--anonyme-- Posté(e) 30 décembre 2005 Posté(e) 30 décembre 2005 Bonjour! Je suis Directrice depuis trois ans dans une école située dans un quartier "sensible": Ce n'est pas une ZEP, mais beaucoup de chômage, de familles monoparentales, de problèmes sociaux : alcoolisme, violences conjugales... J'avais déjà travaillé dans une école similaire avant de prendre cette Direction, aussi j'avais des pistes pour aborder ce milieu: - accueil des parents - gestion des conflits entre enfants - valorisation de leur culture (magrhrébine, africaine...)par des projets cuisines, artistiques etc... Chaque année, depuis trois ans, mon équipe change : locaux pas très accueillants, public scolaire difficile etc... et chaque année je me retrouve face à la question suivante: Comment impliquer "émotionnellement" de nouveaux collègues dans la vie de l'école, en sachant que les 3/4 n'habitent pas dans la ville mais aux alentours et qu'ils(elles) sont chargés d'enfants en bas âge, avec les contraintes que cela suppose : partir vite le soir, pas trop de disponibilités etc. Comment remettre à jour l'essentiel : pour la majorité des enfants, il y a un manque des compétences de base : alors oui aux projets "porteurs", attention aux projets "continuels" qui passent du théâtre à l'Art Plastique, en passant par les correspondants ? Comment leur apprendre à relativiser : Un enfant qui dit "Merde" n'est pas toujours insolent. Un enfant violent n'est pas toujours de "nature" violente. Qu'a-t-il vu le matin avant de venir à l'école ? Qu'a-t-il entendu ? Tout en ne niant pas une possible sanction, comment faire comprendre à une équipe qu'il y a aussi quelques actes que l'on se doit de ne pas "sanctionner au quart de tour" ? Malgré mon expérience, il m'arrive de me sentir seule, et de penser que je ne sais pas fédérer une équipe pour agir POUR l'école. Il me semble que les parents délégués sont plus proches de moi, des actions sur le terrain, plus propices au vrai dialogue, autre que de savoir quelle est la progression de géométrie ou les différentes sortes de textes. J'attends vos lumières... Suis-je trop idéaliste? Dois-je relativiser et avoir des ambitions plus neutres ? Merci d'avance pour vos réponses et vos témoignages !
FannyS Posté(e) 30 décembre 2005 Posté(e) 30 décembre 2005 Combien y-t-il de classes dans ton école ? Est-ce que ce sont des T1 qui arrivent chaque année ? Personne ne reste ? Pas une bonne ambiance entre enseignants ? Je croyais au contraire que dans les écoles "difficiles" les équipes étaient plus soudées... Moi c'est plutôt le contraire : je suis arrivée l'an dernier dans une école de centre ville avec beaucoup de "traditions", des maîtresses en postes depuis des années (l'une est là depuis 1977, une utre depuis 13 ans...), pas facile non plus de mener des projets qui ne rentrent pas forcément dans la "tradition" de l'école... Mais j'ai de la chance d'avoir une bonne ambiance... Je ne sais pas vraiement ce que je ferais à ta place...
