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L A COLÈRE ET LA JOIE

Alors que nous lisions en classe un extrait de Jonathan Livingstone, une phrase m'a amené à lancer une réflexion sur le thème de la conscience des émotions.

Ça arrive souvent ces changements de direction en cours de séance...On peut passer des math à la géographie en trente secondes en mêlant de l'histoire à de la philosophie...D'ailleurs en histoire, on travaille sur le siècle des Lumières et l'importance des philosophes dans l'émergence des idées humanistes et ça finit immanquablement sur Diderot, Rousseau, Voltaire et tout ce qu'ils ont apporté à l'humanité.

"Les émotions...Si quelqu'un vous insulte, la colère que vous ressentez, elle n'est pas venue en vous depuis l'extérieur, ça n'est pas les mots qui sont tombés en vous avec un chargement de colère, ni un coup de vent chargé de colère qui est passé sur vous. Cette colère, c'est vous qui lui avez donné vie. C'est une incapacité à maîtriser ce qui se passe en vous. L'autre n'est pas responsable. Les émotions ne sont pas des charges matérielles que vous décidez de porter comme un fardeau, elles n'ont aucune existence si vous les ignorez. Si vous vous y abandonnez, c'est vous qui leur donnez vie. L'autre, d'ailleurs, est satisfait du mal que vous fabriquez en vous en imaginant qu'il en est le responsable. Vous lui donnez la puissance dont il rêvait. Vous succombez à vous-mêmes. Et non à lui. Si par contre, vous décidez d'observer en vous ce qui survient, vous devenez le maître de vos émotions étant donné qu'au lieu de vous soumettre à leur puissance, vous vous placez au-dessus d'elle. C'est votre conscience qui analyse et qui vous apprend le contrôle. Cette conscience agit comme un Maître intérieur, il est là et regarde, il s'amuse de cette agitation qui aimerait vous emporter et à laquelle vous ne succombez pas. La colère retombe comme un soufflé qui dégonfle. Votre "agresseur" s'en trouve d'ailleurs totalement ébahi, stupéfait, vous êtes là, vous le regardez avec un détachement qu'il ne comprend pas parce que ça n'est même pas lui que vous observez mais vous-même. Lui, il a disparu et ses paroles sont tombées dans un puits sans fond. Il n'y a plus de colère parce que votre observation intérieure a pris le pas sur cette émotion insignifiante et inutile. Et cette agression verbale devient u cadeau inestimable.

Vous êtes le Maître intérieur.

La personne que je dois absolument protéger, celle à qui je dois apporter la plus grande attention, c'est mon ennemi. C'est lui qui me fait grandir.

Qu'en est-il maintenant si l'émotion propagée est de la joie ? Est-ce que je dois l'accueillir et la laisser m'emporter ou est-ce que je dois également l'observer pour la neutraliser ?

Il convient pour ma part de la laisser s'étendre en sachant que l'autre n'en est pas responsable et que vous ne pourrez pas lui reprocher de ne pas la prolonger. C'est vous qui avez laissé s'étendre cette joie. Pas l'autre. Un ami qui ne vous offre plus cette joie n'est pas responsable de votre déception. C'est encore vous.

C'est votre façon de commenter la vie à travers vos émotions. Ça n'est pas la vie réelle mais ce que vous en faites, une image de la vie peinte par vos émotions. Vous pouvez en profiter tout en restant conscient qu'il ne s'agit que d'une illusion, un jeu éphémère, un moment de bonheur que vous vous donnez mais que l'autre n'a pas à entretenir sinon vous le prenez en otage de votre bonheur alors qu'il n'y est pour rien.

La personne dont je dois me méfier, c'est celle qui me fait croire que le bonheur est durable, qui voudrait que cette joie ne disparaisse jamais. Et cette personne, c'est moi. Les autres ne sont pas responsables.

C'est ce qu'on apprend de plus beau quand on aime.

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"RÉLOVUTION »

La méthode d'éveil est d'amener dans notre vécu cette nature qui est déjà présente. Que ce soit la méditation ou toute autre pratique, rien de nouveau n'adviendra car cela signifierait sinon que nous captons dans l'environnement un état inconnu en nous, comme si la pluie pouvait se glisser en nous, comme si nous n'avions pas de matière, comme si la lumière du soleil devenait une possession.

