mohiam Posté(e) 2 juillet 2011 Posté(e) 2 juillet 2011 Après une hésitation sans fin, des doutes, des regrets anticipés, le moment est finalement arrivé. J'ai tenu bon, j'ai résisté à l'appel du petit confort quotidien et je suis fière de pouvoir le claironner aujourd'hui: JE NE SUIS PLUS INSTIT ! Décision difficile s'il en est, mais tellement nécessaire ... Pour mon bien être d'abord, car comme je me suis plu à le dire ces derniers temps: rester sur cette voie conduit à l'autoroute pour la dépression. Par honnêteté ensuite: je ne suis pas faite pour ce métier. J'ai adoré l'idée que je me faisais de cette fonction et surtout de moi-même l'occupant. J'ai naïvement cru qu'il suffisait d'être à la place du prof pour en gagner les attributs ... Grossière erreur ! Par conviction, enfin. Parce que je ne veux plus participer à ce démantèlement de la fonction publique, à commencer par la formation des maîtres eux-mêmes. Si peu de préparation et le grand bain dès le mois de novembre ! "Brigade de remplacement" ? Qu'est ce que c'est que cette bête ? Cela signifie une longue nuit d'angoisse puis un appel à 8h à la circonscription à laquelle on a été affecté, pour recevoir l'information tant attendue "oui alors, vous êtes en CM2 à Argenteuil, vous remplacez tel instit pour la journée". On prend ses affaires, ses quelques livres, on essaie d'ignorer la formidable boule au ventre qui nous torture et on part à l'aventure. "Allez, ça ne peut pas être si terrible que je me l'imagine ..." Une expérience sans doute enrichissante pour des enseignants aguerris, mais pour un débutant ? Une classe nouvelle chaque jour, voire chaque demi-journée, des élèves souvent difficiles et plus particulièrement avec la énième remplaçante de l'année (chouette, un prof tout neuf livré en pâture !), parce que leur propre maître fait des allers-retours en maladie. Des enfants dont le sort n'intéresse finalement personne, qui grandissent dans des cités à taille surhumaine et auxquels on livre des profs inexpérimentés. Vive l'institution ! Que penser de cette grande et belle famille qu'est l'éducation nationale ? A mon premier arrêt, suite à une mauvaise expérience lors d'un de ces remplacements, qu'ai-je reçu comme aide de la part de mes formateurs ? Une bonne écoute, certes, mais aucun conseil concret et aucune solution effective. N'ayant pas été identifiée comme "en difficulté réelle", on ne m'a pas attribué un remplacement plus long et qui aurait pu être davantage sécurisant. Donc dès mon retour, nouveaux appels le matin, nouvelles écoles, nouvelles classes, nouvelles difficultés. Jusqu'à ce matin-là, où, assise dans le train, j'ai décidé de reprendre le train en sens inverse. Ma démission a été un processus long et coûteux. La démarche la plus difficile aura sans doute été de faire comprendre à mon entourage pourquoi je n'avais pas ma place dans cette énorme machine broyeuse qu'est l'éducation nationale. Broyeuse de rêves et d'humains. Un poids tel pèse sur les épaules du prof lambda que cela en devient étouffant. Du regard des élèves et des parents qui est sans cesse sur vous fixé, à celui, souvent condescendant, moralisateur et bien-pensant des supérieurs, invisible mais si étouffant qu'on se sent parfois cloué sur place tant l'angoisse devient pressante. Alors quand "Monsieur l'inspecteur" à qui j'ai du écrire une lettre pleine de déférence pour expliquer que non, je n'avais plus envie d'être prof, m'a convoquée pour s'assurer que ma décision était mûrement réfléchie, je n'ai pas cillé. "Si j'avais une fille de votre âge et qu'on lui offrait un poste à vie, je ne la laisserais pas le quitter". Sage homme ! Il était loin d'imaginer, tout formaté qu'il est à force d'années dans la fonction publique, que cet argument qu'il voulait convaincant soit le pire qu'il puisse me soumettre ! Une vie nouvelle et excitante s'offre à moi aujourd'hui, dont j'entends bien profiter ! J'avais choisi la sécurité, j'ai cru pouvoir me réfugier dans l'école de mon enfance, à l'abri du monde cruel. Mais l'école de mon enfance n'existe plus et j'ai grandi. Je cède ma place à d'autres, pour lesquels je suis plus que jamais pleine d'admiration. L'avenir m'attend !
lapinou Posté(e) 2 juillet 2011 Posté(e) 2 juillet 2011 Message poignant, rempli de vérité. Je te souhaite beaucoup de bonheur dans ton nouveau métier.
