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Au sujet de la bienveillance


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Il y a 1 heure, André Jorge a dit :

La punition elle-même n'est jamais bienveillante. Elle peut apparaître comme une solution à court terme, avec des effets en apparence positifs, mais sa principale conséquence est d'humilier l'élève et surtout, elle n'apporte aucune solution aux causes des problèmes.

Punition, sanction, conséquence... quelle sémantique appliquer ? Je m'emmêle les pinceaux et utilise les 3 comme des synonymes 🥲

Prenons le cas d'un élève qui provoque verbalement et physiquement un autre élève pour le pousser à la bagarre. Sont-ce des mesures humiliantes pour ce premier élève d'être momentanément écarté du groupe pour la sécurité de chacun, puis de devoir réfléchir par écrit à ses actes (admettons : produire un paragraphe réflexif) avant d'entamer une réparation ? Ou bien se sent-il humilié d'être désapprouvé ? 

Je veux dire par-là, est-ce que le fait qu'il se sente humilié est forcément le signe qu'il vit une humiliation, que c'est injuste et que ce devrait être proscrit ? (et dans ce cas quid des victimes directes et collatérales de ses comportements : est-ce que c'est ok de se faire bolosser quand on vient à l'école ?)

 

il y a une heure, nonau a dit :

L'école, (comme l'hôpital public), a été rendu maltraitante sciemment pour des raisons inavouables pour le moment. 

Seuls les enseignants qui pour la plupart ont encore des valeurs du service public et une morale laïque, émancipatrice, tiennent encore cet édifice à bout de bras. Et c'est leur bienveillance et leur professionnalisme notamment qui participent à maintenir l'édifice. 

Pour moi la question de la bienveillance vu sous l'angle de l'enseignant n'est pas le sujet. 

Le problème c'est la maltraitance dans laquelle nos dirigeants ont plongé tout un système. 

Je suis presque totalement d'accord avec tout ce que tu viens d'écrire, en revanche la bienveillance des enseignants est à géométrie variable, je vais développer.

C'est tabou d'en parler je crois, mais du CM2 le plus corriace jusqu'au plus minidoux des TPS, j'ai été témoins de scènes d'humiliation, de terreur, de punitions injustes et disproportionnées, parfois de "petites" grossièretés lancées à travers le couloir bondé ("Tu me saoules", "tu fais chier tout le monde !", "mais qu'il est c** celui-là !" et j'en passe). Pas de la part d'un cas isolé, pas dans une seule école et même pas toujours dans des cas où l'élève avait fait quelque chose de mal (des moins de 3 ans qui pleurent, et qui se font hurler dessus, pas crier, pas hausser le ton, bien hurler dessus et menacer pour arrêter de pleurer), et c'est sans parler du traitement fait à certaines familles dès lors qu'elles ont du mal à adhérer à l'école (et c'est complexe de travailler avec elles, je galère aussi, ça n'empêche pas de chercher à s'améliorer). Je doute que cela soit de gaieté de coeur que des collègues en arrivent à ce type de paroles et d'actes, et je pense que c'est en grande partie liée aux autres violences au sein desquelles on évolue (institutionnelle et systémique). Cela étant posé, je crois aussi sincèrement que chacun peut, à sa mesure, prendre un temps de recul sur certains événements de sa vie pro et tenter de se mettre à la place de l'autre, de voir comment une même situation aurait pu être gérée autrement, de s'armer d'idées pour une prochaine fois. 

 

C'est pour cela que le topic que j'ai créé est centré sur "agir avec bienveillance en tant que professionnels". J'ai pensé que sur ça au moins, on pouvait agir, et que ça valait le coup d'en discuter. 

 

Si malgré tout il y en a qui pensent toujours que ça ne vaut pas la peine d'en parler, ils en ont bien le droit, personne ne les y oblige. 🏳️

Posté(e)

Honnêtement, je n'ai pas lu tous les messages précédents et un peu en diagonale...

Mais la bienveillance c'est quoi ? Certainement pas un mot revêtant le même sens et les mêmes postures chez les collègues.

