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PERBEN 2


Yseult

Messages recommandés

Pour faire suite à ce que je viens de lire à propos d'une fillette de 11 ans oubliée menottée suite à une perquisition au domicile de sa famille

http://forums-enseignants-du-primaire.com/index.php?showtopic...0entry1194728

une fiction :

Vous aimez votre femme et votre femme vous aime. Vous avez eu ensemble

trois enfants que vous adorez : Julie, Julien et Juliette. Julien vient

d'avoir 16 ans. C'est un garçon rieur, heureux de vivre, un peu turbulent

au lycée, mais que les professeurs trouvent sympathique.

Parmi ses nombreux amis, deux sont pour lui comme des frères : Arnaud et Arthur.

Ils forment à eux trois une inséparable bande de joyeux drilles, connue

dans tout le lycée.

Vous ignorez seulement que, le mois dernier, Julien a

connu une grave déconvenue : le professeur de biologie, Monsieur Bubard,

lui a attribué un 2/20 pour " copie trop sale " . Votre fils l'a

ressenti comme une profonde injustice, ainsi qu'Arnaud et Arthur.

Ensemble, après avoir longuement réfléchi, ils ont trouvé le moyen de

venger Julien.

Monsieur Bubard se rend chaque jour au lycée en

bicyclette. Il range son vélo dans un local non fermé mais surveillé

depuis la grille d'entrée par Paul, gardien depuis vingt ans, dont les

siestes sont légendaires.

Une semaine après la fameuse copie, notre trio passe à l'action : Arthur

fait le guet pendant que Julien et Arnaud s'emparent du vélo. Ils

escaladent ensuite la grille pour le cacher dans le jardin de Roselyne

Lajoue, retraitée. L'exploit fait grand bruit. Julien et ses acolytes,

galvanisés, décident de ne pas en rester là, le local regorgeant d'objets

de convoitise : deux jours plus tard, ils réitèrent avec la trottinette

électrique du professeur de mathématique et la bicyclette rose de Madame

le Proviseur. Celle-ci, furieuse, mène alors l'enquête, en toute

discrétion. Ses soupçons se dirigent rapidement vers votre fils et ses

amis. Plainte est déposée pour vol.

Vol en bande organisée, précise la police : la loi Perben II peut

s'appliquer.

Trois jours plus tard, un jeune homme souriant aborde votre

fils à la sortie du lycée. Il lui montre une camionnette spécialement

aménagée et lui propose, en cas de besoin, de transporter gratuitement

tout engin à deux-roues. Julien est étonné. Le jeune homme le rassure,

l'invite à prendre un café et lui offre finalement un téléphone portable :

" appelle-moi ! " .

Cet homme est un policier, habilité par Perben II

nouvel article 706-81 du Code de procédure pénale) à se faire passer pour

complice ou receleur des infractions. Il n'a pas droit d'inciter au délit.

Mais il peut mettre à la disposition des personnes suspectées tous les

moyens dont elles rêvent (juridiques, financiers, transport, hébergement,

télécommunication : nouvel article 706-82).

Votre fils, très excité, appelle de son téléphone tout neuf ses camarades. Le lendemain, décision

est prise de profiter de l'aubaine : on demande au jeune homme de déposer

le butin près du stade de foot, histoire de prolonger le plaisir.

Le lundi suivant, à 18 heures, Julien n'est pas rentré à la maison. Votre femme

s'inquiète, Julie et Juliette le cherchent. 18h30 : le téléphone sonne.

C'est la police.

Julien est au commissariat en garde à vue. Comment ? Qu'a-t-il fait ? Vous

ne dormez pas de la nuit, vous espérez à chaque heure que votre fils va

être relâché, vous voulez comprendre.

Le lendemain, un avocat de permanence vous apprend que Julien va bien, mais il ne peut vous en dire

plus.

Une première journée passe, puis une deuxième nuit. C'est un

cauchemar. On se réveillera.

Mais mercredi matin, l'avocat vous avoue que, depuis la loi Perben II, la garde à vue peut durer 96 heures, même pour les mineurs (nouvel article 706-88 du Code de procédure pénale). Vous

imaginez votre Julien au commissariat pendant quatre jours et quatre nuits,

interrogé le jour et réveillé la nuit.

Mercredi, l'attente devient infernale.

