vixine Posté(e) 11 mars 2016 Posté(e) 11 mars 2016 Chaque année, j'ai un ou deux élèves qui sont capables de compter leurs doigts et de trouver une fois 9, une fois 10 et une fois 11 sans que cela les perturbe. Et là, je m'arrache bien les cheveux. Cette année, K a même difficulté en sériation : elle est incapable de mettre une série de 4 objets gigognes les uns dans les autres ...
astro52 Posté(e) 11 mars 2016 Posté(e) 11 mars 2016 Et quand on a des élèves qui ne comprennent toujours pas ce qu'ils doivent faire de leurs doigts... Est-ce qu'en amont du calcul, la séparation entre opération et calcul a bien été construite ? Le principe de "comptage des doigts" facilite le "faire sans comprendre", mais il faut regarder aussi si le lien entre ordinalité et cardinalité est construit. Si ça n'est pas le cas, ça aggrave le "faire sans comprendre". J'ai ce soucis avec P (CE2). En début d'année la séparation entre opération et calcul n'était pas acquise. Face un problème, elle se lançait dans des bouts de techniques de comptage sur les doigts (quitte à changer plusieurs fois en cours de route) sans savoir si ce qu'elle faisait correspondait à une addition ou une soustraction, et sans avoir cherché d'abord de quelle opération relevait le problème évidemment. Et comme la notion d'ordre de grandeur ne lui dit rien non plus, elle balançait plusieurs résultats, disparates et improbables, à la suite. Après avoir travaillé ensemble sur les choix opératoires, il y a du mieux, mais parfois ça ressort. L'autre jour on travaillait avec l'album bilingue "Les bons comptes font les bons amis", de façon assez informelle, et donc assez différentes des supports que je prépare d'habitude quand on fait des maths. Quand je lui ai demandé "On va partager 6 abricots entre les 6 enfants, ça leur fera combien d'abricots chacun ?", elle m'a répondu directement sans compter : "ça fera 12 chacun". L'année dernière, j'ai suivi Brissiaud à la lettre. Pourquoi à la lettre ? Il faut observer et adapter au fur et à mesure, jamais faire confiance à une méthode. Cette année, je donne des billes supplémentaires à mes élèves. Ca ressemble à ce que tu décris Astro: on essaie de calculer sur les doigts: par exemple pour calculer les grands doubles, on regroupe les 2 mains complètes et on connait le petit double qui reste à calculer. On les utilise pour les compléments à 10. Pourquoi je ne leur donnerais pas cet outil qu'ils auront toujours sur eux et qui leur servira encore et encore si tant est qu'ils n'aient toujours pas mémorisé les résultats. Et oui, d'autant que ça n'est pas contradictoire : ton approche a l'air intéressante (si j'ai bien saisi), donc elle fait des doigts une étape vers la mémorisation en question ; et pas simplement une béquille. Il faut penser aussi que d'un point de vue neurologique, le cerveau n'est pas relié aux billes qu'on manipule aussi directement qu'il est relié aux doigts - avec l'aire qui permet la représentation mentale du nombre en interconnexion directe. Bref, Picbille or not Picbille l'année prochaine L'important c'est pas Picbille, c'est toi. Les représentations des élèves tiennent davantage à des petits rien qui proviennent de l'enseignant, qu'à ce qu'on peut objectiver à priori en analysant les supports. En début d'apprentissage comme en CP, on peut prendre la même méthode commerciale, changer presque rien, et que tout change.