La méditation ne fabrique rien. Elle n'insère pas dans l'individu une donnée extérieure. Elle permet de prendre conscience de ce qui est là. Il s'agit en fait d'une épuration, de l'arrachement à notre conscience de tous les états parasites, de tous les voiles opaques qui contiennent une lumière déjà présente en nous. La nature de tous les êtres est exactement la même et cette nature est au-delà de la pensée. C'est là que se situe l'ouverture. Une ouverture sur ce qui est déjà là. Un état qui dissout l'intention, la volonté, l'imaginaire. Il n'y a rien à imaginer, rien à attendre, à vouloir, à espérer.

Penser à la méditation, c'est ne pas méditer. Tout le problème est là. Se donner un objectif mentalisé ramène l'individu à son mental et par conséquent à ses attachements.

L'attachement à la dissolution des attachements ne peut pas être un état d'éveil.

Toute la difficulté vient du fait que notre éducation, les enseignements reçus, l'accession à la connaissance, contribuent tous ensemble à créer une habitude : un travail, quel qu'il soit, attribue à l'individu une possession nouvelle. Il doit y avoir un résultat tangible, mesurable, identifiable, transmissible, ce travail doit même, si possible, octroyer un pouvoir, une distinction au regard du groupe humain. L'école enseigne pour que l'individu gravisse les échelons de la connaissance...

La méditation enseigne à perdre ce qui a été accumulé puisque ce qui est accumulé contribue finalement à la perdition de l'individu. La connaissance intègre le connaissant mais l'accession à la connaissance ne favorise pas instantanément la connaissance interne du connaissant. Ils sont nombreux ces diplômés qui ne savent rien d'eux-mêmes, sinon, l'image associée au statut de connaissant qu'ils ont acquis. Tout cela n'est pas une connaissance de soi. Tout le problème est là.

La connaissance détachée du connaissant est une accumulation de données temporelles. Toutes les connaissances viennent du passé et sont transmises à l'individu. Mais sans l'exploration du connaissant, dans l'instant, toute accumulation de connaissances n'est qu'un fardeau dont on se charge. Bien entendu, l'agrégé de philosophie considérera qu'il a un très haut niveau de connaissances et c'est exact pour ce qui est de son domaine. Mais s'il s'identifie à cette connaissance, il ne sait plus rien de lui...

C'est bien là que se situe le problème de notre enseignement en France. Nous amenons les enfants à croire que leurs connaissances leur donnent forme.

C'est terrifiant d'imaginer l'ampleur de ce mensonge...

Terrifiant aussi pour moi de penser que j'y participe...

Il est indispensable de changer de voie. Et les réformes ne servent à rien. C'est d’une "RéLovution" dont nous avons besoin.

Le niveau de l'enseignement n'est que le reflet du niveau général. Il n'est pas la cause, il est la victime.

BAC PHILO 2014

"T'es une fille, t'as pas de shampoing ? "

Vous avez quatre heures...

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« L'éducation consiste à comprendre l'enfant tel qu'il est, sans lui imposer l'image de ce que nous pensons qu'il devrait être. »

Krishnamurti

Le problème majeur vient du fait que ceux qui pensent à ce que l'enfant devrait être n'ont pas cherché encore à comprendre ce qu'ils sont eux-mêmes. C'est juste le mimétisme qui les guide. Un mimétisme social, éducatif, une mondialisation dans laquelle ils sont insérés.

Est-ce qu'ils ont cherché à identifier clairement ce qu'ils sont et leurs propres fonctionnements ? Comment peut-on considérer que la répétition des conditionnements suffit à être dans le Vrai ?

Un enseignant, digne de ce nom, devrait œuvrer à la révélation des êtres et non à leur intégration dans un mouvement de masse. Cette intégration se fera si l'individu lui-même, lorsqu'il en aura la capacité et la lucidité, décide que c'est la voie qui lui convient.

J'en ai connu tellement des enfants qui une fois adolescents, erraient dans les méandres des études supérieures sans savoir où ils allaient. Et d'autres qui étaient sortis de ce système parce que le système avait tout fait pour qu'ils s'en aillent...