A 20 heures, quatre hommes sonnent à votre porte. Ce sont des

agents EDF qui viennent relever les compteurs. En un clin d'oeil, les

voilà dispersés dans tout l'appartement, l'un d'entre eux restant en votre

compagnie pour vous occuper. Ils repartent cinq minutes plus tard, sans

vous avoir fait signer le moindre bon. Vous êtes étonné, mais vous avez

d'autres préoccupations en ce moment.

Pourtant, ces hommes viennent d'installer chez vous suffisamment de micros et de caméras pour tout

connaître de votre vie de couple et des discussions entre Julie et

Juliette. Ils en ont le droit depuis Perben II (nouvel article 706-97 du

Code de procédure pénal).

De toutes façons, vous étiez déjà sur écoute (nouvel article 706-96).

Les journées de jeudi et de vendredi sont les plus atroces de votre vie. Julie et Juliette ne sortent pas de leurs lits.

L'école appelle, vous lui raccrochez au nez.

Votre femme passe de l'hystérie à l'hébétement.

Vendredi 17h15 : Julien sort enfin de garde à vue mais il est, dans la foulée, déféré devant le juge

d'instruction qui met Julien en examen, les faits étant avérés. Il demande

à son collègue le juge des libertés et de la détention de placer votre fils

en détention provisoire.

Le magistrat accepte : il entend, lui aussi lutter efficacement contre l'insécurité en ville.

Julien est en prison, pour plusieurs mois peut-être. Vos filles

s'enferment dans un profond mutisme.

Mardi, trois heures du matin. Voilà une semaine que vous ne vivez plus. Vous êtes endormi sur le canapé, une bouteille de blanc à la main.

Une sonnerie stridente vous réveille soudain : vous vous traînez jusqu'à la porte d'entrée que vous ouvrez.

Cinq policiers s'engouffrent chez vous. Pendant deux heures, ils retournent

l'appartement, crèvent les coussins, vident les tiroirs. Cette

perquisition en pleine nuit (nouvel article 706-91) a du bon : elle

permet enfin à la famille de se retrouver, vos filles et votre femme

s'étant blotties autour de vous dans le canapé.

C'est ainsi entouré que vous finissez la bouteille de blanc. Le lendemain, décision est prise

d'envoyer Julie et Juliette, pour les protéger, chez leur grand-mère

maternelle. Ce sera mieux pour tout le monde. Votre belle-mère, ravie

d'être utile, vient les chercher chez vous.

Elle se permet une première remarque sur l'état de l'appartement. Vous

réussissez à vous contenir. Elle jacasse ensuite un quart d'heure sur le

problème de la délinquance. Vous sentez que vous allez sortir de vos

gonds. Pour finir, elle vous lance une remarque acerbe sur l'éducation de

Julien. C'en est trop : vous la giflez.

Or vous étiez filmé. Lorsque votre beau-père vient porter plainte, les policiers sont déjà au courant.

A votre tour, vous êtes convoqué au commissariat, placé en garde à vue,

puis mis en examen pour violences sur personne vulnérable. Vous encourez

trois ans d'emprisonnement.

C'est le procureur qui vous convoque à la fin de la garde à vue.

Il est indigné par ce que vous avez fait et ne s'étonne pas que votre fils ait mal tourné. Il vous demande si vous reconnaissez votre culpabilité, une cassette vidéo à la main.

Vous répondez oui.

Il vous propose alors de prononcer lui-même votre condamnation puisque vous

ne contestez pas les faits.

C'est nouveau (Perben II, article 61), mais c'est efficace.

Si vous refusez, vous serez jugé par le tribunal, dans

longtemps et avec les aléas qu'on connaît.

Un avocat, penaud, vous conseille d'accepter.

Le procureur vous condamne à 4 mois d'emprisonnement,

non sans préciser que c'est une peine bien indulgente au vu des faits

odieux que vous avez commis.

Durant le trajet vers la prison, menotté dans

la fourgonnette, vous vous interdisez de penser à votre femme, à Julie, à

Juliette.

Vous vous demandez simplement si vous apercevrez de votre cellule

celle de Julien. Si vous pourrez lui faire coucou.

Et, tout à coup, vous vous souvenez d'un entrefilet dans le journal, en plein hiver 2004, sur

des avocats qui s'inquiétaient de l'entrée en vigueur de la loi Perben II.

Vous n'aviez, à l'époque, pas compris pourquoi.

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Et bien......

Franchement ça fait froid dnas le dos!