FannyS Posté(e) 30 décembre 2005 Posté(e) 30 décembre 2005 Ben ça alors, je croyais que c'était plutôt le contraire... Dans mon école c'est le contraire, c'est moi la "jeunette" (j'ai l'âge d'être leur fille (sauf une collègue T1 à titre provisoire bouh...). Elles sont très gentilles avec moi, mais ce qui m'a beaucoup étonnée quand je suis arrivée, c'est qu'elles se reposent totalement sur moi alors que ce sont elles qui ont l'expérience (pas la direction, mais quand même). C'est bizarre, même pour des trucs tout bêtes elles me demandent comment faire (remplir un papier pour une sortie...) Elles non plus ne vont pas enlever le sapin de noël ou prendre des petites initiatives... Mais difficile de changer les habitudes à 1 ou 2 ans de la retraite... Pour les jeunes, je pensais qu'elles seraient plus à l'écoute des problèmes humains au contraire. Ma collègue T1 est super pour ça... Mais c'est dur de traîner les projets toute seule. Je pense malgré tout que les gens sont assez individualistes dans l'ensemble et chacun a tendance à s'occuper de ses petits problèmes... C'est ce que je ressens souvent et en effet tant que toi tu n'enlèves pas le sapin de Noël (c'est bien sûr ton boulot de directrice) et bien personne ne le fera... <_<
dada Posté(e) 30 décembre 2005 Posté(e) 30 décembre 2005 (modifié) Directrice depuis trois ans dans un école de ville avec public favorisé, j'ai les mêmes soucis que toi car tous les ans mon équipe change et les collègues sont souvent T1 ... Pour fédérer autour des projets en tout début d'année je montre et j'explique ce qui a été fait les années précédentes et qui relèvent de la tradition de l'école, je décris le public de l'école chez nous les projets tournent autour de l'autonomie , du respect de l'adulte ( ici enfants rois, mais vraiment rois.....) Ensuite je demande aux collègues s'ils ont des projets , des envies qui peuvent renouveler ceux de l'école ça permet qu'ils apportent des éléments de leur expérience (même petite ) et on voit ce qui peut être aménagé par rapport à notre école. Pour le reste j'essaie de déléguer pas mal de choses de façon à ce que chacun se sente utile à la bonne marche de l'école, donc par exemple quand on batit un projet chacun à son role ( dans ton ex il y aurait pu y avoir qq chargé mettre en valeur le bohomme carnaval dans le hall puis de le ranger le moment venu) et je ne fais pas si ce n'est pas une tache que j'ai prise par contre je dis à la personne " avec diplomatie" tu devais faire ...faudrait y penser. Et pour répondre à ta question non tu n'es pas idéaliste, tu as envie que ton école progresse, que les élèves qui la fréquente la trouve accueillante, qu'ils y soient bien et reconnus en tant qu'individu je trouve ça bien Modifié 30 décembre 2005 par dada
JeanLatreck Posté(e) 30 décembre 2005 Posté(e) 30 décembre 2005 <<Comment impliquer "émotionnellement" de nouveaux collègues dans la vie de l'école, en sachant que les 3/4 n'habitent pas dans la ville mais aux alentours et qu'ils(elles) sont chargés d'enfants en bas âge, avec les contraintes que cela suppose : partir vite le soir, pas trop de disponibilités etc.<< L'"implication" ne peut venir que si ces collègues trouvent un "intérêt" à s'impliquer: meilleur fonctionnement de la classe, de l'école. Ce qui veut dire: "ce que je donne va m'être rendu". <<Comment leur apprendre à relativiser : Un enfant qui dit "Merde" n'est pas toujours insolent.<< Il n'est peut-être pas insolent, mais il refuse les règles de vie sociale: et cela ne peut être recevable à l'école. Il ne s'agit pas de relativiser, mais de savoir pour quoi nous, enseignant, nous travaillons. <<Suis-je trop idéaliste? Dois-je relativiser et avoir des ambitions plus neutres ?<< Les "ambitions" ne peuvent être "neutres": ce sont des termes atypiques. L'idéalisme n'a pas non plus sa place à l'école de la République: nous sommes porteurs d'un idéal, mais nous e sommes pas idéalistes.