Peut-on considérer dans ces cas-là, et ils sont innombrables, que l'enseignement a joué son rôle ?

Quel est ce rôle?

Qui est responsable ? La question essentielle.

Responsable et responsabilité, deux notions complémentaires.

Est responsable celui qui identifie les responsabilités qui lui incombent.

Je peux être responsable de mes actes et responsable de moi-même. Il ne s'agit pas de s'arrêter uniquement sur une responsabilité au regard d'une situation mais de joindre à cette observation l'enseignement que l'individu doit en retirer. Pourquoi est-ce que j'étais dans cette situation, comment y suis-je arrivé, quelles ont été les émotions qui m'ont fait perdre pied, pour quelles raisons est-ce que je me suis emballé, pour quelles raisons est-ce que j'ai perdu confiance ? La liste des observations à tenir est longue.

C'est cela que l'enseignement doit proposer aux jeunes enfants. Tout ce qui est de l'ordre cognitif n'est pas une finalité mais un chemin et sur ce chemin se présentent les opportunités pour apprendre à se connaître.

Il s'agit fondamentalement de se connaître en usant de ce qu'il y a à connaître.

FIN

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Je n'ai pas tout lu, mais je vais prendre le temps de le faire.

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Je n'ai pas tout lu, mais je vais prendre le temps de le faire.

J'aurais bien d'autres choses à rajouter mais c'est déjà bien assez long comme ça :)

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Etat des lieux.

  • Par la-haut
  • Le 25/02/2014
  • Commentaires (0)

Je suis entré dans l'enseignement à 19 ans. Je voulais être "le ver dans la pomme" du système.

Et bien, la pomme, en pourrissant, a contaminé le ver.

Je n'en peux plus.

Je refuse de faire du mal à mes élèves. Ca n'est pas ma mission.

Et je ne peux plus lutter. Les armes sont trop inégales.

Il suffit de regarder les dégâts...

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Frustrée, la jeunesse française rêve d’en découdre

LE MONDE |

25.02.2014 à 12h56 • Mis à jour le 25.02.2014 à 13h28 | Par Pascale Krémer
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4372915_6_8311_des-jeunes-en-service-civL'autoportrait est sombre. Amenés à définir leur génération, ce sont les mots « sacrifiée » ou « perdue » qui leur viennent le plus souvent à l'esprit. A l'automne 2013, les jeunes de 18 à 34 ans étaient conviés par France Télévisions à répondre à un long questionnaire en ligne sur eux-mêmes et leur génération. 210 000 se sont pris au jeu de cette opération « Génération quoi ? ». Leurs 21 millions de réponses fournissent un matériau de recherche exceptionnel pour les deux sociologues de la jeunesse Cécile Van de Velde et Camille Peugny, maîtres de conférences respectivement à l'EHESS et à l'université Paris-VIII, qui ont contribué à concevoir le questionnaire. Ils en tirent aujourd'hui pour Le Monde les principaux enseignements, en se focalisant sur la tranche d'âge des 18-25 ans, centrale pour l'analyse.
  • La vie en noir

Interrogés sur leur devenir personnel, les jeunes répondants sont près des deux tiers à se déclarer plutôt ou très optimistes. En revanche, le regard qu'ils portent sur le destin de leur génération est extrêmement sombre. Vingt ans n'est pas le plus bel âge de la vie, pensent-ils majoritairement (à 51 %). Les mots-clés librement choisis pour définir leur génération sont édifiants : « sacrifiée », « perdue ». Et encore (après « Y », « Internet », « connectée »), « désabusée », « désenchantée », « galère »… « Autant sacrifiée” est un terme qui a pu être induit par le discours des médias, analysent Cécile Van de Velde et Camille Peugny, autant perdue” semble un choix spontané. » Donc révélateur.