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Aucun des aspects de la loi Perben II n'aborde de front la grande criminalité financière. Pire, le « plaider coupable » et l'absence de condamnation en échange de certaines obligations,

comme rembourser les victimes, risque de faciliter l'enterrement d'affaires politiques et financières. [...]

En fait, la loi Perben II n'améliore en rien l'efficacité de la lutte contre la grande criminalité financière au prétexte de ne pas porter atteinte à la libre circulation des produits et des services. Ainsi, les

places offshore et les paradis bancaires, en France et en Europe, ont pour points communs de figurer dans les récents scandales financiers nationaux et internationaux (de Vivendi en passant par Enron).

Ils paralysent les enquêtes des pôles financiers de justice qui ne disposent que de faibles moyens. Comme le dit le magistrat Eric Alt, dans une contribution à un colloque d'Attac au Sénat en 2002, « les

paradis fiscaux sont bien plus que certaines banlieues des zones de non-droit. Mais le temps est encore à la surenchère électoraliste en matière de répression de proximité et à la sous-évaluation d'une

délinquance économique souvent invisible. »

http://www.politis.fr/article842.html

Cilou boubou

Et bien......

Franchement ça fait froid dans le dos!

Ca devient même glacial avec des fachos UMP qui nous ressortent le bon vieux débat qui pue sur la peine de mort.

Et ils ne sont pas près de renoncer. Ca commence par les terroristes, après ce sera les pédophiles...

"Puis ils sont venus me chercher

Et il ne restait plus personne pour protester."

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Pour faire suite à ce que je viens de lire à propos d'une fillette de 11 ans oubliée menottée suite à une perquisition au domicile de sa famille

http://forums-enseignants-du-primaire.com/index.php?showtopic...0entry1194728

une fiction :

Vous aimez votre femme et votre femme vous aime. Vous avez eu ensemble

trois enfants que vous adorez : Julie, Julien et Juliette. Julien vient

d'avoir 16 ans. C'est un garçon rieur, heureux de vivre, un peu turbulent

au lycée, mais que les professeurs trouvent sympathique.

Parmi ses nombreux amis, deux sont pour lui comme des frères : Arnaud et Arthur.

Ils forment à eux trois une inséparable bande de joyeux drilles, connue

dans tout le lycée.

Vous ignorez seulement que, le mois dernier, Julien a

connu une grave déconvenue : le professeur de biologie, Monsieur Bubard,

lui a attribué un 2/20 pour " copie trop sale " . Votre fils l'a

ressenti comme une profonde injustice, ainsi qu'Arnaud et Arthur.

Ensemble, après avoir longuement réfléchi, ils ont trouvé le moyen de

venger Julien.

Monsieur Bubard se rend chaque jour au lycée en

bicyclette. Il range son vélo dans un local non fermé mais surveillé

depuis la grille d'entrée par Paul, gardien depuis vingt ans, dont les

siestes sont légendaires.

Une semaine après la fameuse copie, notre trio passe à l'action : Arthur

fait le guet pendant que Julien et Arnaud s'emparent du vélo. Ils

escaladent ensuite la grille pour le cacher dans le jardin de Roselyne

Lajoue, retraitée. L'exploit fait grand bruit. Julien et ses acolytes,

galvanisés, décident de ne pas en rester là, le local regorgeant d'objets

de convoitise : deux jours plus tard, ils réitèrent avec la trottinette

électrique du professeur de mathématique et la bicyclette rose de Madame

le Proviseur. Celle-ci, furieuse, mène alors l'enquête, en toute

discrétion. Ses soupçons se dirigent rapidement vers votre fils et ses

amis. Plainte est déposée pour vol.

Vol en bande organisée, précise la police : la loi Perben II peut

s'appliquer.

Trois jours plus tard, un jeune homme souriant aborde votre

fils à la sortie du lycée. Il lui montre une camionnette spécialement

aménagée et lui propose, en cas de besoin, de transporter gratuitement

tout engin à deux-roues. Julien est étonné. Le jeune homme le rassure,

l'invite à prendre un café et lui offre finalement un téléphone portable :

" appelle-moi ! " .

Cet homme est un policier, habilité par Perben II

nouvel article 706-81 du Code de procédure pénale) à se faire passer pour

complice ou receleur des infractions. Il n'a pas droit d'inciter au délit.