On a un/e collègue qui pousse des gueulantes brèves sur des élèves perturbateurs et violents, qui tient des propos fermes et contrôlés, et qui pense être dans la bienveillance à l'égard de sa classe dans sa globalité en cadrant de cette manière. On a un/e collègue qui a une approche d'échange positif avec des élèves perturbateurs et violents, qui les prend à part, ne leur dit jamais "non", a des propos calmes tout en explication et mesure et qui pense être dans la bienveillance à l'égard de ces élèves. 

D'autres vont considérer que l'enseignant/e qui gueule, ce n'est pas professionnel et ce n'est pas bienveillant. D'autres vont penser que l'enseignant/e dans la positivité est dans le laxisme et que ce n'est pas bienveillant. Ceux et celles qui ne sont pas dans la "bienveillance" seraient-ils donc malveillant/e/s ?

On veille à la sécurité (affective, physique...) des élèves, on met en place des situations qui favorisent la vie ensemble, mais je ne pense pas qu'on "bienveille". 

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Posté(e)

J'ai l'impression que le terme "bienveillance" prend toute la place dans ce débat. Il a été plusieurs fois pointé du doigt pour son ambiguité et la difficulté d'en définir clairement les contours dans le cadre scolaire. 

 

Est-ce qu'il existe un autre terme qui ferait davantage consensus et qui permettrait d'aller dans la même direction ?

 

Pour ceux qui arrivent en cours de discussion, voici ce qui a été proposé jusque-là (mais j'en oublie peut-être) :

- la communication non-violente

- la "discipline positive"

- l'ébauche de liste des VEO diffusées par les 1000 premiers jours

- agir sur le choix de la pédagogie

- analyser des situations concrètes

- des questions autour de l'évaluation, notamment le dilemme entre égalité de traitement ou assouplissement pour les plus fragiles.

 

 

Posté(e)

Je trouve vos échanges passionnants mais ne sait pas du tout vers quoi pencher. 

Les règles claires, la "tarification à l'acte" ;) , etc... je suis pour mais l'argument d'Eren Jager est très pertinent; des comportements similaires n'ont pas forcément le même sens.

Un élève qui en frappe un autre pour l'agresser m'inquiète alors que je suis plutôt rassuré qu'un autre sache se défendre.

Quand Nonau parle de la casse de l'école et de la brutalité de la hiérarchie, il a aussi raison.

Alors Blagjacquette, je veux bien te suivre pour m'améliorer, me corriger - j'essaie chaque jour de réfléchir à ce que je pourrais mieux faire - mais il y a des jours avec et des jours sans.

Je mets les jours avec sur le compte de mes élèves, des familles sympas et de la personne que je veux être et les jours sans sur le compte de l'institution, des familles défaillantes, de la fatigue, de l'usure et aussi de moi parfois, je le reconnais bien volontiers. 

Posté(e)

Pour ma part, l'école ne peut pas être bienveillante à ce jour, au-delà des pratiques des enseignants.

On demande à 100% des enfants d'atteindre des résultats conformes à un socle dit de base. 

Cela pose la question de ce rapport à la norme et de tous ceux qui n'y entrent pas pour plein de raisons différentes (compétences individuelles, capital socio-culturel et économique, cadre familial...) mais aussi de la définition de ce socle de base. La question pour moi n'est pas de savoir comment rendre des évaluations bienveillantes (ou pas), mais plutôt de requestionner la place et le rôle de l'école dans la société d'aujourd'hui. Il y a des systèmes scolaires où l'élève n'est formellement évalué que très tardivement (en France, on donne des objectifs à des enfants de 3 ans!).

Il y a pas mal d'élèves pour lesquels l'école a été un calvaire, fait d'expériences humiliantes, et qui se sont libérés une fois adultes que ce soit personnellement ou professionnellement.  Par exemple A l'école, le grand collectif est obligatoire de fait et il y a des dérives organisationnelles qui renforcent ce cadre compliqué pour certains (passage obligatoire aux toilettes, manger avec sa classe au self du collège...). Une fois adulte, on est nécessairement contraint à un minimum de collectivité mais celui qui préfère le petit groupe où l'isolement peut faire le choix de cette vie là. Chacun choisit ses amis. On ne choisit pas ses collègues mais si le cadre professionnel ne nous plaît pas, rien ne nous contraint à rester au même endroit (alors qu'à l'école, on n'a pas vraiment le choix).

