Yaka... Posté(e) 11 octobre 2006 Posté(e) 11 octobre 2006 Avez-vous des élèves comme les miens? coment faites-vous pour ne pas vous "attacher"?? J'en ai une qui s'accroche à sa chaise pour ne pas aller au tableua, et qui dit à longueur de journée "mme elle vous attend" (c'est ce que je fais quand il y a du bruit, mais elle, elle peut le dire 36 fois à la minute) elle est toute sale, louche, n'a pas de lunettes, me ramène ses cahiers remplis de miettes, de taches de feutres, .... J'en ai un autre qui se prend pour FOREST, il court tout seul en EPS, personne n'arrive à le suivre....en classe, il passe son temps à se lever (mais en progrès, il va se rassseoir quand je lui demande) ; à côté de ça, il est super attachant, et me fait trop mal au coeur; il est toujours seul à la récré, mange son goûter dans son coin, n'entend pas la sonnerie, est toujours le dernier à venir se ranger....passe son temps à ramasser les papiers qui trainent par terre. Il met tout ce qu'il trouve dans son cartable (au début, il venait sans cartable, ce n'était pas plus mal!!) il te regarde toujours avec un grand sourire....il me fait trop trop mal au coeur! J'en ai un autre qui essaie de faire des bisous à toutes les filles, fait pipi par terre, veut toujours bien faire, mais le résultat n'est jamais TOP.... et puis d'autres... Je me dis que c'est des enfants qui n'iront pas loin, et ça me fait trop mal au coeur, j'ai du mal à passer au dessus... En sachant en plus ce qu'il se passe chez eux, ça me rend malade.... Je me rends compte que ça me "bouffe", et me demande comment vous faites pour ne pas trop prendre tout ça à coeur?? pas facile, je trouve
nanouquem Posté(e) 11 octobre 2006 Posté(e) 11 octobre 2006 J'en ai un autre qui essaie de faire des bisous à toutes les filles, fait pipi par terre, veut toujours bien faire, mais le résultat n'est jamais TOP....et puis d'autres... Je me dis que c'est des enfants qui n'iront pas loin, et ça me fait trop mal au coeur, j'ai du mal à passer au dessus... En sachant en plus ce qu'il se passe chez eux, ça me rend malade.... Je me rends compte que ça me "bouffe", et me demande comment vous faites pour ne pas trop prendre tout ça à coeur?? pas facile, je trouve J'essaie de faire dans la mesure du possible de leur différence un atout; essayer de toujours trouver des qualités (au moins une si c'est possible) mais souvent arrivé au collège, ils me foutent tout par terre!!! tout ce que j'ai essayé de mettre en place ou en valeur!!! Et ils finissent comme tant d'autres incompris!
nanouquem Posté(e) 11 octobre 2006 Posté(e) 11 octobre 2006 PS: je ne peux m'empêcher de m'attacher à eux!!!!!!!!
badu Posté(e) 11 octobre 2006 Posté(e) 11 octobre 2006 Yaka mon médecin m'a dit qu'il fallait faire attention dans notre métier au "burn out "ou off je sais plus lol En gros c'est une maladie qui a ces symptomes là: - trop grande empathie pour les autres - dépression - trop grand investissement dans son métier et empiètement dans la vie privée C'est dur de prendre ses distances, surtout quand il s'agit d'enfants. Dis toi que tu fais ce que tu peux et que tu ne peux pas remplacer leurs parents ni faire leur éducation. Tu peux seulement y participer pour qu'à l'école au moins ils se sentent bien. Et ton rôle s'arrête là, heureusement d'ailleurs.
nanoum Posté(e) 11 octobre 2006 Posté(e) 11 octobre 2006 Salut ! connais tu le phénomene de résilience ? C'est boris cyrulnik qui a parlé de cela dans un ouvrage. Ca partait d'un constat : comment des enfants, qui ont vecu des choses terribles, arrivent à avancer dans la vie ? Car il y a eu au moins une personne qui les a aidé, pas forcément concrétement, mais inconsciemment, en servant de modéle, ou parce qu'il a eu un regard positif. C'est à ca que je pense quand je vois ces enfants. Que peut etre ils ressortiront quelque chose de positif de notre rencontre (et avoir une maitresse qui t'aime, ça compte )car ils le sentent dans notre regard, nos gestes, nos paroles et parfois c'est à quelque chose qui pour nous n'est rien. C'est pour ça que pour l'instant je ne prends pas trop les choses à coeur (à voir pour la suite !). On n'imagine pas la force que l'on peut avoir en étant enfant. De toute façon, on ne pourra pas changer le fonctionnement de ce qu'on voit alors... Mais je comprends
petitpoucet Posté(e) 11 octobre 2006 Posté(e) 11 octobre 2006 Bonsoir ! D'accord avec badu, je suis sûre que tu leur apportes beaucoup, des enfants qui se sentent bien en classe et la classe devient pour eux un petit hâvre de paix par rapport à ce qu'ils vivent chez eux. On doit se protéger et ne pas marcher trop à l'affectif (mes trois premières années ont été ainsi et il a fallu que j'apprenne à me protéger, sinon c'est trop dur et en plus on ne les aide plus). J'imagine que pour les psychiatres par exemple, c'est pareil : ils écoutent et aident des gens en grande détresse, mais il leur faut garder un certain recul sinon ils plongent avec leur patient... C'est dur de se dire qu'on ne peut pas changer le monde et voir des petits bouts déjà conditionnés par leur famille, dur de se dire que même l'enfance n'est pas rose pour certains, alors leur donner un peu de gentillesse, un peu de compréhension leur apporte déjà une part de bonheur, si petite soit elle. Bon courage, c'est pas facile d'avoir devant soi tout plein de choses sur lesquelles on n'a pas de prise.