Mais il peut mettre à la disposition des personnes suspectées tous les

moyens dont elles rêvent (juridiques, financiers, transport, hébergement,

télécommunication : nouvel article 706-82).

Votre fils, très excité, appelle de son téléphone tout neuf ses camarades. Le lendemain, décision

est prise de profiter de l'aubaine : on demande au jeune homme de déposer

le butin près du stade de foot, histoire de prolonger le plaisir.

Le lundi suivant, à 18 heures, Julien n'est pas rentré à la maison. Votre femme

s'inquiète, Julie et Juliette le cherchent. 18h30 : le téléphone sonne.

C'est la police.

Julien est au commissariat en garde à vue. Comment ? Qu'a-t-il fait ? Vous

ne dormez pas de la nuit, vous espérez à chaque heure que votre fils va

être relâché, vous voulez comprendre.

Le lendemain, un avocat de permanence vous apprend que Julien va bien, mais il ne peut vous en dire

plus.

Une première journée passe, puis une deuxième nuit. C'est un

cauchemar. On se réveillera.

Mais mercredi matin, l'avocat vous avoue que, depuis la loi Perben II, la garde à vue peut durer 96 heures, même pour les mineurs (nouvel article 706-88 du Code de procédure pénale). Vous

imaginez votre Julien au commissariat pendant quatre jours et quatre nuits,

interrogé le jour et réveillé la nuit.

Mercredi, l'attente devient infernale.

A 20 heures, quatre hommes sonnent à votre porte. Ce sont des

agents EDF qui viennent relever les compteurs. En un clin d'oeil, les

voilà dispersés dans tout l'appartement, l'un d'entre eux restant en votre

compagnie pour vous occuper. Ils repartent cinq minutes plus tard, sans

vous avoir fait signer le moindre bon. Vous êtes étonné, mais vous avez

d'autres préoccupations en ce moment.

Pourtant, ces hommes viennent d'installer chez vous suffisamment de micros et de caméras pour tout

connaître de votre vie de couple et des discussions entre Julie et

Juliette. Ils en ont le droit depuis Perben II (nouvel article 706-97 du

Code de procédure pénal).

De toutes façons, vous étiez déjà sur écoute (nouvel article 706-96).

Les journées de jeudi et de vendredi sont les plus atroces de votre vie. Julie et Juliette ne sortent pas de leurs lits.

L'école appelle, vous lui raccrochez au nez.

Votre femme passe de l'hystérie à l'hébétement.

Vendredi 17h15 : Julien sort enfin de garde à vue mais il est, dans la foulée, déféré devant le juge

d'instruction qui met Julien en examen, les faits étant avérés. Il demande

à son collègue le juge des libertés et de la détention de placer votre fils

en détention provisoire.

Le magistrat accepte : il entend, lui aussi lutter efficacement contre l'insécurité en ville.

Julien est en prison, pour plusieurs mois peut-être. Vos filles

s'enferment dans un profond mutisme.

Mardi, trois heures du matin. Voilà une semaine que vous ne vivez plus. Vous êtes endormi sur le canapé, une bouteille de blanc à la main.

Une sonnerie stridente vous réveille soudain : vous vous traînez jusqu'à la porte d'entrée que vous ouvrez.

Cinq policiers s'engouffrent chez vous. Pendant deux heures, ils retournent

l'appartement, crèvent les coussins, vident les tiroirs. Cette

perquisition en pleine nuit (nouvel article 706-91) a du bon : elle

permet enfin à la famille de se retrouver, vos filles et votre femme

s'étant blotties autour de vous dans le canapé.

C'est ainsi entouré que vous finissez la bouteille de blanc. Le lendemain, décision est prise

d'envoyer Julie et Juliette, pour les protéger, chez leur grand-mère

maternelle. Ce sera mieux pour tout le monde. Votre belle-mère, ravie

d'être utile, vient les chercher chez vous.

Elle se permet une première remarque sur l'état de l'appartement. Vous

réussissez à vous contenir. Elle jacasse ensuite un quart d'heure sur le

problème de la délinquance. Vous sentez que vous allez sortir de vos

gonds. Pour finir, elle vous lance une remarque acerbe sur l'éducation de

Julien. C'en est trop : vous la giflez.

Or vous étiez filmé. Lorsque votre beau-père vient porter plainte, les policiers sont déjà au courant.

