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Individualisme et consumérisme dans les pédagogies promues


Frédo45

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J'ai remarqué qu'au fil des années, la différenciation avait changé de définition. Là où il s'agissait, sur une notion donnée, de proposer des remédiations diverses à des groupes de besoin établis en fonction des erreurs commises, elle est devenue une individualisation du parcours scolaire de l'élève. 

Par exemple, avant, la différenciation, c'était ça :

On travaillait sur la technique opératoire de la division. Certains élèves comprenaient, d'autres étaient gênés par le principe de distribution, d'autres par une mauvaise maîtrise des tables, d'autres par une mauvaise maîtrise de la soustraction. La différenciation consistait à mettre en place des ateliers et exercices permettant à chacun de progresser dans l'optique de parvenir à poser la division.

Aujourd'hui, la différenciation, c'est ça :

Un élève est en échec, on abaisse le niveau d'exigence pour lui dans la classe. Il est en CM2 et on lui fait faire du CE2 et il a un travail personnalisé en classe. 

Je pense que cette démarche est complètement dévoyée et que les PE ont tort de s'y engouffrer. Alors que jamais les RASED n'ont été reconstitués depuis 2008, que les places en CMP, CMPP, ULIS sont insuffisantes, que les orthophonistes et autres spécialistes sont rares, qu'on inclut à marche forcée, sans moyens supplémentaires, on demande aux enseignants de s'adapter et de proposer du sur-mesure. Et la hiérarchie n'hésite pas à user de la carte de la culpabilisation. D'ailleurs, ceux qui se refusent à cette individualisation des parcours sont bien souvent montrés du doigt lors des inspections. 

Cette dérive est, à mon sens, à la fois inefficace et inutile. Inefficace car ces élèves ne progressent pas plus. Ces élèves à besoins particuliers ont besoin d'une attention particulière... mais en dehors de la classe, sous la responsabilité d'un spécialiste ou d'un maître spécialisé. Dangereuse car elle tue les groupes-classes et valident l'école McDo, une école où le consumérisme a toute sa place, où les parents réclament encore et encore et où les enseignants se vendent plus qu'ils n'assurent un service public. 

Cette école est l'école d'un individualisme qu'on critique par ailleurs, en expliquant que dans les grandes classes, nos élèves ne sont plus capables d'écouter et d'appliquer une consigne collective. Mais comment s'en étonner quand, depuis le début de leur scolarité, ils ont un travail différent et que la consigne collective, finalement, n'existe pas ou existe peu. 

Il est vraiment temps de se questionner sur le sujet et de mettre la hiérarchie et la formation devant leurs incohérences. 

A vous de me dire ce que vous en pensez. 

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Tout ces concepts issus du cerveau malade d'une idéologie mortifère ne sont là que pour cacher la misère. La vérité c'est qu'en 40 ans nos enfants ont perdu plus de 500h de cours de français. Quasi autant en maths. 

Que nos classes bétaillères ressemblent plus à la Cour de miracles qu'à une véritable classe où il règne une atmosphère propice aux apprentissages. 

La destruction de tous nos dispositifs d'aide, de notre formation initiale et continue, de la place de l'humain tout simplement. D'ailleurs un système qui prône la "bienveillance" où cela devient même une injonction, est un système malade.

 

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Bonjour,

ici, les raseds existent toujours. Depuis quelques années, la maîtresse E prend de petits groupes dans sa salle.

Je me souviens qu'il y a une dizaine d'années, les maîtres E avaient interdiction (ou refusaient) de prendre des élèves en dehors de la classe. C'était tellement pénible d'avoir le bruit d'un autre enseignant en classe, que j'ai fini par ne plus faire appel à eux. Je me demande avec le recul si ce n'était pas le but, finalement.

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Le 22/10/2022 à 10:04, nonau a dit :

Tout ces concepts issus du cerveau malade d'une idéologie mortifère ne sont là que pour cacher la misère. La vérité c'est qu'en 40 ans nos enfants ont perdu plus de 500h de cours de français. Quasi autant en maths. 

Que nos classes bétaillères ressemblent plus à la Cour de miracles qu'à une véritable classe où il règne une atmosphère propice aux apprentissages. 

La destruction de tous nos dispositifs d'aide, de notre formation initiale et continue, de la place de l'humain tout simplement. D'ailleurs un système qui prône la "bienveillance" où cela devient même une injonction, est un système malade.

 

Ils ont surtout perdu 2/3 d'une année scolaire en 2008, toutes matières confondues. En France, la part de l'étude de la langue maternelle est très importante en comparaison des autres pays. Il faudrait peut-être s'interroger sur ce point. Est-ce que faire 3 h de français dans la journée est efficace pour tous les élèves ? 

