piedsrouges Posté(e) 8 novembre 2005 Partager Posté(e) 8 novembre 2005 Je vous transmet le message de l'un de mes collègues prof de SES car il me semble que cela peut être utile d'avoir une réflexion au delà de ce que nous disent les médias. donc voilà: Je lis à droite, à gauche (c'est le cas de le dire) de très nombreuses analyses du "problème" actuel (et qui nous touche aussi, ici à Pau, quartier de l'Ousse des Bois). Dans le but d'y voir un peu plus clair, j'ai essayé de réaliser ci dessous (ou en pièce jointe), un inventaire ( à la Prévert ?) des diverses réflexions rencontrées, plus ou moins sérieuses et scientifiques, mais qui de loin ou de près relèvent d'un simple modèle causal (si on a la cause, ou les causes, d'un problème, alors, on est plus très loin d'une solution). Mon objectif est de préparer une séance avec mes élèves sur les dangers de l'amalgame, des raccourcis, de l'expérience subjective, de la bien pensance, bref de ce qui distingue une simple opinion d'une réflexion construite et argumentée. Pour ma part, je pense d'une part que notre savoir sociologique et économique peut contribuer à éclairer les élèves, et d'autre part que la raison n° 12 (fort chômage des jeunes) explique quand même pas mal de choses ! PS : soyez indulgents, il s'agit d'une première liste que l'on peut modifier progressivement, d'autant que j'ai essayé d'être au plus près de ce que j'ai lu et entendu (donc pas de langue de bois). N'hésitez pas à rectifier et à compléter : la liste est évidemment largement incomplète et je ne suis absolument pas certain de la pertinence de mes "casiers" de rangement. Et puis une liste enrichie sera utile pour les séances avec élèves. Très cordialement, Laurent Bruneau Les lieux et institutions 1) Les lieux et la ségrégation urbaine Variante 1 : La construction des grands ensembles après 1954 puis dans les années 70, génère de l'anonymat (Louis Wirth ?) et de la méfiance entre habitants qui se cloîtrent et s'ignorent. Echec des différentes politiques de la ville sur ce problème des relations sociales. Variante 2 : Dans une perspective écologie urbaine (Park et Burgess), on observe peu à peu un changement de composition de la population habitant ces grands ensembles, et une perte des repères habituels pour les anciens locataires. Variante 3 : On dit "quartiers", mais on oublie le phénomène de construction sociale du phénomène des banlieues. Au départ, il y a des problèmes locaux (des morts locaux et des réactions locales), pourquoi faudrait il faire des amalgames et trouver une cause unique et nationale aux problème des banlieues ? Et d'ailleurs, où s'arrête la banlieue ? 2) Les familles : Variante 1 : Elle ne font pas leur travail d'éducation et de socialisation, d'autant qu'il y a des familles qui profitent du système social (on fait des enfants pour les allocations, après on les abandonne aux services sociaux) Variante 2 : Il y a une crise des interdits, un recul généralisé de l'autorité (esprit mai 68, alors qu'une bonne fessée n'a jamais fait de mal,). L'impact de la taille de la fratrie ne doit pas être négligé (famille nombreuse plus difficile à surveiller), ainsi que l'impact de l'activité féminine (mères occupées à des activités éparpillées, type ménages, caisses, ou encore formalités administratives.). Variante 3 : L'éclatement des structures familiales (familles monoparentales)... mais peu probable dans les quartiers dits à problèmes caractérisés par des structures familiales traditionnelles. 3) Le groupe de pairs Variante 1 : La pression sociale du groupe de pairs (moqueries, défis "stupides" des pré ados) explique la surenchère destructive à laquelle on assiste (chaque voiture brûlée est un trophée que l'on exhibe à ses camarades). Variante 2 : La tribu, le groupe de pairs socialise par substitution (la formule est jolie…). La tribu de quartier intègre fortement (conscience collective forte, entretenue par les conflits de quartiers, relations nombreuses et quotidiennes, buts communs). Dans cette perspective, la police est perçue comme une tribu rivale parmi d'autres, peut être un peu plus puissante. 