A votre tour, vous êtes convoqué au commissariat, placé en garde à vue,

puis mis en examen pour violences sur personne vulnérable. Vous encourez

trois ans d'emprisonnement.

C'est le procureur qui vous convoque à la fin de la garde à vue.

Il est indigné par ce que vous avez fait et ne s'étonne pas que votre fils ait mal tourné. Il vous demande si vous reconnaissez votre culpabilité, une cassette vidéo à la main.

Vous répondez oui.

Il vous propose alors de prononcer lui-même votre condamnation puisque vous

ne contestez pas les faits.

C'est nouveau (Perben II, article 61), mais c'est efficace.

Si vous refusez, vous serez jugé par le tribunal, dans

longtemps et avec les aléas qu'on connaît.

Un avocat, penaud, vous conseille d'accepter.

Le procureur vous condamne à 4 mois d'emprisonnement,

non sans préciser que c'est une peine bien indulgente au vu des faits

odieux que vous avez commis.

Durant le trajet vers la prison, menotté dans

la fourgonnette, vous vous interdisez de penser à votre femme, à Julie, à

Juliette.

Vous vous demandez simplement si vous apercevrez de votre cellule

celle de Julien. Si vous pourrez lui faire coucou.

Et, tout à coup, vous vous souvenez d'un entrefilet dans le journal, en plein hiver 2004, sur

des avocats qui s'inquiétaient de l'entrée en vigueur de la loi Perben II.

Vous n'aviez, à l'époque, pas compris pourquoi.

Texte écrit par la Conférence du Stage du Barreau de Paris, repris par Libération ;-)

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Pour faire suite à ce que je viens de lire à propos d'une fillette de 11 ans oubliée menottée suite à une perquisition au domicile de sa famille

http://forums-enseignants-du-primaire.com/index.php?showtopic...0entry1194728

une fiction :

Vous aimez votre femme et votre femme vous aime. Vous avez eu ensemble

trois enfants que vous adorez : Julie, Julien et Juliette. Julien vient

d'avoir 16 ans. C'est un garçon rieur, heureux de vivre, un peu turbulent

au lycée, mais que les professeurs trouvent sympathique.

Parmi ses nombreux amis, deux sont pour lui comme des frères : Arnaud et Arthur.

Ils forment à eux trois une inséparable bande de joyeux drilles, connue

dans tout le lycée.

Vous ignorez seulement que, le mois dernier, Julien a

connu une grave déconvenue : le professeur de biologie, Monsieur Bubard,

lui a attribué un 2/20 pour " copie trop sale " . Votre fils l'a

ressenti comme une profonde injustice, ainsi qu'Arnaud et Arthur.

Ensemble, après avoir longuement réfléchi, ils ont trouvé le moyen de

venger Julien.

Monsieur Bubard se rend chaque jour au lycée en

bicyclette. Il range son vélo dans un local non fermé mais surveillé

depuis la grille d'entrée par Paul, gardien depuis vingt ans, dont les

siestes sont légendaires.

Une semaine après la fameuse copie, notre trio passe à l'action : Arthur

fait le guet pendant que Julien et Arnaud s'emparent du vélo. Ils

escaladent ensuite la grille pour le cacher dans le jardin de Roselyne

Lajoue, retraitée. L'exploit fait grand bruit. Julien et ses acolytes,

galvanisés, décident de ne pas en rester là, le local regorgeant d'objets

de convoitise : deux jours plus tard, ils réitèrent avec la trottinette

électrique du professeur de mathématique et la bicyclette rose de Madame

le Proviseur. Celle-ci, furieuse, mène alors l'enquête, en toute

discrétion. Ses soupçons se dirigent rapidement vers votre fils et ses

amis. Plainte est déposée pour vol.

Vol en bande organisée, précise la police : la loi Perben II peut

s'appliquer.

Trois jours plus tard, un jeune homme souriant aborde votre

fils à la sortie du lycée. Il lui montre une camionnette spécialement

aménagée et lui propose, en cas de besoin, de transporter gratuitement

tout engin à deux-roues. Julien est étonné. Le jeune homme le rassure,

l'invite à prendre un café et lui offre finalement un téléphone portable :

" appelle-moi ! " .

Cet homme est un policier, habilité par Perben II

nouvel article 706-81 du Code de procédure pénale) à se faire passer pour

complice ou receleur des infractions. Il n'a pas droit d'inciter au délit.