Ce que je veux souligner, c'est l'importance que prend l'individualisation dans une système qui ne vise qu'à économiser et produire des travailleurs malléables au détriment de ce que devrait être l'école, c'est-à-dire le lieu d'apprentissage de la citoyenneté, de l'autonomie et du goût de savoir. 

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Il y a 5 heures, borneo a dit :

Bonjour,

ici, les raseds existent toujours. Depuis quelques années, la maîtresse E prend de petits groupes dans sa salle.

Je me souviens qu'il y a une dizaine d'années, les maîtres E avaient interdiction (ou refusaient) de prendre des élèves en dehors de la classe. C'était tellement pénible d'avoir le bruit d'un autre enseignant en classe, que j'ai fini par ne plus faire appel à eux. Je me demande avec le recul si ce n'était pas le but, finalement.

Chez nous, plus de RASED depuis des années. Les maîtres E et G, les psychologues scolaires sont obligés d'intervenir sur d'autres secteurs que le leur. Jamais, lorsqu'ils étaient là, ils ne prenaient les élèves dans notre classe. Ca, c'est vraiment une idée saugrenue pour ne être vulgaire. 

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Il y a 15 heures, Frédo45 a dit :

Ils ont surtout perdu 2/3 d'une année scolaire en 2008, toutes matières confondues. En France, la part de l'étude de la langue maternelle est très important en comparaison des autres pays. Il faudrait peut-être s'interroger sur ce point. Est-ce que faire 3 h de français dans la journée est efficace pour tous les élèves ? 

Ce que je veux souligner, c'est l'importance que prend l'individualisation dans une système qui ne vise qu'à économiser et produire des travailleurs malléables au détriment de ce que devrait être l'école, c'est-à-dire le lieu d'apprentissage de la citoyenneté, de l'autonomie et du goût de savoir. 

Effectivement tous ces concepts comme je l'évoquais plus sont issus du vocabulaire du MEDEF : "compétence" (à la place du diplôme), individualisation, personnalisation....Et nous avons les mêmes concepts dans le management pour notre propre carrière... 

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On parlait hier avec les collègues des classes flexibles, des besoins des élèves en tout genre car certains ne sont plus capables de rester assis, alors on leur propose un ballon pour s'assoir, un vélo pour pédaler, des coussins, des élastiques pour les pieds. Déjà ce matériel coute super cher. Ça peut être présenté  en formation comme solution miracle et révolutionnaire ou tendance du moment.

Mais si on se pose la question du pourquoi actuellement, nos jeunes ne tiennent plus assis, ont des soucis de concentration... qu'elle est la cause ? comment la résoudre plutôt que la compenser par du matériel à prix d'or ?

 

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L’histoire des 30 minutes d’activité physique c’est peut-être pour ça? 

Pour en revenir au premier message de Fredo, est-ce la différenciation qui a changé ou les enfants. 
Je ne suis pas de la première jeunesse et ai vu passer des cohortes d’élèves. Est-ce la raréfaction des redoublements? La « bienveillance » dont la signification est bien altérée ? Autre chose encore? Mais les classes ne sont plus les mêmes. 
Quand un enfant arrive en cm2 ne sachant pas lire…. 

Classe flexible, Montessori tout ça va dans le sens d’une individualisation.

Je m’interroge aussi cette année, car face à des petits avec des difficultés diverses, j’ai peur de creuser encore plus l’écart. Je vois aussi du côté des familles un besoin de singulariser plus que de faire progresser ( en général les parents veulent que les enfants raccrochent les wagons pas là enfin pas tous).

Le besoin de mouvement, l’angoisse quand il n’y a pas de bruit qu’ils verbalisent, ça aussi ça pose question. J’ai parfois l’impression que ce mouvement ce bruit comblent un vide intérieur.

Le groupe pris en classe, connu aussi. Le collègue parlant à voix basse, mais les enfants ça c’est une autre affaire. Impression aussi que cela leur est impossible ( ça j’en doute).

Bref! Vais suivre la discussion!

 

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il y a 52 minutes, blacknader a dit :

On parlait hier avec les collègues des classes flexibles, des besoins des élèves en tout genre car certains ne sont plus capables de rester assis, alors on leur propose un ballon pour s'assoir, un vélo pour pédaler, des coussins, des élastiques pour les pieds. Déjà ce matériel coute super cher. Ça peut être présenté  en formation comme solution miracle et révolutionnaire ou tendance du moment.

Mais si on se pose la question du pourquoi actuellement, nos jeunes ne tiennent plus assis, ont des soucis de concentration... qu'elle est la cause ? comment la résoudre plutôt que la compenser par du matériel à prix d'or ?

 

Tout à fait. Nous sommes face à une question de santé publique qu'il faut prendre à la source. 

 

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De plus en plus les ateliers en groupe disparaissent en maternelle au profit des ateliers autonomes et des "contrats individualisés ".