calinours Posté(e) 31 décembre 2005 Posté(e) 31 décembre 2005 Je travaille dans une école de quartier difficile depuis 12 ans. J'ai vu passer beaucoup de monde, des gens heureusement de passage d'autres qui ne pouvaient pas rester et qu'on regrette, d'autres qui ont choisi (et je les comprends) de ne pas durer car c'est usant... Pas de commentaire à faire ici sur leur engagement professionnelle, ce n'est pas le rôle du directeur ... Je ne suis pas de l'avis de JeanLatrek si s'engager implique un retour... Dans l'environnement qui est le nôtre dans les quartiers difficiles, attendre quelque chose en retour (des parents ou de l'Institution par exemple) n'est pas , à mon avis, le meilleur état d'esprit pour réussir et faire avancer les choses. Je l'ai déjà écrit dans le post "Enseigner en zep", à l'école, il ne faut pas donner plus, il faut donner mieux et sans caution... Mais c'est un avis très personnel. En 2006, Mamounette31, tu feras sûrement comme moi : tu vas relativiser (personne n'exige de nous que nous changions la face du monde) et positiver : "les enfants sont hautains, dédaigneux, coléreux (y'en a qui disent "merde"), envieux, volages, menteurs, intempérants, menteurs... Ils rient et pleurent facilement, ils ont des joies immodérées et des afflictions améres sur de très petits sujets ; ils ne veulent point souffrir le mal et aiment à en faire : ils sont déjà des hommes"(1) et tu ajouteras comme moi que nous les aimons tous... (1) La Bruyère (Les caractères)
lireli Posté(e) 31 décembre 2005 Posté(e) 31 décembre 2005 J'ai grandi dans un quartier populaire, pas banlieue mais presque, le collège que j'ai fréquenté était celui avec le plus d'actes de violence rescencés: pdt 4 je n'ai pas pu aller aux WC pdt la journée (trop peur ) Bref, lorsque je suis allée à la fac et ensuite à l'IUFM j'ai rencontré très très peu de personnes issues du même milieu que moi. La plupart n'avait jamais rencontré la violence dans leur établissement ou dans leur quartier et je me souviens de leur discours ! Tout ça pour dire que ce que vivent les enfants ( certains, pas tous heureusement on peut venir de banlieue et être heureux ) leur est totalement étranger de par leurs histoires personnelles ! Qd je raconte certains trucs mes amis hallucinent, ils n'imaginaient pas tout simplement! Attention je ne dis pas que seuls les enseignants issus de ce milieu peuvent y enseigner , je dis juste que ce n'est pas de l'indifférence de leur part, ils ne connaissent pas les difficultés que peuvent rencontrer ces enfants ( violence, la faim...) On analyse une situation qu'à partir de ce que l'on connait, de nos références culturelles qui sont si éloignées de celles de certaines familles ( pas toutes, il ne faut surtout pas généraliser). C'est peut être pour ça que tu te sens plus proche des parents d'élèves.
JeanLatreck Posté(e) 31 décembre 2005 Posté(e) 31 décembre 2005 Je ne suis pas de l'avis de JeanLatrek si s'engager implique un retour... Dans l'environnement qui est le nôtre dans les quartiers difficiles, attendre quelque chose en retour (des parents ou de l'Institution par exemple) n'est pas , à mon avis, le meilleur état d'esprit pour réussir et faire avancer les choses. Je l'ai déjà écrit dans le post "Enseigner en zep", à l'école, il ne faut pas donner plus, il faut donner mieux et sans caution... Mais c'est un avis très personnel. Je me suis peut-être mal exprimé, mais ce n'est pas de ce type de "retour" dont je parle. Il s'agit de retour au niveau professionnel: si je m'implique dans telle ou telle action, quel bénéfice vais-je en retirer au niveau de ma pratique de classe? Et là, ça peut être très varié: ça peut aller de l'amélioration des résultats des élèves jusqu'à l'amélioration de mes conditions de travail (travail de prép. partagé, ambiance...)... Prenons l'exemple des "projets d'école": dans 80% des écoles, ils ne consistent qu'en une paperasserie de plus à remplir pour le directeur. Je suis persuadé que cette situation est due au fait que les enseignants ne trouvent aucun intérêt à passer du temps sur des choses qui ne vont rien changer dans leur pratique de classe. De même, il ne suffit pas de décréter le "travail en équipe" pour que celui-ci ait lieu, si chaque enseignant estime qu'il n'en a pas besoin dans sa pratique, que cela ne lui apporte rien...
