Invité mufab Posté(e) 29 août 2010 Posté(e) 29 août 2010 Une graine voyageait Une graine voyageait toute seule pour voir le pays. Elle jugeait les hommes et les choses. Un jour elle trouva joli le vallon et agréables quelques cabanes. Elle s'est installée sur l'herbe auprès d'une fontaine, et s'est endormie. Pendant qu'elle rêvait elle est devenue brindille, et la brindille a grandi puis s'est couverte de bourgeons. Les bourgeons ont donné des branches. Tu vois ce chêne puissant : c'est lui, si beau, si majestueux, cette graine. - Oui, mais le chêne ne peut pas voyager. Alain BOSQUET Le chat et l'oiseau de Jacques Prévert Un village écoute désolé Le chant d'un oiseau blessé C'est le seul oiseau du village Et c'est le seul chat du village Qui l'a à moitié dévoré Et l'oiseau cesse de chanter Le chat cesse de ronronner Et de se lécher le museau Et le village fait à l'oiseau De merveilleuses funérailles Et le chat qui est invité Marche derrière le petit cercueil de paille Où l'oiseau mort est allongé Porté par une petite fille Qui n'arrête pas de pleurer Si j'avais su que cela te fasse tant de peine Lui dit le chat Je l'aurai mangé tout entier Et puis je t'aurais raconté Que je l'avais vu s'envoler S'envoler jusqu'au bout du monde Là-bas c'est tellement loin Que jamais on n'en revient Tu aurais eu moins de chagrin Simplement de la tristesse et des regrets Il ne faut jamais faire les choses à moitié.
Charivari Posté(e) 18 septembre 2010 Auteur Posté(e) 18 septembre 2010 Les deux voyageurs Le compère Thomas et son ami Lubin Allaient à pied tous deux à la ville prochaine. Thomas trouve sur son chemin Une bourse de louis pleine ; Il l'empoche aussitôt. Lubin, d'un air content, Lui dit : pour nous la bonne aubaine ! Non, répond Thomas froidement, Pour nous n'est pas bien dit, pour moi c'est différent. Lubin ne souffle plus ; mais, en quittant la plaine, Ils trouvent des voleurs cachés au bois voisin. Thomas tremblant, et non sans cause, Dit : nous sommes perdus ! Non, lui répond Lubin, Nous n'est pas le vrai mot, mais toi , c'est autre chose. Cela dit, il s'échappe à travers les taillis. Immobile de peur, Thomas est bientôt pris, Il tire la bourse et la donne. Qui ne songe qu'à soi quand sa fortune est bonne Dans le malheur n'a point d'amis. Jean-Pierre Claris de FLORIAN
sybilhe Posté(e) 19 septembre 2010 Posté(e) 19 septembre 2010 merci pour ces belles fables qui donnent envie de les lire et de les partager
Charivari Posté(e) 16 octobre 2010 Auteur Posté(e) 16 octobre 2010 Une nouvelle, de Maurice Carême : Fable En arroi de dentelle, La très noble Isabelle Traversait la forêt. Un loup maigre paraît Qui se jette sur elle. - Malheureux, arrêtez ! Lui enjoint Isabelle, Je suis princesse et belle. Les plus grands chevaliers Se courbent à mes pieds. - Vous me contez merveille, Dit le loup ébranlé. Comment, vous ignorez Que le loup affamé N'a jamais eu d'oreilles ? - Que si, vous en avez, Beau sire, et pas vilaines ! Et moi de par la reine, Et Jean de La Fontaine, Je vous fais chevalier. Pauvre loup ! Il la croit ! A la sortie du bois, On le met en quartier. Aimer fille de roi !... Mieux valait la manger. Maurice Carême
Charivari Posté(e) 16 octobre 2010 Auteur Posté(e) 16 octobre 2010 Le jeune Lapin et le Renard Un Lapin, dans cet âge heureux Qui ne connaît soucis ni peine, Folâtrait près de sa garenne. Un ami cependant faisait faute à ses jeux : Point de plaisir complet si l’on est au moins deux. Tout à coup s’offrit à sa vue Un animal d’une espèce inconnue ; C’était maître Renard, qui lui dit : « Mon cousin, Puisqu’un heureux hasard aujourd’hui nous rassemble, Embrassons-nous, jouons ensemble. J’ai toujours aimé le lapin : Le lapin !... oh oui, je le prise Seul plus que tous les animaux, J’en fais serment. J’ai des défauts, Mais ma vertu, c’est la franchise. » Ces mots ont du Lapin décidé le refus. Il s’enfuit au terrier, et là, par sa fenêtre : « Toi franc !... Je le croyais peut-être ; Tu l’as dit, je ne le crois plus. » Une vertu dont on se vante M’est suspecte ; elle m’épouvante. Je vous suis inconnu, vous me tendez les bras ! Grand merci, mais n’approchez pas. Charles-Guillaume Sourdille de la Valette _______________________________________ L’Ane et le Chameau L’Ane avec le Chameau faisait un jour voyage. En bons amis, marchant du même train, Tous deux allaient, dans un pays lointain, Recueillir certain héritage. Un torrent tout à coup s’oppose à leur passage. La largeur du torrent et sa rapidité N’arrêtent pas l’animal haut monté. Son compagnon reste sur le rivage : Il hésitait, en âne sage ; Mais ayant vu son ami traverser, « c’est bon, dit-il, je puis passer, Puisqu’on n’en a que jusqu’au ventre. » Dans le torrent bravement donc il entre : Quelques pas faits, il avait perdu pied. Où chameau passe, âne est noyé. Charles-Guillaume Sourdille de la