Bref, ça n'apporte pas de réponses concrètes sur la gestion du quotidien mais je pense quand même que certaines postures professionnelles peuvent avoir une vraie influence.

Je vous remercie pour cette discussion.

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Posté(e) (modifié)
Il y a 10 heures, BobbyWatson a dit :

Les règles claires, la "tarification à l'acte" ;) , etc... je suis pour mais l'argument d'Eren Jager est très pertinent; des comportements similaires n'ont pas forcément le même sens.

 

Je n'ai pas anticipé le contexte du forum lorsque j'ai évoqué cet outil, en réponse à la question de Melendil. Je pense qu'en posant des questions ouvertes on se comprendra mieux.

Ici la question pourrait-être, quid de la souffrance des élèves (dont on sait que le comportement en est une résultante) ?

Et certains auraient peut-être des idées. Pour ma part, je pourrai répondre qu'on peut faire les deux : appliquer le cadre, et en parallèle ouvrir le dialogue avec l'élève, avec sa famille ou ses éducateurs, lui apporter du soutien (ppre, contrat de comportement, demande rased, équipe éducative ou ess, aménagement de l'emploi du temps au sein de l'école ou carrément de son temps scolaire, etc.). 

Il y a 10 heures, BobbyWatson a dit :

Quand Nonau parle de la casse de l'école et de la brutalité de la hiérarchie, il a aussi raison

On est bien d'accord. Je me répète un peu mais je n'ai pas de prise là-dessus, d'où le topic centré sur l'enseignant.

 

Il y a 10 heures, BobbyWatson a dit :

il y a des jours avec et des jours sans.

Absolument, c'est ok, je pense que c'est universel. Moi aussi j'ai des jours avec beaucoup de patience et des jours où je me sens vite dépassée par les stimulations, où malgré tous mes efforts je vais réagir plus durement que je ne l'aurai voulu. Ma proposition ne vise pas à culpabiliser les collègues mais à se partager des outils qui n'existent pas dans la formation initiale (ni même continue?) et qui pourtant amélioreraient de façon conséquente le bien-être au travail, ainsi que la qualité de la prise en charge des élèves.

 

Pour le moment je dois admettre que je suis un peu déçue, car c'est un sujet qui fait finalement jaillir la souffrance des enseignants qui nécessairement font remonter la sémantique, la politique, toutes les raisons qui les empêchent de s'y pencher. Or, la bienveillance, avant d'être arrachée au dictionnaire par la classe politique, c'est un mot qui désigne selon moi l'essence fondamentale qui entre en jeu dans des relations humaines saines et apaisées, sans même parler d'éducation. Ce larcin social à des fins de médiatisation, si on l'accepte en reconnaissant que le mot "bienveillance" appartient à la politique, nous ampute d'un outil puissant de bien-être personnel, professionnel, éducatif et jusqu'à une échelle sociétale (sans compter les relations internationales entre les peuples, mais là je m'égare). 

 

Modifié par Blagjackette
Posté(e)
il y a 20 minutes, prune2007 a dit :

requestionner la place et le rôle de l'école dans la société d'aujourd'hui.

Merci Prune, effectivement même avec tous les outils, les moyens humains et matériels pour mieux accueillir les enfants, notre modèle d'école reste structurellement une violence pour beaucoup. Ajoutons à cela la quasi interdiction de l'instruction en famille qui met certaines familles face à la scolarité contrainte ou à l'illégalité. 

 

Et comme je n'ai pas de prise là-dessus, à part mon engagement syndical et politique, j'espère pouvoir améliorer ma posture suffisamment pour soulager mes élèves et leurs familles, en attendant mieux.

Posté(e)

Je crois que s'interroger sur la façon de rendre l'école moins violente et chercher des réponses, même sans avoir d'outils miracles, c'est déjà une vraie posture vers le mieux être de tous. Ce qui est terrible, c'est de trouver le fonctionnement actuel normal, de se dire qu'une petite remarque n'a jamais tué personne...