astro52 Posté(e) 11 mars 2016 Posté(e) 11 mars 2016 Chaque année, j'ai un ou deux élèves qui sont capables de compter leurs doigts et de trouver une fois 9, une fois 10 et une fois 11 sans que cela les perturbe. Et là, je m'arrache bien les cheveux. Je ne suis pas sûr de comprendre. Tu veux dire que pour une même situation qu'ils essaient de résoudre plusieurs fois de suite, ils trouvent plusieurs résultats différents, sans que ça leur pose problèmes d'avoir plusieurs réponses à une même question en maths ? Si c'est bien ça, il faut agir différemment à deux moments différents pour ne plus se mettre dans cette situation avec les prochains : - en maternelle, les activités proposées n'ont pas suffisamment aidé à construire le concept de nombre. Il faut faire moins d'activités de dénombrement & comptine, et plus de petits calculs et "d'histoires de nombres" (sans passer par l'écriture puisqu'on est encore en maternelle). Quitte à aller moins loin en grandeur des nombres. - en CP, clarifier le sens de l'écriture mathématique naissante : * séparation entre opération et calcul matérialisée par l'étape de l'écriture du résultat (tel que dans les points suivants) * l'opération est un choix et non son calcul, l'écriture 5+3 est le résultat d'une addition (c'est à dire le choix de rassembler 5 et 3 parce que ceci a un sens dans la situation considérée) * et donc à ce titre 5+3 est l'écriture d'un (seul) nombre * le calcul n'est qu'une transformation de l'écriture du résultat, sans remettre en question le choix de l'opération effectué lors d'une étape précédente révolue. Cette année, K a même difficulté en sériation : elle est incapable de mettre une série de 4 objets gigognes les uns dans les autres ... Là ça ne relève plus vraiment du ressort de l'instit de CP. C'est à des spécialistes des troubles cognitifs et de la rééducation de s'en charger, sinon on risque d'épuiser l'instit, et de dilapider sans bénéfice son temps précieux dont d'autres élèves tireraient meilleur profit. Ca fait forcément mal au coeur, mais quand on n'y peut pas grand chose, on est plus efficace en se recentrant sur le groupe.
ratatouille Posté(e) 14 mars 2016 Posté(e) 14 mars 2016 La seule solution sensée, c'est donc d'avoir des enseignants mieux formés Oh que oui. Comme j'aimerais une véritable animation pédagogique sur la construction du nombre, plutôt qu'une enième sur la natation au cycle 2...
Car_a_Mel Posté(e) 15 mars 2016 Posté(e) 15 mars 2016 Ah et bien moi j'aimerais bien aussi avoir des anim sur la natation, parce que j'ai vraiment 0 formation là dessus. Toujours sur la laicité ou l'EMC... Bref jamais de champ disciplinaire. Bon, je suis mauvaise langue, j'ai eu un parcours magistère sur le calcul mental l'année dernière, et à la fin on devait dire ce qu'on pensait de nos manuels/fichiers du point de vue du calcul mental et j'ai lu un commentaire d'une collègue qui trouvait que picbille était trop léger en calcul mental. Sinon, j'ai reçu le specimen du nouveau picbille, je ne l'ai pas ouvert car il me semble que rien ne change, il faudrait que je regarde le sommaire pour en être sûre. Mais il y avait une "interview" de Brissiaud qui s'autocongratulait sur le fait que les nouveaux programmes allaient complètement dans le sens de ses choix.
