Mogwli Posté(e) 20 février 2011 Posté(e) 20 février 2011 Au début de l'année, en CP, c'est ce qui est le plus difficile à réguler, c'est clair ! La honte ! Je parlais de Ce2 en février... Ben non, pas la honte ! Ce sont des compétences qui auraient dû être travaillées avant que tes CE2 arrivent chez toi. Si on a bien mouillé la chemise et qu'on a fait notre boulot au CP, les collègues qui prennent la suite peuvent le faire sereinement, en approfondissant ce qui doit être approfondi et en se consacrant aux nouveaux apprentissages qui leur incombent. Je fais pareil qu'Akwabon pour le doigt ! Autre petit truc : quand un élève s'approprie indûment la parole au cours de ces échanges, ou qu'il propose quelque chose qui vient d'être proposé par un camarade, je le prive de parole pour le reste de l'échange (ce qui se matérialise par le fait qu'il doit se mettre en position repos, bras croisés sur la table et tête dans les bras). Oui, je sais, ça semble très cruel (ououououh, la méchante maîtresse !). Mais comme je sais qu'ils auront des milliers d'occasions jusqu'à la fin de l'année d'ouvrir leur grand bec, j'assume. C'est si important de leur permettre peu à peu de se décentrer, d'apprendre à s'ouvrir à l'autre et de prendre en compte autre chose que SON petit nombril ou SON idée : c'est aussi cela, grandir ! Et je te garantis que c'est trèèèèèès efficace !
LouisBarthas Posté(e) 20 février 2011 Posté(e) 20 février 2011 "En basant la pratique de classe sur la différenciation, on nie l'essence même de l'école qui repose sur l'enseignement collectif sous la direction d'un maître chargé de transmettre le savoir." "Non seulement il apprend plus mais il apprend autre chose, quelque chose de plus qui ne naît que dans le creuset collectif." Il y a contradiction! C'est l'enseignant qui détient le savoir? ou le collectif? C'est l'enseignant qui détient le savoir. Et c'est en apprenant avec les autres, en même temps et dans un même lieu, que l'élève s'approprie ce savoir qui est un savoir normalisé, socialement justifié, moralement admis, politiquement défini et juridiquement encadré. que veut dire "avec les autres, en même temps et dans un même lieu"? assis à l'écoute de la toute puissance du maître ou ensemble en discutant les choix et les stratégies de ses pairs avec un enseignant décentré? J'ai bien dit que le maître est chargé de la transmission du savoir. Il n'y a aucune "toute puissance" dans cela. La soi-disant "toute-puissance" du maître est illusoire. Nombreux sont les enseignants à avoir expérimenté cette "toute-puissance", ne serait-ce que lorsqu'un seul élève refuse de travailler et a décidé de perturber ses "pairs". L'enseignant n'a pas besoin de se "décentrer", il n'a jamais été au centre, il ne peut l'être par nature. L'élève non plus n'a pas vocation à être placé "au centre" pour la même raison. C'est le savoir qui est au centre de l'école. L'école est le lieu institutionnel de la transmission du savoir. Je suis en classe pour transmettre le savoir. Que cette activité passe par des procédures éducatives et des modalités d'apprentissage variées est évident et nécessaire mais l'objet n'en reste pas moins l'appropriation du savoir par l'élève. Je ne me pose jamais la question de savoir si je suis trop frontal ou non, je cherche la procédure qui permettra au mieux à l'élève d'apprendre. Dans ma classe à double-niveau, où je ne peux m'occuper de toute la classe en même temps, les élèves échangent entre eux, ils ne font pas toujours le même travail en même temps, je demande à certains d'expliquer à d'autres et de les aider. La notion de "pédagogie frontale" opposée à la "construction par l'élève de ses propres savoirs" est un modèle théorique restrictif à fonction surtout idéologique. D'une manière générale, il vise plus ou moins à dévaloriser les savoirs, considérés comme "bourgeois", et à inscrire la fonction du maître dans une relation de pouvoir assimilée à celle d'un capitaliste du savoir dont il faudrait libérer l'enfant.