On est tous humain, on ne peut pas demander à un enseignant d'être toujours dans le tout contrôle. Élever la voix de trop de temps en temps, lever les yeux au ciel quand un élève répond (encore) à côté, ça arrive à tout le monde. Je sais avec le recul que j'ai été violente envers certains enfants (pas de façon systématique ni réfléchie, mais justement par ignorance) et avec mes propres enfants, ça arrive encore. 

Le 1er outil, c'est de s'interroger sur le cadre/consignes qu'on donne. Est ce que j'impose ça aux enfants pour une vraie raison (ex : sécurité physique) ou est-ce par habitude, culture, croyance, facilité d'organisation ?

Ex : dans le collège de ma fille, les enfants n'ont plus le droit de rester dans le hall pendant les récréations, peu importe la météo (pas de préau). Ils n'ont pas le droit de s'assoir dans ce même hall quand l'accès leur est autorisé. L'accès aux toilettes est désormais très limité. A ce jour, je n'ai pas de vraies explications sur ces nouvelles interdictions. J'imagine qu'il y a des questions de surveillance. A ma place de parent, j'en conclus qu'on préfère limiter les droits des élèves pour préserver des facilités d'organisation pour les adultes, plutôt que chercher des solutions pour maintenir ces droits (travailler sur les questions de harcèlement plutôt qu'interdire l'accès aux toilettes sous prétexte que les adultes ne peuvent pas surveiller 24/24).

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Posté(e)
Il y a 1 heure, Blagjackette a dit :

Et certains auraient peut-être des idées.

Pourquoi, par exemple, ne pas s'atteler au fait que la souffrance des élèves vient en grande partie de l'école elle-même, puisque nous semblons d'accord sur ce point?

Certes, nous n'avons pas de prise sur les horaires et les programmes. Mais sur tout le reste, nous avons la liberté pédagogique, pleine et entière. C'est de mon point de vue le principal outil pour construire une école bienveillante, c'est-à-dire à mon sens, émancipatrice et responsabilisante.

Les réflexions faites par d'autres à ce sujet existent déjà et sont nombreuses, de Freinet et l'ICEM à Bernard Collot, en passant par Dewey ou Paulo Freire,... 

Nous n'avons certes pas le pouvoir de changer la société dans son ensemble, mais nous avons le pouvoir de créer une société scolaire qui ne fonctionnerait pas nécessairement selon le même modèle que le monde violent et réprimant qui nous est imposé au dehors. Mais ça nous demande de remettre en question nos propres habitudes et certitudes... 

Posté(e)
il y a 30 minutes, Eren Jäger a dit :

nous avons la liberté pédagogique, pleine et entière. C'est de mon point de vue le principal outil pour construire une école bienveillante, c'est-à-dire à mon sens, émancipatrice et responsabilisante.

Et c'est précieux 🙏

 

Pour te répondre :

Il y a 22 heures, Blagjackette a dit :

Pour ceux qui arrivent en cours de discussion, voici ce qui a été proposé jusque-là (mais j'en oublie peut-être) :

- la communication non-violente

- la "discipline positive"

- l'ébauche de liste des VEO diffusées par les 1000 premiers jours

- agir sur le choix de la pédagogie

- analyser des situations concrètes

- des questions autour de l'évaluation, notamment le dilemme entre égalité de traitement ou assouplissement pour les plus fragiles.

 

Le 08/11/2025 à 09:23, Blagjackette a dit :

Cela étant posé, je crois aussi sincèrement que chacun peut, à sa mesure, prendre un temps de recul sur certains événements de sa vie pro et tenter de se mettre à la place de l'autre, de voir comment une même situation aurait pu être gérée autrement, de s'armer d'idées pour une prochaine fois. 

 

C'est pour cela que le topic que j'ai créé est centré sur "agir avec bienveillance en tant que professionnels". J'ai pensé que sur ça au moins, on pouvait agir, et que ça valait le coup d'en discuter. 

 

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