J'y réfléchissais justement cette semaine car mes jeunes collègues sont à fond là dedans. Je trouve pas ça terrible finalement.  Outre le boulot énorme que ça demande, je m'interrogeais sur sur ce qui pour moi, conforte finalement l'individualisme au détriment des échanges entre élèves.  On est d'accord que le travail en groupes imposés peut faire l'objet de débats mais ce remplacement par des activités, pour la plupart réalisées seul, me paraît être bien dans l'air du temps . Et l'air du temps avec la méritocratie et la réussite individuelle portée aux nues ne me plaît guère  ....

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Citation

« J'ai remarqué qu'au fil des années, la différenciation avait changé de définition. Là où il s'agissait, sur une notion donnée, de proposer des remédiations diverses à des groupes de besoin établis en fonction des erreurs commises, elle est devenue une individualisation du parcours scolaire de l'élève.  »

 

Bonjour.

Vous avez totalement raison d'évoquer ce changement de définition. Ce galvaudage des mots et ce dévoiement des concepts semblent masquer une réalité -à mon humble avis- beaucoup plus cauteleuse, d'autant plus qu'elle tend à instiller un sentiment de culpabilité chez l'enseignant et à diffuser insidieusement l'idée d'un service public éducatif en déliquescence, auprès de l'opinion publique in fine.

Ce à quoi on assite est, en réalité, un changement de paradigme : l'École n'est plus considérée comme un lieu de diffusion du savoir, mais comme un lieu de bien-être. Lorsque des idéologues rompus à l'art de la manipulation parlent de « l'École lieu de vie », ça n'est rien d'autre que pour mieux la dévoyer de sa vocation originelle et naturelle. Et si l'on manque de vigilance à l'égard de cette turpitude, l'on ne se rend pas compte de la dérive que l'on veut faire prendre à cette noble institution. Car, la réduire à un simple lieu de vie c'est lui ôter toute sa particularité (lieu d'apprentissage et de promotion de la connaissance) en l'assimilant, de manière captieuse, à n'importe quel vulgaire lieu de vie (un centre commercial, une gare, un stade, la rue, etc. ne sont-ce pas là aussi des lieux de vie ?). Au fond, ces "bénédictins" de la cause néo-libérale ne seraient pas mécontents de faire de l'École un centre de loisir à vocation éducative (accessoirement bien entendu).

Cela étant dit, pour un partage des idées, voici quelques modestes réflexions naguère exprimées autour justement de la question de la différenciation et autres soi-disant innovations pédagogiques :

https://www.antipedagog.com/linnovation-pedagogique-une-arme-de-culpabilisation-massive/

https://www.antipedagog.com/un-saute-greco-latin-a-la-sauce-trans-pluri-ou-inter-disciplinaire/

Bien à vous.

Modifié par desnos
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il y a 53 minutes, desnos a dit :

Lorsque des idéologues rompus à l'art de la manipulation parlent de « l'École lieu de vie », ça n'est rien d'autre que pour mieux la dévoyer de sa vocation originelle et naturelle. Et si l'on manque de vigilance à l'égard de cette turpitude, l'on ne se rend pas compte de la dérive que l'on veut faire prendre à cette noble institution. Car, la réduire à un simple lieu de vie c'est lui ôter toute sa particularité (lieu d'apprentissage et de promotion de la connaissance) en l'assimilant, de manière captieuse, à n'importe quel vulgaire lieu de vie (un centre commercial, une gare, un stade, la rue, etc. ne sont-ce pas là aussi des lieux de vie ?). Au fond, ces "bénédictins" de la cause néo-libérale ne seraient pas mécontents de faire de l'École un centre de loisir à vocation éducative (accessoirement bien entendu).

Il me semble que lorsqu'on désigne l'école comme un lieu de vie, on parle justement de ce lieu de savoir au centre de la vie des élèves, au centre de leur quartier, de leur quotidien. On en parle comme d'un lieu de vie pour souligner qu'il y existe des règles de vie en communauté, et qu'il faut les respecter pour pouvoir justement, trouver sa place au sein du groupe et mieux apprendre.

Ca me paraît un peu le contraire de l'individualisation prônée par les libéraux qui souhaite justement en faire un supermarché ou une gare, antithèses du lieu de vie, puisqu'il ne s'agit que de lieu de passage, où la dimension sociale de l'humain n'est pas prise en compte.

Pour le reste, je suis parfaitement d'accord pour regretter que  la différenciation se résume aujourd'hui à de l'individualisation. C'est en effet un gros problème. Il faut à mon avis réapprendre à instaurer la coopération entre élèves comme une condition sine qua non à l'apprentissage, réapprendre à faire construire une culture commune au groupe-classe, et de fait, faire de la différenciation une notion racinaire de l'enseignement sans rapport avec une quelconque remédiation.

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