4) Les médias. Variante 1 : Les journalistes attisent la concurrence entre quartiers, flattent les égo de certains jeunes, et les poussent à la surenchère. Variante 2 : La TV (+ Internet, cf. les sky-blogs) est une caisse de résonance qui grossit démesurément des phénomènes locaux, et tend à transformer des incidents locaux (statistiquement normaux) en évènements nationaux. 5) La police. Variante 1 : elle n'ose plus aller dans certains quartiers, une micro-économie s'installe, la bande organisée dirigée par un caïd revend de la drogue ou des biens volés, et sous traite un travail de surveillance aux jeunes démunis (en particulier, le jeune mineur, qui irresponsable pénalement, est très utile), d'où pouvoir féodal et cycle de reproduction. Variante 2 : Les comportement de policiers changent avec les propos de leur ministre de tutelle, les vexations et les provocations se multiplient, d'où une réaction de colère, d'auto défense de jeunes se sentant menacés. Variante 3 : Un marché de l'insécurité s'est créé avec la privatisation croissante des services de police. Or un garagiste aime bien les accidents de voiture…. (cf. aussi Complots plus bas) 6) L'école : Variante 1 : Les enseignants n'ont plus les moyens budgétaires d'assurer leur mission : les établissements se dégradent et sont stigmatisés, une école à deux vitesse apparaît (celle des pauvres et celle des riches…ou des biens informés). Variante 2 : Les enseignants victimes de l'illusion "bourdivine", abandonnent leurs exigences dès l'école primaire. On en voit les résultats en matière d'illetrisme, les immigrés de deuxième génération cumulent alors les handicaps (problème de langue non traités), alors même que l'impact social de la réussite scolaire n'a jamais été aussi fort (il n'y a plus de voies de secours, dévalorisation de l'apprentissage, etc.) 7) Les associations Les groupes intermédiaires (cf. Associations ouvrières du parti communiste) assuraient l'intégration dans les banlieues rouges en fournissant une culture, une conscience et une logique de participation. Aujourd'hui, les associations locales (sport, culture…) et leurs animateurs n'ont plus les moyens d'assurer le lien social (réductions budgétaires, priorité au répressif et recul de la police de proximité), les jeunes se retrouvent sans activités, ni buts. La culture 8) Exclusion et discrimination Variante 1 : Impact de la discrimination quotidienne vécue (et rapportée dans les conversations) qui entretient un sentiment d'exclusion, et peut expliquer les moments de révolte (cf. analyses de Touraine disant que l'on passe de la question de l'exploitation à la question de l'exclusion). Variante 2 : Le modèle universalise français qui distingue espace privé et public, empêcherait la mise en oeuvre des politiques de discriminations positives, "seule" manière de sortir du problème. 9) Stigmatisation Etiquetage et comportements auto-validants à la fin du processus de disqualification (S. Paugam montre la carrière déviante : dévalorisations successives puis adaptation aux attentes des services sociaux) 10) Normes culturelles déviantes (et tribales) Variante 1 : cf. Groupes de pairs. Une véritable sous-culture apparaît avec ses propres codes (cf. analyses de A. K. Cohen sur les gangs) suite à l'échec des instances de socialisation habituelles. Variante 2 (bien pensance) : il faut séparer le bon grain de l'ivraie, tous les jeunes ne sont pas des "casseurs", il y a des "bons" jeunes (majoritaires mêmes) qui tentent de s'intégrer et adhèrent aux normes et valeurs républicaines. Ou encore : il y a de bonnes familles républicaines qui essayent de transmettre les valeurs républicaines. 11) L'émergence d'une conscience de classe ? Certaines actions ciblées (anti voitures et concessionnaires) et les appels à la démission d'un gouvernement de droite, font penser à un début d'identification avec les catégories populaires. Les problèmes économiques 12) Le chômage Le travail donne revenus, position sociale (avec statut affiché par la consommation), identité et accès à la protection sociale. Le chômage dans les quartiers (près de 60% des jeunes actifs ? –chiffre à vérifier) entraîne désœuvrement, sentiment d'inutilité et d'indignité, etc. Il peut alors y avoir désaffiliation (cf. Castel, même si son concept ne s'applique pas directement à cet objet d'étude) et frustration économique (cf. Merton : adoption des buts –la société de consommation, mais accès interdit aux moyens légitime d'y parvenir). La "nature" des individus 13) Tous des "racailles" irrécupérables (donc, il faut "nettoyer" les quartiers et mettre hors circuit cette population)… Variantes : la police est inefficace donc on a qu'a faire venir l'armée pour ce type de population dangereuse, il faut s'attaquer au problème dès le CP et emprisonner les petits "sauvageons". 