Seuls 25 % des 18-25 ans ont la conviction que leur vie sera meilleure que celle de leurs parents. Ils sont 45 % à imaginer qu'elle sera pire, 29 % qu'elle sera semblable. Près d'un tiers (33 %) sont persuadés qu'ils ne connaîtront jamais autre chose que la crise. Quant à la vie de leurs propres enfants, 43 % pensent qu'elle sera encore pire que la leur. A toutes ces questions, les jeunes femmes répondent de façon encore plus pessimiste que leurs congénères masculins. « Ces pourcentages sont très élevés, sachant que les jeunes sont, dans la plupart des enquêtes, plus optimistes que leurs aînés. Ils le sont d'ailleurs dans cette enquête concernant leur avenir personnel, remarque M. Peugny. Ce qui apparaît ici, c'est le poids du discours de crise dans lequel nous baignons désormais, et le sentiment d'être pris dans une spirale du déclassement. »

Deux pondérations à apporter, selon lui, néanmoins. Les participants peuvent avoir été tentés de « surjouer un discours noir et cynique, ce qui est une manière de conjurer le sort ». Surtout, cette génération est fortement clivée en fonction des parcours et des statuts, précaires ou non. Ce n'est pas une mais des jeunesses qui se dessinent. En passant des étudiants ou salariés en CDI aux chômeurs-intérimaires-inactifs, le pessimisme gagne 20 points. L'expérience du chômage affecte fortement la projection dans l'avenir.

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  • Un besoin de reconnaissance

« Les 18-25 ans qui ont participé font voler en éclats le mythe d'une société méritocratique » : voilà le second enseignement majeur de l'enquête, à entendre les deux sociologues. Près des trois quarts (70 %) d'entre eux ont le sentiment que la société française ne leur donne pas les moyens de montrer ce dont ils sont capables. « C'est massif, et en forte progression. En 2006, ils étaient 53 % dans ce cas. »

Les jeunes se montrent très sévères sur le fonctionnement du système éducatif à la française. Récompense-t-il le mérite ? Non, à 61 %. Donne-t-il sa chance à tous ? Non, à 61 %. Logiquement, plus le statut du jeune est précaire, plus son opinion est négative. Des réponses lourdes de rancoeurs dans une société « où formation initiale et diplôme exercent une si forte emprise sur les parcours de vie ».

D'autant que dans la sphère professionnelle non plus, les jeunes n'ont pas l'impression que leurs mérites et efforts soient récompensés. 60 % des répondants ne se croient pas payés, par exemple, à la hauteur de leurs qualifications.

Dans cette enquête transparaît donc, selon Cécile Van de Velde, « une génération consciente, lucide, désillusionnée, selon laquelle les instruments de mobilité sociale ne fonctionnent pas ». « Les jeunes se sentent abandonnés par la société. Ils ne sont pas aux commandes de leur vie, ils subissent. Sont frustrés de ne pas pouvoir faire leurs preuves, montrer qui ils sont. » Pour réussir dans la vie, la moitié des répondants pense donc ne pouvoir compter que sur soi-même. « Les jeunes sont individualistes, libéraux, par dépit plus que par essence. » Puisque très majoritairement (77 %), ils estiment également que dans la vie, on ne peut pas s'en sortir sans solidarité.

  • La valeur travail

Les jeunes valorisent d'autant plus le travail qu'il leur échappe, un quart d'entre eux connaissant le chômage. Seule une toute petite frange le rejette, envisageant de vivoter en marge du système. 81 % des répondants disent que le travail est important dans leur vie. Et pas seulement pour gagner de l'argent. La moitié déclare que travailler sert avant tout à s'épanouir. « Qu'ils soient soucieux de l'équilibre vie privée-vie professionnelle ne veut pas dire que la valeur travail se perd », commente Camille Peugny, pour qui rien n'est plus faux que les clichés sur une « génération feignasse » : « Impossible de faire une conférence sur les jeunes sans qu'un manager assure qu'à peine arrivés en entreprise, les jeunes ne s'intéressent qu'à leurs RTT. Platon déjà évoquait la décadence de la jeunesse, c'est un discours vieux comme le monde, lié au cycle de l'âge, à la difficulté à concevoir le changement apporté par les jeunes. »

A la question « Actuellement, es-tu épanoui dans ton travail ? », 62 % des 18-25 ans ont acquiescé. Mais la statistique chute à 43 % pour les intérimaires… L'enquête Génération quoi ? fournit le plus grand échantillon d'intérimaires jamais réuni (8 000 répondants dans cette situation), et leur « souffrance » saute aux yeux des sociologues. « Il faut sortir du discours sur l'intérim choisi. Ces jeunes veulent travailler davantage, ils ont le sentiment insupportable que leur destin est aux mains des autres, que leur sort dépend d'un coup de téléphone, ce qui interdit toute projection dans l'avenir. »