alloelisa Posté(e) 11 octobre 2006 Posté(e) 11 octobre 2006 Je n'ai jamais eu d'élèves comme ça, du moins pas longtemps, un petit de PS me revient en mémoire lors d'un stage mais comme je suis pas restée longtemps... Mais quand je lis ce que tu écris, je comprends ce que tu ressens, je serai pareille... ça me fait mal aussi J'ai un élève de CM2 un peu "spécial" aussi, mais pas aux points que tu décris. Une collègue l'a eu en tant qu'élève quand il était plus jeune dans une autre école, et d'apres ce qu'elle dit , il a bien évolué entre temps, car avant il avait un comportement vraiment très très bizarre et faisait de la peine aussi. Depuis, il a été placé en famille d'accueil car il se passait des trucs pas nets dans sa famille, et malgré son gros retard au niveau scolaire, pour le reste ça passe. Ce que tu as écris me fait penser à une fille que j'ai connu au lycée (!!) que tout le monde rejettait parce qu'elle n'étais pas belle, sale, cheveux rarement lavée, lunettes datant de je ne sais quelle époque, fringues idem et en tres mauvais état, mais pourtant une fille très gentille. ça me faisait tellement de peine de voir les autres s'acharnait sur elle, elle avait pourtant de la réparti et était loin d'etre bête mais rien que de la voir, ça faisait mal au coeur. Et bien j'étais déjà de celle qui prenait sa défense et qui n'avait pas le comportement idiot des autres envers elle, j'ai toujours eu tendance à avoir trop d'empathie... mais bon c'est comme ça...
alinecrpe Posté(e) 11 octobre 2006 Posté(e) 11 octobre 2006 Dans notre école, ce sont les enfants heureux qui sont rares Dans chacune des classes on retrouve les mêmes cas....enfants battus, enfants sans papa parti ou décédé, enfants retirés de leur famille, enfants perdus dans une fraterie de 10 personnes etc.... J'ai une petite élève qui est née à 5 mois et demi de grossesse, des séquelles neurologiques fortes...Elle est plus lente au niveau moteur mais aussi "cérébral"...Je l'aide comme je peux, on se connait car je l'ai déjà eu en stage quand elle était en CP. Je dois dire qu'elle m'aime beaucoup et j'essaye de lui donner ce que je peux dans la mesure du possible, que ce soit une oreille attentive quand elle me raconte sa vie, ou une aide pour noter les leçons ou faire les exercices voire même du rouspétage quand je la vois qui part et qui se déconcentre...L'important c'est qu'ils voient que tu te soucies d'eux, que tu es là dans leur quotidien en essayant d'apporter le plus possible...Après, ça n'est qu'un métier, sur de l'humain certes mais il est essentiel de garder de la distance....J'avoue que quand 2 de mes élèves m'ont dit au détour d'une conversation anodine qu'ils se faisaient frapper à coups de ceinture quand ils avaient une mauvaise note de comportement, j'étais On a peu de moyens, on peut pas faire un signalement pour tous les enfants de l'école....Alors on essaye d'alléger le quotidien...