Mais il peut mettre à la disposition des personnes suspectées tous les

moyens dont elles rêvent (juridiques, financiers, transport, hébergement,

télécommunication : nouvel article 706-82).

Votre fils, très excité, appelle de son téléphone tout neuf ses camarades. Le lendemain, décision

est prise de profiter de l'aubaine : on demande au jeune homme de déposer

le butin près du stade de foot, histoire de prolonger le plaisir.

Le lundi suivant, à 18 heures, Julien n'est pas rentré à la maison. Votre femme

s'inquiète, Julie et Juliette le cherchent. 18h30 : le téléphone sonne.

C'est la police.

Julien est au commissariat en garde à vue. Comment ? Qu'a-t-il fait ? Vous

ne dormez pas de la nuit, vous espérez à chaque heure que votre fils va

être relâché, vous voulez comprendre.

Le lendemain, un avocat de permanence vous apprend que Julien va bien, mais il ne peut vous en dire

plus.

Une première journée passe, puis une deuxième nuit. C'est un

cauchemar. On se réveillera.

Mais mercredi matin, l'avocat vous avoue que, depuis la loi Perben II, la garde à vue peut durer 96 heures, même pour les mineurs (nouvel article 706-88 du Code de procédure pénale). Vous

imaginez votre Julien au commissariat pendant quatre jours et quatre nuits,

interrogé le jour et réveillé la nuit.

Mercredi, l'attente devient infernale.

A 20 heures, quatre hommes sonnent à votre porte. Ce sont des

agents EDF qui viennent relever les compteurs. En un clin d'oeil, les

voilà dispersés dans tout l'appartement, l'un d'entre eux restant en votre

compagnie pour vous occuper. Ils repartent cinq minutes plus tard, sans

vous avoir fait signer le moindre bon. Vous êtes étonné, mais vous avez

d'autres préoccupations en ce moment.

Pourtant, ces hommes viennent d'installer chez vous suffisamment de micros et de caméras pour tout

connaître de votre vie de couple et des discussions entre Julie et

Juliette. Ils en ont le droit depuis Perben II (nouvel article 706-97 du

Code de procédure pénal).

De toutes façons, vous étiez déjà sur écoute (nouvel article 706-96).

Les journées de jeudi et de vendredi sont les plus atroces de votre vie. Julie et Juliette ne sortent pas de leurs lits.

L'école appelle, vous lui raccrochez au nez.

Votre femme passe de l'hystérie à l'hébétement.

Vendredi 17h15 : Julien sort enfin de garde à vue mais il est, dans la foulée, déféré devant le juge

d'instruction qui met Julien en examen, les faits étant avérés. Il demande

à son collègue le juge des libertés et de la détention de placer votre fils

en détention provisoire.

Le magistrat accepte : il entend, lui aussi lutter efficacement contre l'insécurité en ville.

Julien est en prison, pour plusieurs mois peut-être. Vos filles

s'enferment dans un profond mutisme.

Mardi, trois heures du matin. Voilà une semaine que vous ne vivez plus. Vous êtes endormi sur le canapé, une bouteille de blanc à la main.

Une sonnerie stridente vous réveille soudain : vous vous traînez jusqu'à la porte d'entrée que vous ouvrez.

Cinq policiers s'engouffrent chez vous. Pendant deux heures, ils retournent

l'appartement, crèvent les coussins, vident les tiroirs. Cette

perquisition en pleine nuit (nouvel article 706-91) a du bon : elle

permet enfin à la famille de se retrouver, vos filles et votre femme

s'étant blotties autour de vous dans le canapé.

C'est ainsi entouré que vous finissez la bouteille de blanc. Le lendemain, décision est prise

d'envoyer Julie et Juliette, pour les protéger, chez leur grand-mère

maternelle. Ce sera mieux pour tout le monde. Votre belle-mère, ravie

d'être utile, vient les chercher chez vous.

Elle se permet une première remarque sur l'état de l'appartement. Vous

réussissez à vous contenir. Elle jacasse ensuite un quart d'heure sur le

problème de la délinquance. Vous sentez que vous allez sortir de vos

gonds. Pour finir, elle vous lance une remarque acerbe sur l'éducation de

Julien. C'en est trop : vous la giflez.

Or vous étiez filmé. Lorsque votre beau-père vient porter plainte, les policiers sont déjà au courant.