  • La tentation du départ

« T'installer à l'étranger, ça te tente ? » Evidemment oui, cela tente les trois quarts des participants à l'enquête. Inhérente à la jeunesse, cette envie d'aller voir ailleurs est plus que jamais valorisée dans la société. Mais 24 % des jeunes se sont reconnus dans une expression volontairement rageuse, hargneuse, qui leur était suggérée : « Dès que je peux, je me barre. » « Une réponse aux portes fermées pour tous les jeunes dans l'impasse, chômeurs, petits contrats, stagiaires… », à en croire les sociologues.

  • Famille, je t'aime

Toutes les questions portant sur les relations au sein de la famille suscitent des réponses unanimement positives. La famille apparaît plus que jamais comme la valeur refuge. S'ils doivent qualifier leurs relations avec les parents, 27 % des jeunes les décrivent comme « idéales », 53 % comme « cool », seuls 10 % les jugent « moyennes » ou « hypertendues ». Les parents, assurent-ils, sont fiers de leur parcours (89 %), les soutiennent dans leurs choix (91 %). Pour Camille Peugny, « les parents ont intériorisé le fait que la situation des jeunes est extrêmement difficile. Les quadras et quinquagénaires ont eux-mêmes connu la crise. Fini, les réflexions désagréables. Les deux générations sont solidaires dans la crise. Moralement et matériellement. »

Une bonne moitié des jeunes (53 %), même actifs, dit recevoir des aides parentales. Dans les familles, l'inquiétude est partagée. « Est-ce que tes parents sont angoissés par ton avenir ? » 63 % pensent que oui. Les réponses positives montent logiquement à 80 % pour les jeunes chômeurs ou inactifs. Mais atteignent tout de même 63 % chez les étudiants, et encore 47 % chez les jeunes en CDI. Même ce sésame recherché par tous ne parvient pas à apaiser l'anxiété familiale. « Cela rejoint les enquêtes sur les angoisses scolaires, la pression du diplôme, poursuit M. Peugny. Et cela montre que les parents sont parfois un brin schizophrènes : ce sont les mêmes qui, dans leurs fonctions en entreprise, ne sont guère pressés d'intégrer les jeunes dont ils ont une image peu flatteuse. »

  • La faute aux baby-boomers

Autre ambivalence, chez les jeunes cette fois : ils ne sont pas en conflit avec la génération parentale parce que les relations sont souples, les solidarités fortes. Mais cela ne les empêche pas d'en vouloir à leurs aînés de ne pas leur faire de place dans la société. Pour un jeune sur deux, les générations précédentes sont responsables de leurs difficultés. « C'est assez nouveau en France, et l'on peut penser que cela monte, surtout chez les étudiants, observe Cécile Van de Velde. Le problème d'équité entre générations se conscientise, sans doute du fait de la politique d'austérité, de la réforme des retraites et des débats sur le poids de la dette. Les jeunes pensent qu'ils font les frais de tout cela. » Mais sur une même génération, leur regard est double. Les mêmes qui disent « Marre des baby-boomers, on paye pour leur retraite, nous on n'en aura pas » ne veulent surtout pas que la retraite de leurs parents soit amputée – c'est particulièrement frappant chez les jeunes filles. « Ce qui explique en partie pourquoi le mouvement des Indignés a si peu pris en France… »

  • La politique, ils n'y croient plus

Vis-à-vis d'elle, la défiance est énorme. Près de la moitié (46 %) des répondants n'ont pas du tout confiance dans les femmes et hommes politiques. Certes, ils sont encore plus nombreux à se méfier des institutions religieuses (60 %) Et presque aussi sceptiques à l'égard des médias (40 % de non-confiance) que des politiques.