koubz Posté(e) 31 décembre 2005 Posté(e) 31 décembre 2005 Comment impliquer "émotionnellement" de nouveaux collègues dans la vie de l'école Je ne pense pas être impliquer émotionnellement dans une école soit une bonne idée car ensuite, on peut vite courrir à la déprime? Je pense qu'instruire et éduquer les enfants, c'est déjà pas mal
FannyS Posté(e) 31 décembre 2005 Posté(e) 31 décembre 2005 Je pense que trop s'impliquer "émotionnellement" peut éventuellement conduire à la déprime (et encore...), mais je suis persuadée que ne pas s'impliquer ne peut rien améliorer, au contraire... Je ne vois pas personnellement comment ne pas s'impliquer un minimum dans la vie de l'école. Une école, ce n'est pas une usine où on pointe à 8h30 et à 16h30... Il y a des enfants dans l'histoire, pas des machines... Comment ne pas s'impliquer quand on a affaire à des enfants qui ont des tas de problèmes et donc qui nous donnent des tas de problèmes en classe ? Essayer de faire au mieux... Mais seulement "instruire et éduquer", c'est un peu réducteur, non ? Quant à la paperasse... ça n'améliore peut-être pas immédiatement et comme par magie les pratiques de classe, mais ça permet de réfléchir ensemble à des problèmes... Et à plusieurs on peut trouver des solutions qu'on n'avait pas trouvé seul... Voilà, ce n'est que mon avis :P
koubz Posté(e) 31 décembre 2005 Posté(e) 31 décembre 2005 Je pense qu'il faut d'abord régler ses propres problèmes avant de vouloir régler ceux des autres. S'impliquer dans l'école (comme organiser des classes de neige, faire un spectacle...) je suis d'accord. Ensuite, vouloir s'impliquer "émotionnellement" en pensant vouloir gérer et régler les problèmes de tous les enfants, c'est utopiste à mon avis, on est pas tous Victor Novak!! Que chacun reste dans son rôle !! Je pense que l'enseignant doit prendre en compte les problèmes de l'enfant dans ses apprentissages, mais vouloir les régler, mieux vaut laisser cela aux professionnels. Instruire et éduquer n'est à mon avis pas aussi réducteur que tu ne le penses car c'est une grande responsabilité qui nous ai confié. Instruire et éduquer, est un des finalités de l'école quand même !!
calinours Posté(e) 31 décembre 2005 Posté(e) 31 décembre 2005 CITATION(calinours @ 31/12/2005, 09:25) : Je ne suis pas de l'avis de JeanLatrek si s'engager implique un retour... Dans l'environnement qui est le nôtre dans les quartiers difficiles, attendre quelque chose en retour (des parents ou de l'Institution par exemple) n'est pas , à mon avis, le meilleur état d'esprit pour réussir et faire avancer les choses. Je l'ai déjà écrit dans le post "Enseigner en zep", à l'école, il ne faut pas donner plus, il faut donner mieux et sans caution... Mais c'est un avis très personnel. smile.gif Je me suis peut-être mal exprimé, mais ce n'est pas de ce type de "retour" dont je parle. Il s'agit de retour au niveau professionnel: si je m'implique dans telle ou telle action, quel bénéfice vais-je en retirer au niveau de ma pratique de classe? Et là, ça peut être très varié: ça peut aller de l'amélioration des résultats des élèves jusqu'à l'amélioration de mes conditions de travail (travail de prép. partagé, ambiance...)...Prenons l'exemple des "projets d'école": dans 80% des écoles, ils ne consistent qu'en une paperasserie de plus à remplir pour le directeur. Je suis persuadé que cette situation est due au fait que les enseignants ne trouvent aucun intérêt à passer du temps sur des choses qui ne vont rien changer dans leur pratique de classe. De même, il ne suffit pas de décréter le "travail en équipe" pour que celui-ci ait lieu, si chaque enseignant estime qu'il n'en a pas besoin dans sa pratique, que cela ne lui apporte rien... Entendu
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