Invité mufab Posté(e) 20 février 2011 Posté(e) 20 février 2011 (ce qui se matérialise par le fait qu'il doit se mettre en position repos, bras croisés sur la table et tête dans les bras). OK, mais c'est que j'ai une majorité de fortes têtes, et ce sont justement eux qui parlent à tort et à travers. Et ça (la tête dans les bras), ils ne le feront pas, rapport à la honte devant les autres... Au "mieux" je les fais sortir quelques minutes (ça ils veulent bien sans esclandre), mais du coup, ils perdent un peu le fil, et ça n'arrange rien. Je retiens l'image (réaliste ) du doigt en l'air qui bouche les oreilles, j'essaierai de faire passer ce message (je sens que ça va les faire rire, mais on aime bien aussi.) Merci de m'avoir un peu déculpabilisée, mais c'est vrai que des fois on est tellement contents quand ça fuse qu'on oublie un peu ces règles basiques, nous aussi.
Mogwli Posté(e) 20 février 2011 Posté(e) 20 février 2011 La notion de "pédagogie frontale" opposée à la "construction par l'élève de ses propres savoirs" est un modèle théorique restrictif à fonction surtout idéologique. D'une manière générale, il vise plus ou moins à dévaloriser les savoirs, considérés comme "bourgeois", et à inscrire la fonction du maître dans une relation de pouvoir assimilée à celle d'un capitaliste du savoir dont il faudrait libérer l'enfant. :applause: Et j'ajouterai que ce modèle, cumulé avec le modèle managérial appliqué à l'enseignement, sert aussi à préparer l'extinction définitive de l'Ecole républicaine et l'ouverture de marchés gigantesques pour Microsoft et consorts, avec l'émergence d'un monde orwellien peuplé d'ilotes incultes qui constitueront une main d'oeuvre adaptable et exploitable à merci par une petite élite d'initiés qui, eux, auront eu accès au savoir par le biais du chèque-éducation !
Transparent women Posté(e) 20 février 2011 Posté(e) 20 février 2011 J'avais jamais remarqué à quel point lever la main fermait les oreilles, mais en vous lisant, je me dis "bon sang, mais c'est bien sûr, ça crève les yeux !" J'ai encore beaucoup à apprendre, décidément. Dès le 28 février, je mets en pratique dans ma classe. Sans doute est-ce aussi une manière, sinon d'être moins "frontale", puisque décidément ce mot m'énerve, du moins de permettre aux enfants de mieux s'écouter les uns les autres. c'est vrai que cette phrase, je vais m'en servir auprès de mes élèves!!!
LouisBarthas Posté(e) 20 février 2011 Posté(e) 20 février 2011 Les attaques caricaturales contre la "pédagogie frontale", la valorisation des "stratégies individuelles d'auto-apprentissage" qui visent à "décentrer" l'enseignant et à dévaloriser son rôle de transmetteur du savoir constituent la caution idéologique pédagogique pour détruire l'école publique laïque comme lieu de transmission du savoir. Dans un rapport de 1998 déjà, l'OCDE estimait que : La mondialisation - économique, politique et culturelle - rend obsolète, selon certains, l’institution implantée localement et ancrée dans une culture déterminée que l’on appelle "l’école" et en même temps qu’elle, "l’enseignant". Le développement de sources d’informations et de connaissances différentes va entraîner un déclin rapide du monopole des établissements scolaires dans le domaine de l’information et du savoir. Même à l’intérieur des établissements scolaires, l’individualisation plus marquée des modes d’apprentissage – qui sont flexibles et induits par la demande - peut être considérée comme supplantant les formules trop lourdes et dominées par l’offre. Elle annonce le déclin consécutif du rôle des enseignants, dont témoigne aussi le développement de nouvelles sources d’apprentissage, notamment par le biais des TIC et de ressources humaines autres que le corps enseignant. Il s'agit, en fait, d'ouvrir l'éducation au marché. En janvier 1989, la Table ronde européenne des industriels - ERT -, le puissant groupe de pression patronal auprès de la Commission européenne, publie un rapport