Mais pour la moitié des 18-25 ans, c'est tout vu, les politiques sont « tous corrompus ». Ces derniers ont bien encore du pouvoir (64 % des réponses), mais l'utilisent mal, puisqu'ils laissent la finance diriger le monde (90 %). La charge est violente, aux yeux des deux sociologues : « Les jeunes expriment une demande d'Etat, en souhaitant par exemple que leur période de formation soit financée. Ils pensent que les politiques, s'ils en avaient le courage, pourraient avoir une influence sur leur vie. Mais qu'ils ont laissé la finance prendre le pouvoir. Il y a du mépris dans ce regard des jeunes. Ils n'y croient plus. »

Chez eux, jeunes diplômés en tête, le sentiment que droite et gauche se valent semble encore plus fort que dans l'ensemble de la population. « Ils font l'expérience de la désillusion politique. C'est la première fois qu'ils vivent la gauche au pouvoir. Et ils ont le sentiment que rien ne change pour eux. » Voilà qui poussera massivement à l'abstention, anticipent les chercheurs. « Ce sont des gens informés, qui ne se fichent pas de la politique, qui ont des habitudes participatives liées à l'usage des réseaux sociaux. Mais l'offre politique ne répond pas à leurs attentes. La démocratie ne s'adresse pas à eux. Ils n'iront pas voter mais ce sera une abstention politique, réfléchie, presque militante. »

S'ils critiquent au plus haut point la politique traditionnelle, les 18-25 ans s'engagent plus volontiers dans un militantisme de terrain : manifestations, associations, solidarités locales… Leur altruisme semble plus marqué que celui du reste de la population. 80 %, par exemple, seraient favorables à un service civique obligatoire. Autre valeur classique de la jeunesse, la tolérance demeure forte (70 % estiment que l'immigration est une source d'enrichissement culturel) mais semble s'éroder. « A l'image de ce qui se passe dans l'ensemble de la société, une grosse minorité campe sur des positions autoritaires et xénophobes. Une véritable bombe à retardement, craint Mme Van de Velde. Ce sont les jeunes invisibles, dans des vies d'impasse, perdants de la mondialisation. Beaucoup de ruraux et de périurbains, en difficulté, déclassés. Ils sont souvent tentés par le Front national. » Un tiers des répondants envisagent que des emplois puissent être réservés aux Français.

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  • Un vent de révolte

Une Cocotte-Minute qui n'aurait pas de soupape. Telle est l'inquiétante image choisie par les deux sociologues pour décrire le « fort potentiel de révolte » perçu au travers de cette vaste enquête. « C'est une génération qui veut entrer de plain-pied dans une société vieillissante. Elle enrage de piétiner à son seuil. Elle ne veut rien renverser, elle n'est pas en conflit de valeurs, mais elle trouve toutes les portes fermées, et elle envoie un avertissement. »

Besoin d'expression étouffé. Frustrations de ne pas avoir de place, de n'obtenir aucune reconnaissance sociale, de ne pouvoir devenir des citoyens à part entière, dotés d'un travail et d'un logement. Trajectoires déviées parce que l'emploi trouvé ne correspond pas aux études. Craintes pour l'avenir. Défiance vis-à-vis du politique… « Ce sentiment d'être privés de l'essentiel constitue un terreau fertile à la contestation. »

Jamais la jeunesse, en France, n'a été aussi éduquée. Lorsqu'ils sont chômeurs, stagiaires, coincés dans l'intérim, ces enfants de la démocratisation scolaire et de la mondialisation culturelle, extrêmement informés, vivent comme une indignité de devoir se contenter de survivre alors que leurs études ont fait naître de forts espoirs. D'où cette frustration existentielle et cette capacité à développer un discours de plus en plus critique sur l'épreuve sociale qu'ils traversent. « Un nous'' pourrait se former, croient les sociologues, si les diplômés étaient rejoints par les jeunes en désespérance sociale. »

Lire notre reportage à Saumur : Camille, 19 ans : « Les politiques ne changent pas notre vie »

A la question « Est-ce que tu participerais à un mouvement de révolte type Mai 68 demain ou dans les prochains mois ? », ils sont 61 % à dire oui. Tous quasiment égaux dans la colère, femmes et hommes tirés d'affaire et jeunes en galère… 66 % des intérimaires. 63 % des chômeurs. 60 % des étudiants. Et même 54 % des employés en CDI !