14) Tous des "arabes", ils sont fainéants par nature et "inassimilables", ce qui explique les problèmes, il faut les renvoyer chez eux (charters ?). Les complots : 15) Mafias L'apparition et le maintien de zones de non droit est utile à la mise en place et au développement d'activités illicites à grande échelle (en même temps que cela procure de la main d'œuvre). 16) Islam Des groupes islamistes manipulent les évènements afin d'augmenter leur aire d'influence (par exemple, imposer le foulard en France) en se présentant comme recours pour les jeunes désorientés, et comme interlocuteurs privilégiés des autorités politiques. En même temps c'est une manière d'imposer le modèle d'intégration communautariste. 17) Usa (Hum, hum…) Secret encouragement américain aux "émeutes" (riots !) pour réduire l'influence française dans le monde, et déstabiliser le pouvoir français actuel (cf. déstabilisation de l'influence française en Afrique, et litiges à propos de l'Irak). Dernier point : personne, à ma connaissance, ne fait vraiment de parallèle avec Mai 68. Pourtant en 68, les étudiants n'avaient pas été immédiatement suivis par les ouvriers qui les voyaient plutôt comme des privilégiés au fond complices. Je sais bien qu'il y avait moins d'étudiants à l'époque que de jeunes de banlieue, mais à mon avis le parallèle devrait être creusé. A l'époque, le discours de l'ordre était identique (il faut nettoyer le "chiendent") et les adultes en place ne comprenaient pas "les jeunes" tout à coup devenus dangereux et irresponsables (dans l'imaginaire bourgeois de l'époque, un jeune Cohn Bendit dépravé, devait faire au moins aussi peur qu'un beur en survêtement et capuche aujourd'hui !). Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites Plus d'outils de partage
Anwamanë Posté(e) 8 novembre 2005 Partager Posté(e) 8 novembre 2005 On vient de me dire : "Il leur faudrait une bonne guerre à ces ptits cons, ils comprendraient" :o Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites Plus d'outils de partage
roubachoff Posté(e) 8 novembre 2005 Partager Posté(e) 8 novembre 2005 insultes, couvre-feu... à quand Papon renommé au poste de préfet et les pleins pouvoirs au maréchal... l'UMP est vraiment indigne d'une démocratie. Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites Plus d'outils de partage
dameoiselle Posté(e) 8 novembre 2005 Partager Posté(e) 8 novembre 2005 C'est pas un chèque qui leur faut à ces "pauvres petits jeunes"... c'est un coup de pied au c... <{POST_SNAPBACK}> Moi aussi, chui comme ça, ... quand les gens ont des réactions qui m'échappent , au lieu de chercher l'origine du problème, je les frappe. NB: à ceux qui liraient en diagonale: ceci est de l'ironie. "Un bon coup de pied au c.. "dit-elle... Bah je suis volontaire pour décerner le premier...gare à tes fesses! :P Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites Plus d'outils de partage
Yseult Posté(e) 8 novembre 2005 Partager Posté(e) 8 novembre 2005 Dernier point : personne, à ma connaissance, ne fait vraiment de parallèle avec Mai 68. Pourtant en 68, les étudiants n'avaient pas été immédiatement suivis par les ouvriers qui les voyaient plutôt comme des privilégiés au fond complices. Je sais bien qu'il y avait moins d'étudiants à l'époque que de jeunes de banlieue, mais à mon avis le parallèle devrait être creusé. A l'époque, le discours de l'ordre était identique (il faut nettoyer le "chiendent") et les adultes en place ne comprenaient pas "les jeunes" tout à coup devenus dangereux et irresponsables (dans l'imaginaire bourgeois de l'époque, un jeune Cohn Bendit dépravé, devait faire au moins aussi peur qu'un beur en survêtement et capuche aujourd'hui !). Si, si, moi... mais on ne m'a pas interviouwée... Pour info : (Canard enchainé du 28/09/05... donc avant les émeutes) "Le syndicat des commissaires s'attaque aux délinquants en couches-culottes (...) La sécurité du quotidien- Les propositions du SCHFPN (syndicat des commissaires et hauts fonctionnaires de la police nationale)- La prévention de la délinquance et l'accompagnement des publics vulnérables Aucune action n'a été expérimentée à ce jour auprès des enfants qui présentent un comportement prédicteur de délinquance dès la crêche, la maternelle ou l'école primaire (...) La prévention de la victimisation constitue une part importante de la prévention de la délinquance (...)" Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites Plus d'outils de partage