intitulé Education et compétence en Europe. Elle y affirme d’emblée que l’éducation et la formation [...] sont considérées comme des investissements stratégiques vitaux pour la réussite future de l’entreprise. Puis elle déplore que l’enseignement et la formation [soient] toujours considérés par les gouvernements et les décideurs comme une affaire intérieure. [...] L’industrie n’a qu’une très faible influence sur les programmes enseignés. D’autant plus faible, en vérité, que les enseignants auraient une compréhension insuffisante de l’environnement économique, des affaires et de la notion de profit. La conclusion s’impose : industrie et établissements d’enseignement devraient travailler ensemble au développement de programmes d’enseignement, notamment grâce à l’apprentissage à distance, l’enseignement à distance et la mise au point de didacticiels (logiciels d’apprentissage sur ordinateur). Dans un nouveau rapport, L'ERT estime que la responsabilité de la formation doit, en définitive, être assumée par l’industrie. [...] Le monde de l’éducation semble ne pas bien percevoir le profil des collaborateurs nécessaires à l’industrie. [...] L’éducation doit être considérée comme un service rendu [...] au monde économique. [...] Les gouvernements nationaux devraient envisager l’éducation comme un processus s’étendant du berceau au tombeau. [...] L’éducation vise à apprendre, non à recevoir un enseignement. [...] Nous n’avons pas de temps à perdre. La Commission publie, la même année, son Livre blanc sur l’éducation et la formation, qui répond aux exigences de l’ERT. On y lit en effet : Le rapport de la Table ronde européenne des industriels (février 1995) a insisté sur la nécessité d’une formation polyvalente [...] incitant à apprendre à apprendre tout au long de la vie. [...] La Commission a insisté sur la nécessité d’un encouragement à la production européenne de logiciels éducatifs. Ainsi, le programme Socrates, doté d’un budget initial de 5,64 milliards de francs en quatre ans, vise notamment à donner une dimension européenne à l’acquisition de connaissances à domicile. Début 1996, la Commission européenne proposera de stimuler la recherche dans les logiciels éducatifs multimédia et d’augmenter le budget qui y est déjà consacré. L’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), intervient à son tour en publiant le compte-rendu d’une table ronde qui s’est tenue à Philadelphie (Etats-Unis) en février 1996. L’apprentissage à vie, y lit-on, ne saurait se fonder sur la présence permanente d’enseignants, mais il doit être assuré par des prestataires de services éducatifs. [...] La technologie crée un marché mondial dans le secteur de la formation. [...] La possibilité nouvelle de proposer des programmes d’enseignement dans d’autres pays, sans que les étudiants ou les enseignants partent de chez eux, pourrait fort bien avoir d’importantes répercussions sur la structure du système d’enseignement et de formation à l’échelle mondiale. Si le rôle des pouvoirs publics n’est pas méconnu, il se limite à assurer l’accès à l’apprentissage de ceux qui ne constitueront jamais un marché rentable et dont l’exclusion de la société en général s’accentuera à mesure que d’autres vont continuer de progresser. Source : Monde diplomatique
Sapotille Posté(e) 20 février 2011 Posté(e) 20 février 2011 Les discussions toniques et passionnées, c'est génial ... Les jeunes ont beaucoup à nous apporter... Merci Delphi, merci titebouillotte et les autres ... Chacun défend son point de vue et tous s'enrichissent mutuellement, c'est ce qui compte ...
helenel Posté(e) 21 février 2011 Auteur Posté(e) 21 février 2011 En tout cas, merci pour toutes les contributions, c'est effectivement très riche . Je n'ai pas fini de me questionner sur ma pratique, de remettre en cause ma manière d'enseigner, à la recherche de ce qui me permettra d'être une meilleure maîtresse...
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