« Les jeunes ne sont pas dans la résignation. Il y a une énergie latente, comme en 1968 », perçoit Cécile Van de Velde. En temps de crise, explique-t-elle, on peut adopter une stratégie d'adaptation au système (loyalty), de départ (exit), ou de révolte (voice). « Loyalty'' pourrait bien se transformer en voice'' si rien ne bouge… Il suffit d'une étincelle… » Et d'une figure cible. La chance des politiques jusqu'à présent ? Qu'il soit plus malaisé de se rebeller contre un ennemi lointain et abstrait – la finance, la mondialisation, l'Europe – que contre la génération de ses parents, comme en 1968.

Lire aussi : Les coulisses du succès de l'opération « Génération quoi ? »

  • 1 mois plus tard...
Posté(e)

Bon, voilà 1 mois que je rencontre les personnels de l'IA chargés de la reconversion des enseignants.Assistante sociale, délégué du personnel, médecin de l'IA, mon inspecteur, délégués syndicalistes...Les réponses que j'ai obtenues se résument ainsi : "Vous avez 52 ans, vous avez juste un BAC et votre diplôme d'instituteur. Il n'y a rien d'accessible pour vous dans la fonction publique en dehors d'un retour à la FAC pour passer des concours...Sinon, il vous reste le congé longue maladie..."

Et bien, ça y est, je les prends mes anti-dépresseurs...

Trente-deux ans de carrière pour s'entendre dire que ça ne vaut rien, que c'est inexistant, que je n'existe plus pour eux en fait. La sécurité sociale va devoir me prendre en charge alors que j'allais les voir pour TRAVAILLER...

Posté(e)

Je compatis, Thierry.

Bien que j'ai une licence donc bac + 3 , je sais que quand sera vraiment venu le moment de "sauver ma peau", je ne pourrai pas échapper aux études, et concours.

Oui, on est bien peu de choses pour la hiérarchie, des matricules tout au plus.

En l'état actuel des choses (pour ma part dans le 93, j'estime que seuls les jeunes, en bonne santé et sans charge de famille, peuvent tenir.

Moi je ne peux plus, je suis arrêtée.

J'espère un poste dans un secteur plus calme de mon département (mutations hors 93 bloquées).

Et j'espère tenir ainsi jusqu'à ce que mes 2 jeunes enfants soient relativement autonomes pour rester seuls à la maison jusqu'à ce que je revienne plus ou moins tard du boulot, lorsque j'aurai réussi à décrocher un boulot dans l'administratif. Jusque là, pas moyen de faire autrement.

Le métier est devenu tel qu'il est quasiment impossible, physiquement et psychologiquement, de tenir toute une carrière (avant les instits à 55 ans, passe encore).

Plein de courage, tout n'est pas perdu, bats toi.

Si tu n'as plus de jeunes enfants à charge, ce qui est une chance, je pense que tu peux avoir une grande marge de manœuvre.

Posté(e)

Les inspections et syndicats ne font rien, il n'y a aucune volonté politique d'aider les enseignants qui veulent se reconvertir.

Pour ma part j'ai pris contact avec une association "aide aux profs" qui essaie de faire bouger les choses, mais je pense qu'il faudrait que les tous enseignants qui n'en peuvent plus arrivent à se faire entendre et refuse de se laisser considérer comme des incapables, bons à rien ... On devrait aussi avoir droits à une vraies reconnaissances de nos compétences car on en a.

Oui c'est très utopistes et bien plus facile à dire qu'à faire...

Posté(e)

Je compatis, Thierry.

Bien que j'ai une licence donc bac + 3 , je sais que quand sera vraiment venu le moment de "sauver ma peau", je ne pourrai pas échapper aux études, et concours.

Oui, on est bien peu de choses pour la hiérarchie, des matricules tout au plus.

En l'état actuel des choses (pour ma part dans le 93, j'estime que seuls les jeunes, en bonne santé et sans charge de famille, peuvent tenir.

Moi je ne peux plus, je suis arrêtée.

J'espère un poste dans un secteur plus calme de mon département (mutations hors 93 bloquées).

Et j'espère tenir ainsi jusqu'à ce que mes 2 jeunes enfants soient relativement autonomes pour rester seuls à la maison jusqu'à ce que je revienne plus ou moins tard du boulot, lorsque j'aurai réussi à décrocher un boulot dans l'administratif. Jusque là, pas moyen de faire autrement.