Lexdra Posté(e) 2 juillet 2011 Posté(e) 2 juillet 2011 J'ai envie de te dire à la fois bravo et bonne nouvelle vie et en même temps je suis triste pour toi et pour l'EN.
Sunday Posté(e) 2 juillet 2011 Posté(e) 2 juillet 2011 Et moi j'admire ceux, qui comme toi, osent démissionner !
doucemania Posté(e) 2 juillet 2011 Posté(e) 2 juillet 2011 Je salue ton courage et je te souhaite bonne route pour la suite ....
savy Posté(e) 2 juillet 2011 Posté(e) 2 juillet 2011 J'en ai la boule au ventre.... dure décision... tu as eu beaucoup de courage...Je suis admirative. Bonne chance dans ta nouvelle vie professionnelle !
laeti5112 Posté(e) 2 juillet 2011 Posté(e) 2 juillet 2011 bravo, c'est un métier riche, épuisant, plein de contradictions, qu'il faut vivre avec bonheur, tu es l'exacte expression de ce que j'ai l'habitude de penser "c'est un métier qu'il faut quitter quand on ne se sent plus à la hauteur", j'en suis convaincue et beaucoup n'osent pas franchir ce pas...bravo pour ton courage...
Elendil91 Posté(e) 2 juillet 2011 Posté(e) 2 juillet 2011 Molham, ton message me car c'est malheureusement criant de vérité, et j'ai moi aussi pensé lors de ma première année de titulaire à démissionner mais j'ai pas osé. Je ne le regrette pas du tout car j'ai eu la chance incroyable d'avoir un poste à titre définitif près de chez moi et dans une école exceptionnelle. Mais quand je vois mes collègues de promo ou des copines edpiennes galérer je me dis que si j'étais à leur place j'aurai fait comme toi depuis longtemps. Bonne chance dans cette nouvelle vie et j'espère que tu trouveras vite ce que tu cherches.
linette72 Posté(e) 2 juillet 2011 Posté(e) 2 juillet 2011 J'ai envie de te dire félicitations!. Comme dit plus haut, pour être prof de nos jours, il faut vraiment y croire et surtout se sentir à sa place...et ce n’est pas l'administration, la hiérarchie ou les formateurs qui facilitent ce ressenti. Bon courage dans ta nouvelle, je te souhaite de trouver un métier épanouissant. Bonne continuation!
Dramstein Posté(e) 2 juillet 2011 Posté(e) 2 juillet 2011 J'adore l'intervention de l'inspecteur... ça en dit long sur sa conscience du terrain! Plein de bonheur pour toi
Idzia Posté(e) 2 juillet 2011 Posté(e) 2 juillet 2011 Bravo pour cette décision très courageuse!!! N'hésite pas à nous faire part de tes projets pour la suite, ils en intéresseront plus d’un, car je peux dire sans me tromper que nous sommes nombreux à nous interroger sur notre place au sein de l’Éducation nationale...
pimouss26 Posté(e) 2 juillet 2011 Posté(e) 2 juillet 2011 bravo et bon courage pour la suite Une remarque :e je suis super étonnée que certains départements (ou académies) aient fait le choix de mettre les PES (ou LC je ne connais pas trop ta situation) sur des postes de remplacements courts. Chez moi les PES sont affectés sur des congés mater ou parentaux : bien sûr que si tu es dans une école difficile tu y restes longtemps mais tu peux essayer d'améliorer les choses de jour en jour. bien évidemment cette formation est pourrie, disons-le, et pourtant nosu sommes nombreux à s'être battus contre mais rien n'y a fait et c'est désolant [quote name=Dramstein' timestamp='1309596371' post='5392178' J'adore l'intervention de l'inspecteur... ça en dit long sur sa conscience du terrain! Plein de bonheur pour toi je dirai plutôt de sa volonté d'ignorer la réalité du terrain Les IA savent très bien que certains PES sont en souffrance (le nôtre diot être content d'ailleurs il y a eu entre 5 et 10 démissions, voilà des postes en moins qui ne se voient pas )
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