Oui mais les inégalités existent de toute façon!" J'ai répondu que ce n'était pas à l'école de les accentuer. L'argument qui consiste à dire que cela les prépare au collège ne tient pas pour moi. Je pense que le développement de l'autonomie les y prépare beaucoup mieux. Je suis issue d'un milieu très défavorisé : je dormais et travaillais donc dans la grande cuisine du studio de 36 M2 parisien où nous vivions à 6 avec mes grands-parents , mes parents et mon frère ... Eh, oui, pas facile la vie d'immigrés dans les années 70. J'ai tout de suite compris (et mes parents aussi) que l'école serait un des seuls moyens de me sortir de cette pauvreté. Après dîner, les 5 autres se serraient dans la salle à manger pour que je puisse faire mes devoirs : je n'avais ni dictionnaire, ni livre, ni rien. Juste le sens de l'effort et l'amour du travail bien fait. Mes parents me faisaient réciter mes leçons auxquelles ils ne comprenaient pas grand-chose mais au moins ils avaient l'impression de participer, ils s'intéressaient à moi...Et cela me donnait le sentiment d'être comme les autres, comme mes copines qui habitaient les immeubles haussmanniens de 120 M2 du bd voltaire .... L'école primaire de mon enfance pouvait être un ascenseur social (les études supérieures moins ...., j'ai dû choisir des études rémunérées ...) : les devoirs d'application ne sont pas discriminants. Ils le sont beaucoup plus au collège quand il s'agit de faire des recherches et des exposés et qu'on a ni livre, (ni internet bien sûr à l'époque) , ni parents pour vous emmener à la bibliothèque (dans les petites classes 6e 5E ...), ni papa pour faire les photocopies au bureau (mon père était ouvrier , ma mère au foyer) ...J'ai eu beaucoup plus de mal après pour faire mes exposés sur ....la vie des grenouilles. Mes élèves devaient apprendre la leçon du jour, la mettre en mémoire longue, apprendre une poésie expliquée , relue plusieurs fois, où des pistes de mémorisation avaient été données (on crée des images mentales ....)., relire une trace écrite en sciences ou en anglais avec le même objectif. Maintenant, ils n'auront plus rien. Les parents, '(éjà prévenus par mes soins sur le site de la classe ) de certains élèves (les "favorisés" ) me l'ont dit : ils chercheront dans le carnet de leçons de maths et de Français, dans les autres cahiers ce qu'il faut revoir ....Ce sont les autres, ceux qui ne sauront pas quoi revoir et sur quoi s'entraîner qui vont en pâtir ...Pour moi, elle est là la discrimination : ne pas donner de leçons et de devoirs très réduits (2 opérations simples au CM1 CM2 une fois par semaine...ça prend 3 minutes mais ça permet de ne pas "perdre" la main sur la technique ). N'oublions que de mon temps on avait 27 H de cours par semaine. On en a plus que 24 ....et tellement plus de choses au programme (les TICE, l'histoire des ARTS, plus de sorties, d'interventions sur la santé et autres, les élections au Conseil Municipal , les tournois de sport et autres "imposés" par la Mairie, les nombreux spectacles "offerts" ...très bien tout cela mais pas avec 24H , des classes hétérogènes , des effectifs chargés et des enfants qui n'ont plus aucun sens de l'effort ...) Ce n'est pas la peur de la hiérarchie qui me fait renoncer (aucun objectif "carrière" pour moi à mon âge). C'est le dégoût : la lâcheté du parent (lettre anonyme, menaces ), l'impression que mon travail et mon investissement n'ont pas été pas reconnus (j'alimentais mon site de classe tous les jours en jeux ludiques et éducatifs, en textes , en liens intéressants, en énigmes, en proverbes ...), l'impression de me battre contre des moulins à vent. L'école d'aujourd'hui est structurellement inégalitaire. Dont acte. Je jette l'éponge. Ton cas est intéressant mais, même si les conditions matérielles n'étaient pas mirobolantes, tes parents étaient attentifs à ton travail scolaire et contribuaient au développement de ton autonomie. Certains élèves n'ont pas les conditions matérielles et en plus n'ont pas de milieu familial structurant. C'est surtout pour ceux-là que je trouve que les devoirs accentuent les inégalités. Je pense au contraire que les devoirs créent l'égalité Tous les élèves ont la même chose à faire Si l'enseignant ne donne pas de devoirs, les familles "structurantes" vont en donner (et vive la collection "réussir mon année en..." ), les autres non L'absence de devoir, supposée rendre les élèves égaux devant le travail génère en 2010 des inégalités encore plus criantes .....
Invité mufab Posté(e) 26 septembre 2010 Posté(e) 26 septembre 2010 Si l'enseignant ne donne pas de devoirs, les familles "structurantes" vont en donner (et vive la collection "réussir mon année en..." ), les autres non Tout-à-fait d'accord !!
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