cocottte Posté(e) 12 octobre 2006 Posté(e) 12 octobre 2006 Je suis comme toi Yaka, j'ai moi aussi tendance à prendre sur moi toute cette douleur... Mais cette année je ne peux pas, j'en ai trop des élèves vraiment très mal... Alors j'essaie de ne pas m'impliquer émotionellement parce que sinon je tiendrais 2 mois... Pour l'instant j'y arrive, mais évidement que je m'attache! Mais ce que dit nanoum est très fort pour moi. J'ai moi même été une gamine malheureuse qui faisait mal au coeur. Et la résilience, oui, je connais, et c'est vrai que ce n'est pas en ayant pitié d'un gamin qu'on l'aide... Dans notre école, on met tout un programme en place qui s'appelle le programme Fortin et qui vise à developper les compétences des enfants. L'objectif est justement de laisser une brèche pour permettre cette résilience pour des gamins qui vivent des choses terribles à la maison. Pour exemple, depuis le début de l'année, nous avons travaillé, sous plein de formes différentes, sur: - qu'est ce qu'une qualité? - en quoi je suis bon? - qu'est ce que j'aime chez les autres? - qu'est ce qu'une sentiment? Nous verrons si ça marche pour certains... Voir ici pour ceux que ça interresse: http://www.crdp-toulouse.fr/cddp-31/vivrensemble/
Elo1974 Posté(e) 12 octobre 2006 Posté(e) 12 octobre 2006 Ma première année de pratique, j'étais plein d'empathie aussi, je rentrais chez moi et parfois je pleurais sur le sort de certains de ces pauvres enfants... Mais vu l'état lamentable dans lequel j'ai fini l'année j'ai passé l'été à réfléchir et à me dire que si je n'apprenais pas à prendre de la distance je ne pourrais pas faire long feu dans le métier. Ce ne sont pas mes enfants. ce n'est pas de ma faute s'ils sont dans cet état là. Je compatis à leur situation, mais stop, je m'interdis d'aller plus loin. Il faut être dans notre métier un peu comme les médecins, savoir se blinder psychologiquement, tous les ans nous verrons des enfants malheureux, battus, voire même violés parfois, si on se lamine on ne tiendra pas le coup et en plus ça n'aide en rien le gamin. Il faut avoir conscience de ce que l'enfant vit, et le rediriger vers les services sociaux adaptés. On ne peut pas porter sur nous toute la misère du monde! Bon courage car je sais que ça n'est pas facile. Mais n'oubliez pas que vous avez une vie privée, que vous avez des enfants vous aussi parfois et que le soir quand vous rentrez il vaut mieux s'occuper aussi de vous et des gens que vous aimez plutôt que de penser à toutes sortes d'horreurs... Ne négligez pas votre bonheur parce qu'il existe des gens malheureux!
Anwamanë Posté(e) 12 octobre 2006 Posté(e) 12 octobre 2006 Yaka mon médecin m'a dit qu'il fallait faire attention dans notre métier au "burn out "ou off je sais plus lol En gros c'est une maladie qui a ces symptomes là: - trop grande empathie pour les autres - dépression - trop grand investissement dans son métier et empiètement dans la vie privée Oui oui c'est le burn out badu. En 1980, un psychanalyste américain, Herbert J. Freudenberger, sortait un livre sur un phénomène d'épuisement professionnel qu'il nomma burn-out. Ceci en référence à un "incendie intérieur" : comme pour un immeuble dans lequel le feu aurait pris, il peut laisser les gens vidés intérieurement mais d'apparence intacts… Désolée pour la digression.
val237 Posté(e) 12 octobre 2006 Posté(e) 12 octobre 2006 Moi l'année passée j'avais une petite fille (CE1) dont le papa s'était suicidé (pendu dans la maison) l'année précédente, le jour de la fête des pères!!!! C'était une petite fille géniale et très intelligente... mais qui restait toujours dans son monde. Elle n'avait aucune amie dans la classe, restait toujours seule aux récréations : trop mature par rapport aux autres? exclue par les autres car elle "n'avait pas de papa", préférant rester seule? je n'ai jamais vraiment su, sans doute un peu des 3. Combien de fois ai-je eu envie de pleurer ou de la prendre dans mes bras... surtout lorsque nous préparions le cadeau fête des pères ou lorsqu'elle me parlait de son papa. Et puis en fin de compte, faut se dire qu'on est la pour les écouter, pour leur donner du courage, mais qu'on ne peut pas porter tout le malheur du monde sur nos épaules. Moi je pense qu'on doit peut être leur accorder un peu plus d'attention qu'aux autres, prendre régulièrement le temps de discuter avec eux entre 4 yeux, pour parler de ce dont ils ont envie de parler, pour leur demander s'ils vont bien, et puis aussi bien informer les enseignants suivants de toutes nos constatations, pour qu'ils puissent prendre la relève dans les meilleures conditions possible. En fin d'année, j'ai aussi demandé à 2 élèves très matures, très "populaires" et très gentilles de prendre un peu cette enfant sous leur aile l'année suivante (en accord avec chacun des parents et en leur expliquant le pourquoi). Je vois que ca fonctionne plutôt bien cette année. Et si on parvient déjà à faire ça, et bien bravo nous moi je dis
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