A votre tour, vous êtes convoqué au commissariat, placé en garde à vue,

puis mis en examen pour violences sur personne vulnérable. Vous encourez

trois ans d'emprisonnement.

C'est le procureur qui vous convoque à la fin de la garde à vue.

Il est indigné par ce que vous avez fait et ne s'étonne pas que votre fils ait mal tourné. Il vous demande si vous reconnaissez votre culpabilité, une cassette vidéo à la main.

Vous répondez oui.

Il vous propose alors de prononcer lui-même votre condamnation puisque vous

ne contestez pas les faits.

C'est nouveau (Perben II, article 61), mais c'est efficace.

Si vous refusez, vous serez jugé par le tribunal, dans

longtemps et avec les aléas qu'on connaît.

Un avocat, penaud, vous conseille d'accepter.

Le procureur vous condamne à 4 mois d'emprisonnement,

non sans préciser que c'est une peine bien indulgente au vu des faits

odieux que vous avez commis.

Durant le trajet vers la prison, menotté dans

la fourgonnette, vous vous interdisez de penser à votre femme, à Julie, à

Juliette.

Vous vous demandez simplement si vous apercevrez de votre cellule

celle de Julien. Si vous pourrez lui faire coucou.

Et, tout à coup, vous vous souvenez d'un entrefilet dans le journal, en plein hiver 2004, sur

des avocats qui s'inquiétaient de l'entrée en vigueur de la loi Perben II.

Vous n'aviez, à l'époque, pas compris pourquoi.

Texte écrit par la Conférence du Stage du Barreau de Paris, repris par Libération ;-)

Oui oui : je n'ai pas prétendu l'avoir sorti de mon cerveau torturé. :(

Mais il est vrai que je n'ai pas cité mes sources; merci Lul d'avoir réparé cette omission ! :blush:

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Je vais me permettre de parler de Perben 2 et des conséquences (enfin celles que je vois).

En prison Perben 2 cela donne :

une surpopulation carcérale encore plus grande. La prison dans laquelle je bosse à une capacité d'acceuil de 400 détenus, il y en a 540 bientôt 600.

Les magistrats incarcèrent à tour de bras, des gars rentrent pour des peines de 20 jours, 1 mois. Même le directeur disait que c'était n'importe quoi. Mais c'est Perben 2 qui est la cause de tout cela.

Pour les peines plus longues, pas de projets de réinsertion travaillés, les déténus s'inscrivent à tout ce qui peut leur apporter des RPS (remise de peine supplémentaire, LA nouveauté) On ne peut pas leur en vouloit, on ferait tous pareil mais cela multiplie l'acceuil, l'instabilité des groupes et ne favorisent en rien la réinsertion.

C'est tout ce que je vois, mais dès que je me rappelle d'autre chose je reviens. J'en entends parler presque tous les jours de Perben 2.

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Je vais me permettre de parler de Perben 2 et des conséquences (enfin celles que je vois).

En prison Perben 2 cela donne :

une surpopulation carcérale encore plus grande. La prison dans laquelle je bosse à une capacité d'acceuil de 400 détenus, il y en a 540 bientôt 600.

Les magistrats incarcèrent à tour de bras, des gars rentrent pour des peines de 20 jours, 1 mois. Même le directeur disait que c'était n'importe quoi. Mais c'est Perben 2 qui est la cause de tout cela.

Pour les peines plus longues, pas de projets de réinsertion travaillés, les déténus s'inscrivent à tout ce qui peut leur apporter des RPS (remise de peine supplémentaire, LA nouveauté) On ne peut pas leur en vouloit, on ferait tous pareil mais cela multiplie l'acceuil, l'instabilité des groupes et ne favorisent en rien la réinsertion.

C'est tout ce que je vois, mais dès que je me rappelle d'autre chose je reviens. J'en entends parler presque tous les jours de Perben 2.

Eh bien, tu vois, ça ne semble pas être le cas de tout le monde. Mais la plupart des personnes pense que c'est parce qu'ils n'ont "rien à se reprocher", et que donc, ça ne les concerne pas.

Faisons un sondage dans la rue, au travail, auprès des amis... et on passera pour de dangereux paranoïaques.

Et pendant ce temps là, le désert avance.

Sinon, pour finir sur une note d'humour noir, quand tu dis :

La prison dans laquelle je bosse à une capacité d'acceuil de 400 détenus, il y en a 540 bientôt 600.