Valette __________________________________________ La Goutte d’eau Un orage grondait à l’horizon lointain, Lorsqu’une goutte d’eau, s’échappant de la nue, Tombe au sein de la mer et pleure son destin. « Me voilà dans les flots, inutile, inconnue, Ainsi qu’un grain de sable au milieu des déserts. Quand sur faite du vent je roulais dans les airs. Un plus bel avenir s’offrait à ma pensée : J’espérais sur la terre avoir pour oreiller L’aile du papillon ou la fleur nuancée, Ou sur le gazon vert m’asseoir et briller… » Elle pariait encore : une huître, à son passage S’entr’ouve, la reçoit, se referme soudain. Celle qui supportait la vie avec dédain Durcit, se cristallise au fond du coquillage, Devient perle bientôt, et la main du plongeur La délivre de l’onde et de sa prison noire, Et depuis, on l’a vue, éclatante de gloire, Sur la couronne d’or d’un puissant empereur. O toi, vierge sans nom, fille du prolétaire, Qui retrempes ton ûme au creuset du malheur, Un travail incessant fut ton lot sur la terre ; Prends courage ! ici-bas chacun aura son tour : Dans les flots de ce monde, où tu vis solitaire, Comme la goutte d’eau tu seras perle un jour … Pierre Casimir Hippolyte Lachambeaudie _____________________________________________
Charivari Posté(e) 16 octobre 2010 Auteur Posté(e) 16 octobre 2010 Une excellente de Pierre Gamarra, sur la politesse, et l'intérêt de se faire entendre : La Puce et l’Eléphant Une puce minuscule Rencontra sur son chemin Un éléphant majuscule Qui s’en allait prendre un bain. Elle lui dit : « Monsieur, reculez-vous, de grâce ! Ayez donc la bonté de me céder la place. Je m’excuse… On m’attend et ne puis m’arrêter. Accordez-moi, s’il vous plaît, la priorité. » Elle mit dans ses mots tant de délicatesse Que le géant se recula. On peut comprendre après cela L’intérêt de la politesse. Une autre puce, en un autre moment, Se trouva nez à nez avec un mastodonte. L’insecte fort courtoisement Lui demanda passage. Il ne se rendit compte De rien et poursuivit sa route d’un pas lourd En écrasant la pauvre puce Qui succomba sans plus d’astuce. Car cet éléphant était sourd ! Chers petits et chères petites, N’oubliez pas d’être polis. Essayez de savoir aussi Si l’on entend ce que vous dites.
Charivari Posté(e) 16 octobre 2010 Auteur Posté(e) 16 octobre 2010 Le Boeuf qui veut se faire aussi petit que la Grenouille Un boeuf apercevant une alerte grenouille Fut saisi de ravissement. Il la contemple, il s'agenouille : Quels bonds ! Même le firmament Semble être à sa portée ! Le lourdaud se décide A l'imiter. Il marche, il saute, il court, il va dans le torride Après-midi d'été, Comme si mille taons le harcelaient sans cesse. Trempé de sueur, le mufle bas, il demande : « Est-ce Assez ? » Mais la grenouille rit, Et semble s'envoler. Alors, le boeuf est pris D'un courage héroïque : il jeûne, il boude l'herbe Verte, fraîche, superbe. « Suis-je à votre niveau ? – Pas tout à fait encor ! - Ma taille est-elle fine ? – Accentuez votre effort ! » Le balourd se résigne A souffrir pour avoir la ligne. En quelques jours il perd Son port majestueux, sa peau flotte, il a l'air D'une pauvre carcasse. Ses flancs se sont creusés, ses os percent sa peau, Il trépasse Bientôt. Le monde est plein de gens qui ne sont pas plus sages : Les femmes bien en chair envient les fils de fer Et jeûnent pour avoir l'air d'un haricot vert. Les messieurs bedonnant s'agitent sur les plages Comme des garçonnets ; L'épais béton copie la dentelle de pierre ; La pesante voiture envie la montgolfière ; Sur scène on voit se contorsionner L'énorme cantatrice Voulant susurrer, en discrète actrice, Sa terrible clameur. Et l'on peut allonger la liste : Le plus lourd des rimeurs Singe le léger fabuliste. Jacques Charpentreau
Invité mufab Posté(e) 17 octobre 2010 Posté(e) 17 octobre 2010 alors, cette magnifique fable morale, de Françoise Sagan C'est vrai qu'elle est à la fois drôle et moderne ! J'aime beaucoup cette réponse de la jeune bergère au vieux berger.
Charivari Posté(e) 17 octobre 2010 Auteur Posté(e) 17 octobre 2010 Et puis, au début, tu ne voulais pas de pastiches, mais tu en as mis quand même... Souvent femme Chari varie
Charivari Posté(e) 21 août 2017 Auteur Posté(e) 21 août 2017 Un petit up parce que j'ai pris beaucoup de plaisir à relire cette sélection...
rolilii Posté(e) 22 août 2017 Posté(e) 22 août 2017 oh merci merci merci exactement ce que je cherchais, des fables avec une morale, avec mes CM1, j avais l'habitude de faire le moqueur moqué et le laboureur et ses enfants (bon là c'est Jean de la Fontaine) mais comme je vais avoir des CE2, je voulais varier mes fables avec moral, donc me voilà ravie de ce corpus, plus qu'à choisir Tu as du lire dans mes pensées, car j'ai commencé ma recherche toute la soirée d'hier ...
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