astro52 Posté(e) 16 mars 2016 Posté(e) 16 mars 2016 Il y a 20 heures, mab a dit : Je m'arrache en tout cas les cheveux avec 3-4 élèves en ce moment, que je suis en train de perdre à vue d'oeil : ça ne les chique pas d'écrire qu'il y a 4 paquets de 10 et 2 points isolés quand il y a 3 paquets de 10 et 6 points isolés dessinés, et d'écrire que ça fait 70 points. Et je ne parle pas de l'addition et de la soustraction, je dois tout faire avec eux sinon seuls ils écrivent n'importe quoi. J'en ai entre autres une qui ne "voit" pas la soustraction, elle écrit 10 - 3 = 13 ou 8 - 6 = 14, comme si c'était une addition. Je suis perplexe sur la marche à suivre pour les aider. Retravailler le nombre, oui, mais comment ? Bonjour, Ils sont en CP ? Les 3-4 élèves en question sont plutôt des filles ou des garçons ? Sont-ils "normaux" en lecture ? En fait ce n'est pas une question de nombre (quoique ça n'est sûrement pas glorieux de ce côté là non plus) mais plutôt d'écriture. Je pense que ce sont des élèves qu'on a voulu faire rentrer trop tôt, ou en s'y prenant mal, dans l'écriture mathématique. Par exemple en les abreuvant en maternelle de ces écritures qui sont celles de l'école élémentaire, sans avoir fait un travail en béton en amont sur les concepts (qui aurait éventuellement été de nature à construire une (vraie) avance considérable). La conséquence, c'est que les maths sont devenues la matière par excellence où on peut écrire n'importe quoi même si ça n'a aucun sens. Et outre le fait qu'ils écrivent n'importe quoi, tout ce qu'ils "lisent", écriture comme dessin, leur passe complètement au-dessus. Donc là aussi il serait intéressant de regarder ce qui s'est passé avant. Ici donc, ce qui importe n'est pas tellement le sens qu'on pourrait donner nous-mêmes à une lecture formelle de ce qu'ils écrivent (ou lisent de travers), vu qu'ils n'écrivent/voient pas les concepts que nous lisons, mais qu'ils font juste n'importe quoi. Concernant le fond du problème : C'est plutôt la place de l'écrit dans la matière "maths" qu'il faut questionner dans sa globalité. Pour ça, ces élèves-là ont besoin qu'on mette de côté tout ce qui est "embrayé" à partir de l'écriture ou du dessin, pour revenir au point de départ de l'abstraction : raconter des histoires de nombres. Prenons par exemple l'histoire "Lola a 8 bonbons. Elle en donne 3 à sa copine Julie." Pour garder une mémoire condensée de cette histoire de nombres, on peut créer une étiquette avec d'un côté le résultat final "5 bonbons" et de l'autre côté une version qui permet de mieux conserver l'origine de ce 5 : "8-3 bonbons". Concernant l'élève qui additionne au lieu de soustraire : J'ai pu constater en "réparant" des élèves en grande difficulté en maths qu'ils passent par deux étapes mentales quand ils résolvent un problème. Dans un premier temps, ils disent qu'on "fait tel nombre et tel nombre". Quand ils disent ça, ils ne sont pas en train de proposer l'addition, ils désignent simplement les nombres dont ils ont besoin, et anticipent qu'il faudra calculer (mais sans préjuger de l'opération). Dans un second temps, ils remplacent le mot "et" par l'opération qui convient. Et ensuite seulement ils passent au calcul approprié... Toutefois cette méthode personnelle et spontanée (elle ne correspond pas à ce que je leur ai enseigné avant) n'apparaît qu'à partir du moment où ils construisent la séparation entre opération et calcul. Sans cette reconstruction, la première étape se suffit à elle-même : si il y a des nombres, alors il faut faire un calcul, et calculer c'est faire... ajoutez un truc qui correspond à l'addition. Calculer et additionner sont des synonymes dans leur fonctionnement, par l'effet d'un biais heuristique qui vient du fait qu'on leur a appris l'addition en premier (et que bien souvent elle est restée la seule opération manipulée pendant beaucoup trop longtemps). Il y a probablement trois problèmes imbriqués avec cette élève : * La construction de la séparation entre opération et calcul. * Le statut de l'écrit en maths. * Elle ne sait pas forcément elle-même si la "manière de calculer 10 et 3" qu'elle met en place pour répondre correspond à une addition ou à une soustraction. Elle lit qu'il faut calculer donc elle calcule, et après ça j'imagine même qu'elle est sûre d'avoir bon. Concernant l'histoire des dizaines : Est-ce un problème en maths simplement, ou est-ce que ces élèves-là n'ont pas plus généralement un problème pour rentrer dans "les langages de l'école" ? Ont-ils des problèmes de compréhension des consignes ou des visuels dans les autres matières que les maths ?
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