Le métier est devenu tel qu'il est quasiment impossible, physiquement et psychologiquement, de tenir toute une carrière (avant les instits à 55 ans, passe encore).

Plein de courage, tout n'est pas perdu, bats toi.

Si tu n'as plus de jeunes enfants à charge, ce qui est une chance, je pense que tu peux avoir une grande marge de manœuvre.

Bonjour Amélie

Trois ados à charge, deux en études longues, une fille qu'on aide financièrement pour son installation...Et bien, c'est beaucoup plus lourd qu'avec de jeunes enfants. La charge de responsabilité n'est pas la même, c'est certain mais financièrement c'est très lourd...Mes crises d'angoisse ne viennent pas pour rien...Déjà, je vis très mal le fait d'abandonner les enfants mais alors il faut surtout que j'évite de planter la famille...Je cherche une formation dans le "développement personnel et le soin", Reiki, sophrologie analysante, massages et magnétisme...J'ai un parcours assez atypique dans le domaine et un potentiel certain. Pas moi qui le dis mais la médium magnétiseuse qui m'a sauvé...Cinq hernies discales, paralysie, morphine...Et puis quatre heures entre ses mains et trois mois après je reprenais l'alpinisme. J'ai soigné aussi depuis, mes enfants, ma femme, des amis, le chien de ma fille...La médium magnétiseuse va me former pour que je prenne sa succession. Deux heures au téléphone avec elle hier soir. Comme quoi, ma maxime me va toujours aussi bien : "laisse la vie te vivre, elle sait où elle va. "

Je m'en sortirai et j'espère même que j'aurai à soigner les enfants que cette pu t...de réforme aura massacré.

Oui, je pense comme toi que ce secteur va voir tomber comme des mouches tous les "anciens". C'est impossible de tenir jusqu'à la retraite avec le même engagement. Physiquement et moralement impossible.

J'espère pour toi que tu trouveras une solution...De tout coeur avec toi.

Posté(e)

Les inspections et syndicats ne font rien, il n'y a aucune volonté politique d'aider les enseignants qui veulent se reconvertir.

Pour ma part j'ai pris contact avec une association "aide aux profs" qui essaie de faire bouger les choses, mais je pense qu'il faudrait que les tous enseignants qui n'en peuvent plus arrivent à se faire entendre et refuse de se laisser considérer comme des incapables, bons à rien ... On devrait aussi avoir droits à une vraies reconnaissances de nos compétences car on en a.

Oui c'est très utopistes et bien plus facile à dire qu'à faire...

Bonjour Lolotte

Je connais cette assoc et leur site et puis aussi "Quitter l'enseignement"'. Je ne savais même pas que ça existait ces sites, c'est très révélateur du malaise...Mais les politicards ne veulent pas nous voir. Le congé maladie les satisfait finalement...

Posté(e)

Les inspections et syndicats ne font rien, il n'y a aucune volonté politique d'aider les enseignants qui veulent se reconvertir.

Pour ma part j'ai pris contact avec une association "aide aux profs" qui essaie de faire bouger les choses, mais je pense qu'il faudrait que les tous enseignants qui n'en peuvent plus arrivent à se faire entendre et refuse de se laisser considérer comme des incapables, bons à rien ... On devrait aussi avoir droits à une vraies reconnaissances de nos compétences car on en a.

Oui c'est très utopistes et bien plus facile à dire qu'à faire...

Bonjour Lolotte

Je connais cette assoc et leur site et puis aussi "Quitter l'enseignement"'. Je ne savais même pas que ça existait ces sites, c'est très révélateur du malaise...Mais les politicards ne veulent pas nous voir. Le congé maladie les satisfait finalement...

Mon côté quelques peu révolutionnaire a envie de répondre : alors c'est à nous de faire en sorte qu'ils nous voient et nous entendent !! Bien qu'à mon avis ils doivent être bien contents d'avoir de plus en plus de profs qui baissent les bras, se mettent en arrêt ou démissionnent, ce sera d'autant plus facile de se débarrasser de ce poids qu'est l'Education Nationale qui pèse si lourd sur leurs épaules.

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