Miss Philoména Posté(e) 8 novembre 2005 Partager Posté(e) 8 novembre 2005 Sarko n'es qu'un gros mou, Bayrou, lui au moins avait mis une vraie grosse baffe à un "sauvageon"... Ceci est aussi de l'ironie ! Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites Plus d'outils de partage
--anonyme-- Posté(e) 8 novembre 2005 Partager Posté(e) 8 novembre 2005 Merci piedsrouges hug ! Concernant mai 68, il y a une autre différence fondamentale (parmi les similitudes), la jeunesse révoltée était malgré tout protégée (pas d'état d'urgence) car elle émanait des futures "élites" donc respectables tout de même et "indispensables" à la société en devenir. Là ce sont des "incultes ", des gens promis au chômage, et pourquoi pas "inintelligents" et "inutiles". Les termes sont volontairement exagérés. Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites Plus d'outils de partage
Anwamanë Posté(e) 8 novembre 2005 Partager Posté(e) 8 novembre 2005 Juste une petite lueur d'espoir... Des "jeunes" de mon "village" sont en train de faire une magnifique fresque, une phrase comme titre : " Les peuples se battent souvent, mais se métissent toujours" Je ne sais plus si c'était les termes exacts... Ca fait un bien fou de lire cela "quand on entend ce qu'on entend"en ce moment... Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites Plus d'outils de partage
lolvs Posté(e) 8 novembre 2005 Partager Posté(e) 8 novembre 2005 Merci piedsrouges hug !Concernant mai 68, il y a une autre différence fondamentale (parmi les similitudes), la jeunesse révoltée était malgré tout protégée (pas d'état d'urgence) car elle émanait des futures "élites" donc respectables tout de même et "indispensables" à la société en devenir. Là ce sont des "incultes ", des gens promis au chômage, et pourquoi pas "inintelligents" et "inutiles". Les termes sont volontairement exagérés. <{POST_SNAPBACK}> et puis en mai 68, ils défendaient une cause. Ils étaient organisés et la majorité des gens étaient solidaires de ce mouvement. Là, la majorité en a marre de tout ce bordel Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites Plus d'outils de partage
AubergineFelee Posté(e) 8 novembre 2005 Partager Posté(e) 8 novembre 2005 Merci piedsrouges hug !Concernant mai 68, il y a une autre différence fondamentale (parmi les similitudes), la jeunesse révoltée était malgré tout protégée (pas d'état d'urgence) car elle émanait des futures "élites" donc respectables tout de même et "indispensables" à la société en devenir. Là ce sont des "incultes ", des gens promis au chômage, et pourquoi pas "inintelligents" et "inutiles". Les termes sont volontairement exagérés. <{POST_SNAPBACK}> et puis en mai 68, ils défendaient une cause. Ils étaient organisés et la majorité des gens étaient solidaires de ce mouvement. Là, la majorité en a marre de tout ce bordel <{POST_SNAPBACK}> OUI, mais comme ceux qui foutent la merde, en ont ras le bol d'être dans la merde, de n'être pas considéré, d'être mis sur la touche !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites Plus d'outils de partage
zozozoo Posté(e) 8 novembre 2005 Partager Posté(e) 8 novembre 2005 la majorité des gens étaient solidaires de ce mouvement. <{POST_SNAPBACK}> Je n'ai pas le temps de chercher mais je ne parierai pas Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites Plus d'outils de partage
Florent Posté(e) 8 novembre 2005 Partager Posté(e) 8 novembre 2005 Et non, pas une majorité favorable. De Gaulle avait dissous l'assemblée et il a obtenu une majorité de droite très impressionnante. Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites Plus d'outils de partage
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