ça me rappelle le cas d'un collège dans mon canton : ça a été la même configuration pendant des années !!

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Je vais me permettre de parler de Perben 2 et des conséquences (enfin celles que je vois).

En prison Perben 2 cela donne :

une surpopulation carcérale encore plus grande. La prison dans laquelle je bosse à une capacité d'acceuil de 400 détenus, il y en a 540 bientôt 600.

Les magistrats incarcèrent à tour de bras, des gars rentrent pour des peines de 20 jours, 1 mois. Même le directeur disait que c'était n'importe quoi. Mais c'est Perben 2 qui est la cause de tout cela.

Pour les peines plus longues, pas de projets de réinsertion travaillés, les déténus s'inscrivent à tout ce qui peut leur apporter des RPS (remise de peine supplémentaire, LA nouveauté) On ne peut pas leur en vouloit, on ferait tous pareil mais cela multiplie l'acceuil, l'instabilité des groupes et ne favorisent en rien la réinsertion.

C'est tout ce que je vois, mais dès que je me rappelle d'autre chose je reviens. J'en entends parler presque tous les jours de Perben 2.

Eh bien, tu vois, ça ne semble pas être le cas de tout le monde. Mais la plupart des personnes pense que c'est parce qu'ils n'ont "rien à se reprocher", et que donc, ça ne les concerne pas.

Faisons un sondage dans la rue, au travail, auprès des amis... et on passera pour de dangereux paranoïaques.

Et pendant ce temps là, le désert avance.

Sinon, pour finir sur une note d'humour noir, quand tu dis :

La prison dans laquelle je bosse à une capacité d'acceuil de 400 détenus, il y en a 540 bientôt 600.

ça me rappelle le cas d'un collège dans mon canton : ça a été la même configuration pendant des années !!

Pour Perben 2, vu où je bosse c'est normal d'en entendre parler tous les jours mais je me rends bien compte que c'est dû au milieu.

Ensuite malheureusement pour le collège, comment ne pas voir de corrélation entre le manque de moyen pour l'éducatif et l'augmentation de la délinquance. :ninja:

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Je vais me permettre de parler de Perben 2 et des conséquences (enfin celles que je vois).

En prison Perben 2 cela donne :

une surpopulation carcérale encore plus grande. La prison dans laquelle je bosse à une capacité d'acceuil de 400 détenus, il y en a 540 bientôt 600.

Les magistrats incarcèrent à tour de bras, des gars rentrent pour des peines de 20 jours, 1 mois. Même le directeur disait que c'était n'importe quoi. Mais c'est Perben 2 qui est la cause de tout cela.

Pour les peines plus longues, pas de projets de réinsertion travaillés, les déténus s'inscrivent à tout ce qui peut leur apporter des RPS (remise de peine supplémentaire, LA nouveauté) On ne peut pas leur en vouloit, on ferait tous pareil mais cela multiplie l'acceuil, l'instabilité des groupes et ne favorisent en rien la réinsertion.

C'est tout ce que je vois, mais dès que je me rappelle d'autre chose je reviens. J'en entends parler presque tous les jours de Perben 2.

Eh bien, tu vois, ça ne semble pas être le cas de tout le monde. Mais la plupart des personnes pense que c'est parce qu'ils n'ont "rien à se reprocher", et que donc, ça ne les concerne pas.

Faisons un sondage dans la rue, au travail, auprès des amis... et on passera pour de dangereux paranoïaques.

Et pendant ce temps là, le désert avance.

Sinon, pour finir sur une note d'humour noir, quand tu dis :

La prison dans laquelle je bosse à une capacité d'acceuil de 400 détenus, il y en a 540 bientôt 600.

ça me rappelle le cas d'un collège dans mon canton : ça a été la même configuration pendant des années !!

Pour Perben 2, vu où je bosse c'est normal d'en entendre parler tous les jours mais je me rends bien compte que c'est dû au milieu.

Ensuite malheureusement pour le collège, comment ne pas voir de corrélation entre le manque de moyen pour l'éducatif et l'augmentation de la délinquance. :ninja:

Eh oui, mais quand on reprend la phrase du père Hugo (je crois que c'est de lui) : "ouvrez des écoles, vous fermerez des prisons", on passe pour un vieux machin qui sent la naphtaline... :(

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Tu bosses avec des détenus hommes corn ?

Oui, suis instit en prison et je suis dans une prison avec que des hommes majeurs.

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